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Procès BCGE: deux ans de prison requis

L'enseigne de la BCGE. [keystone - Martial Trezzini]
Trois ex-dirigeants et deux réviseurs répondent de faux dans les titres et de gestion déloyale aggravée dans la débâcle de la BCGE. - [keystone - Martial Trezzini]
Le procureur général Daniel Zappelli a requis jeudi devant le tribunal correctionnel de Genève deux ans de peine privative de liberté avec sursis à l'encontre des cinq prévenus du procès de la BCGE.

A ses yeux, ces hommes sont des criminels et des hypocrites. Ils ont violé les principes comptables connus et ont agi en félons, a lancé le procureur général. "Ils se présentent en tant que pompiers alors que ce sont eux les incendiaires", a souligné M. Zappelli en fustigeant l'absence totale de regrets de la part des prévenus.

Les comptes doivent donner une impression réelle de la santé de la banque en dehors de tout "bidouillage", a rappelé le procureur général. En l'espèce, il estime que "les principes de sincérité et de prudence ont été violés de manière incommensurable". Le procureur général va plus loin en affirmant que les comptes présentés et révisés étaient trafiqués. Et d'insister sur les provisions insuffisantes en particulier dans le département des affaires spécifiques.

Des roitelets

Selon Daniel Zappelli, l'orgueil et un ego surdimensionné constituent les mobiles des trois anciens dirigeants de la banque. Ils n'ont pas eu le courage d'annoncer la véritable situation de l'établissement alors au bord du gouffre. S'ils l'avaient fait, ils auraient certainement "giclé", explique-t-il. Et à l'époque, "ces messieurs étaient des roitelets à Genève". Ils voulaient ainsi protéger leur rang social, estime le procureur.

Le sursis

Les réviseurs étaient liés par des mandats auprès d'autres établissements bancaires importants, argumente M. Zappelli. Le risque "réputationnel" de leur société était donc engagé, ce qui aurait pu mettre en péril ces autres mandats.

Pour le ministère public, la culpabilité des cinq prévenus -trois anciens dirigeants et deux réviseurs-, qui répondent de faux dans les titres et de gestion déloyale qualifiée, ne fait aucun doute. Il a requis deux ans de prison avec sursis ainsi que leur participation aux frais de procédure.

Des farouches gardiens

Christophe Emonet, l'un des avocats de la banque, partie plaignante dans ce procès, a enchaîné avec une longue plaidoirie mettant en lumière un véritable culte du secret instauré par quatre des prévenus pour cacher le manque de provisions. "Ces hommes étaient les farouches gardiens du secret", a-t-il insisté. Selon l'avocat, le manque global de provisions atteignait 1,269 milliards en 1998: "il en fallait de la créativité pour cacher ce trou abyssal".

Ils ont réussi en muselant l'inspectorat interne ainsi que le service juridique de la BCGE et en ne fournissant pas toutes les informations nécessaires au Conseil d'administration. Même la commission fédérale des banques a été bernée.

Un cercle d'initiés

"Quelle débauche d'énergie, quelle fuite en avant", s'exclame Christophe Emonet. L'avocat a chargé les deux anciens dirigeants Marc Fues et René Curti - ainsi que les deux réviseurs. Il a par contre laissé Dominique Ducret, ancien président de la BCGE, à l'extérieur du cercle des initiés, tout en soulignant qu'il était difficile d'estimer ce dont ce dernier avait vraiment connaissance.

Frappée de plein fouet par la crise immobilière des années nonante, la BCGE s'est retrouvée au bord de la faillite en 2000. Sans l'intervention de l'Etat de Genève, l'établissement aurait sombré. Pour la collectivité, ce sauvetage aura coûté 2,3 milliards de francs. Le procès se poursuit vendredi avec les plaidoiries des avocats de l'Etat de Genève.

ats/cht/olhor

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