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Les banquiers suisses ne se laissent pas intimider

Le président de l'ASB Patrick Odier défend la position des banquiers suisses contre les pressions américaines. [Steffen Schmidt]
Le président de l'ASB Patrick Odier défend la position des banquiers suisses contre les pressions américaines. - [Steffen Schmidt]
L'Association suisse des banquiers (ASB) s'accommode mal des coups de boutoir américains dans le dossier fiscal. Alors que les Etats-Unis font à nouveau pression sur la place financière suisse, l'ASB ne veut pas d'un second accord séparé du type "UBS".

Alors que la justice américaine ne relâche pas la pression pour obtenir de banques suisses l'identité de clients ayant fraudé le fisc, le président de l'Association suisse des banquiers (ASB), Patrick Odier croit en une solution négociée dans le conflit fiscal avec les Etats-Unis. Mais pas question d'un nouvel accord bilatéral.

Le conflit sur les anciens avoirs non déclarés au fisc remet en question la sécurité du droit, a dit lundi à Zurich Patrick Odier, à la veille de la "Journée des banquiers 2011", l'assemblée générale de l'ASB.

Le Genevois n'a évoqué qu'indirectement l'ultimatum que la justice américaine aurait adressé à plusieurs banques pour obtenir l'identité de clients accusés d'avoir fraudé le fisc. "Entre États amis, on peut résoudre les problèmes", a relevé M. Odier.

A son avis, poser un ultimatum n'apparaît pas habituel. L'accord intervenu avec les Etats-Unis dans l'affaire UBS "n'a malheureusement pas permis de lever tous les obstacles".

"Il s'agit d'une situation délicate à laquelle nous devons désormais trouver une solution". M. Odier s'est dit convaincu que les Etats-Unis feront preuve de compréhension face à la situation helvétique. Les Américains "savent que la Suisse n'est pas une république bananière", a noté le banquier privé.

L'ASB contre un nouvel accord

Pour autant, un nouvel accord bilatéral doit être évité, a-t-il affirmé. Une place financière oeuvrant à l'échelle internationale, comme la Suisse, ne saurait réussir sans réaliser d'opérations avec les Etats-Unis. La solution doit présenter une portée universelle et être conforme au droit suisse.

La Suisse dispose déjà d'une convention de double imposition en vigueur avec les Etats-Unis et elle en a signé une nouvelle. Des accords qui ont été précisément conclus pour de telles situations. La solution doit donc intervenir dans leur cadre, a poursuivi M. Odier.

Les banques doivent répondre des éventuels comportements illégaux de leurs collaborateurs aux Etats-Unis, à la condition qu'aucune loi suisse ne soit violée ce faisant. La problématique des activités transfrontalières aux Etats-Unis peut être résolue, mais il faut que les Etats-Unis comprennent que les lois suisses doivent être respectées, soutient le Genevois.

Les accords fiscaux conclus avec l'Allemagne et le Royaume-Uni, qui permettent de tirer un trait sur le passé, constituent des étapes importantes dans la nouvelle stratégie du secteur. Celle-ci vise un horizon à 2015 et "a pour pierre angulaire l'acquisition et la gestion de capitaux déclarés", a dit M. Odier.

Bonnes affaires en 2010

Claude-Alain Margelisch (à gauche), directeur de l'ASB a annoncé de bons résultats pour 2010. [KEYSTONE - STEFFEN SCHMIDT]
Claude-Alain Margelisch (à gauche), directeur de l'ASB a annoncé de bons résultats pour 2010. [KEYSTONE - STEFFEN SCHMIDT]

Les Etats-Unis pourraient par ailleurs s'inspirer des conventions conclues avec Berlin et Londres, lesquelles permettent notamment de préserver la sphère financière privée des clients et facilitent l'accès bilatéral aux marchés allemand et britannique.

Evoquant pour sa part l'exercice 2010 pour l'ensemble de la branche, Claude-Alain Margelish, directeur de l'ASB, a mis en exergue une contexte économique marqué par la bonne conjoncture.

Le résultat cumulé des établissements helvétiques a ainsi progressé de 13,4% au regard de 2009 à 61,5 milliards de francs, porté par l'évolution favorable des opérations d'intérêts et de négoce.

Pour la première fois depuis le début de la crise financière, le total du bilan des banques en Suisse s'est réorienté à la hausse, progressant de 1,7% à 2714,5 milliards de francs. Les limites de crédit octroyées pour les hypothèques et autres crédits bancaires se sont inscrites à 898 milliards.

Les ménages sont restés les principaux emprunteurs avec 66,7% du volume de crédit national.

Impact du franc fort

Après le recul de l'emploi enregistré en 2009, les banques ont renforcé leurs effectifs en 2010 et emploient désormais en Suisse quelque 108'000 collaborateurs. Selon l'enquête de l'ASB, les effectifs devraient stagner au second semestre 2011.

Également impliquées dans l'économie d'exportation, les banques suisses ont elles aussi ressenti les effets du franc fort. En raison de l'effet de conversion, la valeur des positions du bilan, des avoirs sous gestion et des autres opérations hors bilan en devises étrangères baissent. La part élevée de coûts en francs suisses compromet en outre l'évolution des bénéfices.

agences/ffi

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Répercussions à la Bourse

Face à l'annonce de ces difficultés avec le fisc américain, les valeurs bancaires chutaient à la Bourse suisse, Credit Suisse perdant 7,26% à 20,18 francs suisse et UBS reculant de 5,8% à 10,40 francs suisses dans un marché en baisse de 2,70% à 14h30.

L'affaire UBS

Ce nouveau rebondissement rappelle le sort qu'avait subi la première banque suisse UBS, obligée de divulguer aux autorités américaines en août 2009 les noms de 4450 clients américains auxquels elle avait offert de cacher des fonds au fisc.

L'établissement avait également payé une amende de 780 millions de dollars pour pouvoir conserver son agrément aux Etats-Unis.