Modifié

Discussions autour de la succession de DSK

Christine Lagarde est évoquée pour reprendre le poste de DSK, cepednat elle est au coeur d'une controverse pour sa gestion de l'indemnisation de Bernard Tapie. [KEYSTONE - IAN LANGSDON / POOL]
La ministre française de l'économie, Christine Lagarde, est évoquée pour reprendre le poste de DSK. - [KEYSTONE - IAN LANGSDON / POOL]
Les discussions sur la succession de Dominique Strauss-Kahn à la tête du FMI allaient bon train jeudi. Les Européens, soucieux de conserver la direction générale, ont évoqué ouvertement plusieurs noms, dont celui de Christine Lagarde. Mais les pays émergents veulent avoir leur mot à dire.

Le directeur général sortant du Fonds monétaire international (FMI) avait à peine présenté sa démission depuis sa prison newyorkaise que les Européens avançaient leurs pions.

"Nous sommes d'avis que nous pouvons trouver des candidats solides en Europe pour succéder à Dominique Strauss-Kahn", a déclaré la porte-parole du président de la Commission européenne José Manuel Barroso.

De même, le ministre britannique du Commerce Vince Cable a estimé que le prochain patron devrait être issu de la zone euro, rejetant implicitement l'éventuelle candidature de son compatriote Gordon Brown, ex-Premier ministre.

La France et l'Allemagne ont aussi abondé en ce sens. Selon le "Handelsblatt", citant des sources proches du pouvoir à Berlin, la chancelière allemande Angela Merkel soutiendrait la ministre française de l'économie Christine Lagarde, dont le nom est avancé depuis quelques temps.

Christine Lagarde favorite

Selon une source européenne, "Lagarde a un très bon profil, une réputation très solide en Europe et en dehors". Elle parle bien anglais, aime les Etats-Unis où elle a longtemps travaillé.

Jean-Claude Trichet a annoncé l'accord sur la réforme du secteur financier.
Jean-Claude Trichet a annoncé l'accord sur la réforme du secteur financier.

Etre une femme serait aussi un atout, vu la sous-représentation féminine dans les instances internationales.

Mais après l'affaire touchant Dominique Strauss-Kahn, qui a empêché son troisième patron successif de terminer son mandat, le FMI ne peut pas risquer que le futur occupant du poste ait à son tour des démêlés judiciaires.

Un procureur français a en effet récemment menacé Christine Lagarde d'une enquête dans un dossier lié à Bernard Tapie. Jusqu'ici, la principale intéressée refuse de dire si elle est tentée par le poste. "Toute candidature, quelle qu'elle soit, devra émaner des Européens, qui se rassemblent, tous ensemble", s'est-elle contentée de dire jeudi.

Arrangement européen

Parmi les autres noms évoqués, celui d'un autre Français revient souvent: Jean-Claude Trichet, le président de la Banque centrale européenne (BCE). L'ex-président de la Bundesbank allemande Axel Weber tout comme dans une plus moindre mesure le patron de la Deutsche Bank, le Suisse Josef Ackermann.

Crise de la dette en zone euro oblige, les Européens veulent conserver la direction du FMI, dont ils sont les premiers contributeurs financiers. Depuis 1946, il a toujours été dirigé par un Européen, les Américains obtenant en échange la Banque mondiale.

Critiques

Mais cet arrangement est critiqué dans le reste du monde. "Le temps est fini où ce poste important était réservé à un citoyen européen", a prévenu le ministre brésilien des Finances, Guido Mantega.

"Ce serait important que ce soit quelqu'un issu des pays émergents, car cela consoliderait la réforme entreprise par Strauss-Kahn", a également déclaré à la presse le ministre argentin de l'Economie, Amado Boudou.

"Les nouveaux marchés émergents et les pays en développement doivent être représentés à la direction du FMI", a de son côté affirmé la Chine.

Le ministre japonais des Finances, dont le pays est le deuxième pourvoyeur de fonds du FMI, a appelé l'organisme international à choisir un nouveau dirigeant de manière "ouverte et transparente".

L'Asie ne semble toutefois pas assez unie pour pousser un de ses représentants. Lors d'une récente réunion de la Banque asiatique de développement, plusieurs ministres se seraient même dits favorables à Christine Lagarde.

Un Kazakh proposé

La Communauté des Etats indépendants (CEI), qui regroupe la Russie et 10 pays d'ex-URSS a décidé de proposer le chef de la Banque centrale du Kazakhstan, Grigori Martchenko.

Beaucoup d'observateurs parient également sur l'ex-ministre des Finances turc Kemal Dervis.

Le FMI a annoncé la démission de M. Strauss-Kahn dans la nuit de mercredi à jeudi, en publiant une lettre dans laquelle il dit quitter l'institution qu'il dirigeait depuis novembre 2007, et "réfute avec la plus extrême fermeté" les crimes sexuels pour lesquels il est incarcéré à New York depuis lundi.

ats/mre

Publié Modifié

Les possibles successeurs

- Christine Lagarde , 55 ans, ministre française de l'Economie. L'économiste américain Nouriel Roubini l'a présentée comme le meilleur compromis possible si jamais les Etats membres souhaitent maintenir le poste dans le giron de l'Europe. Elle est très appréciée de ses confrères du G20 et de la zone euro. Cependant, elle est au coeur d'une controverse en France pour sa gestion de l'indemnisation de l'ancien homme d'affaires Bernard Tapie, dans l'affaire de la vente d'Adidas par le Crédit Lyonnais en 1993.

- Kemal Dervis, 62 ans, ancien ministre des Finances turc. Cette figure bien connue des institutions internationales, qui fut administrateur du Programme des Nations unies pour le développement et travailla plus de vingt ans à la Banque mondiale, cumule deux grands atouts: il est issu d'un pays émergent membre du G20 et il est proche des Européens. Il faudra cependant convaincre les Européens qu'ils lâchent le poste.

- Montek Singh Ahluwalia, 67 ans, directeur adjoint du Commissariat au Plan indien. Favori pour être le candidat officiel de New Dehli, il a travaillé et à la Banque mondiale et au Bureau indépendant d'évaluation du FMI. La presse indienne a écrit ces dernières semaines sur l'envie du gouvernement de décrocher le poste. Mais il ne sera pas forcément suivi par ses homologues asiatiques.

- Tharman Shanmugaratnam, 54 ans, ministre des Finances singapourien. Président du Comité monétaire et financier international, l'instance qui détermine les orientations politiques du FMI, il vient d'un pays qui pourrait représenter un bon compromis pour les Asiatiques. Mais sa carrure personnelle n'est pas celle d'autres candidats.

- Trevor Manuel, 55 ans, ancien ministre des Finances sud-africain. Cet homme qui avait accédé très jeune aux responsabilités sous la présidence de Nelson Mandela est poussé par son pays comme représentant de tout un continent. Mais les pays africains sont restés muets depuis que son nom a émergé.

- Agustin Carstens, 52 ans, gouverneur de la Banque du Mexique. Respecté à Washington pour sa gestion des finances publiques à l'époque il fut ministre (2006-2009), il est consensuel au sein du G20. Mais le Mexique contrôle déjà le poste de numéro un de l'OCDE, avec Angel Gurria.

- Stanley Fischer, 67 ans, gouverneur de la Banque d'Israë.l Incarnation du consensus de Washington, il fut premier directeur général adjoint du FMI de 1994 et 2001. Ce poste est traditionnellement réservé à un Américain, nationalité qu'il possède aussi. C'est ce point qui pourrait poser problème, dans la mesure où les Etats-Unis contrôlent la présidence de la Banque mondiale.