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La bourse de Milan touchée par la crise libyenne

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La bourse de Milan n'a pas ouvert ses portes mardi, officiellement à cause d'un "problème technique". - [Martin Ruetschi]
Signe de l'étroitesse des liens entre l'Italie et la Libye, l'inquiétude suscitée par les violences contre le régime du colonel Kadhafi a fait chuter la Bourse de Milan de 3,59% lundi. Mardi matin, elle était fermée à cause d'un "problème technique".

Dans un communiqué, Borsa Italiana, le gestionnaire de la place financière italienne, a indiqué que tous ses principaux marchés dont celui des actions, qui ouvre habituellement à 8h, étaient "suspendus à cause d'un problème technique". Interrogé, un porte-parole du gestionnaire de la Bourse s'est refusé à donner plus de précisions.

Lundi, l'indice vedette de la Bourse de Milan, le FTSE Mib, a chuté de 3,59% à 22.230 points, en raison des violences en Libye dont les liens économiques sont très étroits avec l'Italie.

Les excuses de l'Italie

D'UniCredit à Finmeccanica en passant par ENI ou la Juventus, le régime de Mouammar Kadhafi a investi ses "pétrodollars" dans les entreprises de la péninsule qui peut compter en contrepartie sur le pétrole libyen et de juteux contrats.

Les liens entre les deux pays se sont resserrés depuis la signature en août 2008 d'un accord historique soldant les comptes de la colonisation italienne (1911-1942). Silvio Berlusconi avait alors présenté les excuses de l'Italie et s'était engagé à verser 5 milliards de dollars de dédommagements en 25 ans sous forme d'investissements.

Depuis ce traité, Tripoli - qui avait déjà investi dans des entreprises italiennes et avait notamment détenu jusqu'à 10% de Fiat avant de céder sa part - a renforcé sa présence dans le capital des grands groupes italiens. Selon le quotidien Il Sole 24 Ore, la valeur des participations détenues par la Libye en Italie s'élève à 3,6 milliards d'euros.

La Libye, premier actionnaire de la première banque italienne

L'investissement le plus important de la Libye est UniCredit. A l'automne 2008, en pleine crise financière, la banque centrale libyenne était montée à plus de 4% de la première banque italienne, alors en mauvaise posture.

Avec l'entrée du fonds souverain Libyan Investment Authority (LIA) l'été dernier, la Libye est devenue le premier actionnaire d'UniCredit avec une part globale de 7,582%, ce qui avait provoqué une grave crise ayant abouti à l'éviction du patron Alessandro Profumo par les actionnaires.

La LIA détient par ailleurs depuis fin janvier 2,01% du groupe d'aéronautique et de défense Finmeccanica, contrôlé par l'Etat italien. La Libye détient également environ 0,5% du groupe pétrolier ENI selon une source proche du dossier.

Cette participation n'a pas été signalée à l'autorité boursière car elle est inférieure à 2%. Tripoli avait signalé fin 2008 son intention de prendre de 5 à 10% d'ENI mais cela ne s'est finalement pas fait.

La Juventus à 7,5% libyenne

A travers la Libyan Arab Foreign Investment Company, Tripoli a aussi 7,5% du club de football de la Juventus de Turin. La Libye avait également manifesté son intérêt pour le groupe d'énergie Enel ou Telecom Italia mais cela est resté lettre morte. En contrepartie, l'Italie reçoit près du tiers du pétrole extrait en Libye où ENI est le premier producteur étranger.

Des entreprises italiennes ont été sélectionnées pour de juteux contrats (universités notamment pour Impregilo, sécurité et ferroviaire pour Finmeccanica, autoroute...) et UniCredit a obtenu de son côté le feu vert pour ouvrir une filiale en Libye.

L'ancienne puissance coloniale est le premier partenaire commercial de Tripoli: en 2009, l'Italie était le premier débouché des exportations libyennes (20%) et le premier exportateur en Libye, avec une part de marché de 17,5%. 180 entreprises italiennes sont installés sur place ainsi que quelque 1500 citoyens italiens.

afp/vkiss

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Les autres bourses aussi inquiétées

La poussée de violences dans le monde arabe et particulièrement en Libye a fait trembler les Bourses asiatiques et européennes, en net recul mardi, et flamber les cours de brut, sur fond de craintes d'approvisionnement en gaz et pétrole.

Tokyo (-1,78%) et Hong Kong (-2,11%) ont chuté en clôture, et Paris (-1,54%), Londres (-1,11%) et Francfort (-0,50%) baissaient sensiblement vers 11h, les marchés américains ayant jusqu'ici été préservés par la fermeture des Bourses lundi en raison d'une fête nationale (President's Day).

Première source de préoccupation: le pétrole, qui a atteint des niveaux inédits depuis 2008, en raison principalement de l'escalade meurtrière en Libye, l'un des principaux producteurs d'or noir en Afrique, qui fait peser une menace directe sur l'approvisionnement.

A Londres, le baril de Brent de la mer du Nord s'échangeait à 106,80 dollars peu avant 11H après avoir atteint 108,57 dollars dans la matinée, un plus haut depuis septembre 2008.

Le Franc suisse renforcé, l'Euro affaibli

Autre dégât collatéral: l'euro était en recul marqué mardi matin. "Le marché est entièrement focalisé sur la situation au Moyen Orient et en Libye, où la situation est totalement incertaine", a déclaré un analyste de la Bank of Tokyo-Mitsubishi UFJ. "Les investisseurs fuient les actifs risqués en raison des tensions en Afrique du Nord et au Moyen-Orient et de la baisse des Bourses asiatiques", a-t-il ajouté.

A l'inverse, les traditionnelles valeurs-refuge, comme l'or ou le franc suisse, ont connu une réelle ascension. Le marché obligataire s'est également légèrement détendu, profitant du recul des marchés actions.

Outre l'approvisionnement en pétrole, l'inquiétude qui pèse sur les économies mondiales est de voir les troubles au Moyen-Orient plomber la timide reprise, la hausse du brut entraînant une hausse des prix des carburants, puis des prix en général, dans des pays à peine remis de la crise de 2008/2009.