L'affaire fait encore actuellement l'objet d'une enquête interne, a précisé jeudi UBS dans un bref communiqué diffusé à quelques minutes seulement de l'ouverture de la Bourse suisse. Selon l'établissement, ce cas n'a pas affecté de positions de clients.
Si l'UBS ne délivre que peu d'informations, les opérations de courtage non autorisées ont été effectuées à Londres. La police de la capitale britannique a pour sa part confirmé à l'ats avoir arrêté dans la nuit de mercredi à jeudi un homme de 31 ans.
Le suspect, dont UBS a confirmé par la suite qu'il s'agit d'un de ses employés, a été immédiatement placé en détention. Selon plusieurs médias, le courtier était actif dans le domaine des fonds indiciels (exchange traded funds ou ETF) au sein de l'unité marché d'actions européennes.
Selon Louise Cooper, analyste chez BGC Partners, interrogée par le Dailymail, la transaction à l'origine de la perte de l'UBS aurait impliqué une opération de spéculation contre le franc suisse, qui aurait mal tourné après l'intervention de la Banque nationale suisse sur les marchés pour réduire la valeur du franc.
Ces accusations ne sont pas nouvelles. En juin dernier, UBS et Credit suisse avaient déjà été accusées de spéculer contre le franc suisse par l'économiste Bernd Schips, ancien directeur du centre de recherches conjoncturelles de l'École polytechnique fédérale de Zurich. Voir la vidéo:
Chute de l'action UBS
La sanction des investisseurs ne s'est elle pas fait attendre. A l'ouverture de la Bourse suisse, le titre UBS lâchait 8,5% par rapport à la clôture de la veille, pour accentuer ses pertes dans l'après-midi en abandonnant vers 15h25 8,97% à 9,95 francs. L'indice des valeurs vedettes Swiss Market Index (SMI) gagnait dans le même temps 1,13%.
Dans le même temps, l'indice des valeurs vedettes Swiss Market Index (SMI) gagnait 0,6%. L'action UBS était passée au-dessous de 10 francs pour la dernière fois le 10 août dernier à 9,75 francs. Le plus bas historique du titre du numéro un bancaire helvétique remonte pour sa part au 9 mars 2009 à 8,20 francs.
L'affaire n'est pas sans rappeler notamment celle qui avait touché la banque française Société Générale au début 2008, lorsque des opérations d'un de ses courtiers, Jérôme Kerviel, avaient entraîné des pertes de 4,9 milliards d'euros. Jugé seul responsable de ce débours, l'ex-trader a été condamné en octobre 2010 à cinq ans de prison dont trois ferme.
Réputation mise à mal
Après avoir frôlé la faillite à la suite de la crise financière, puis subi les foudres des autorités américaines dans le cadre d'affaires d'évasion fiscale, UBS voit une nouvelle fois sa réputation mis à mal.
L'affaire éclate alors même que le Conseil national débat de la réglementation "too big to fail" sur les banques.(lire: "Too big to fail")
Si les experts ne jugent pas dramatique le dommage financier subi par UBS, ils redoutent en revanche celui affectant la réputation de l'établissement. Même dans les cas où les agissements non autorisés du courtier ne seraient pas illicites, ils jettent le doute sur la gestion des risques, a relevé un analyste.
Contexte tendu
Cette affaire éclate alors qu'UBS est parvenue à rétablir la confiance de sa clientèle cette année. La banque avait ainsi affiché un afflux net de nouveaux capitaux de 22,3 milliards de francs, au premier trimestre, un record depuis la crise financière.
Ce cas de fraude intervient aussi dans un contexte économique devenu de plus en difficile pour les banques au fil des derniers mois en raison de la crise de la dette en Europe et aux Etats-Unis. Pour mémoire, fin août, UBS a concrétisé les mesures d'économies annoncées un mois plus tôt en vue d'économiser 2 milliards de francs par an d'ici 2013.
L'établissement entend supprimer pas moins de 3500 emplois sur un total de 65'700. UBS avait alors indiqué que la restructuration entraînera une charge de 550 millions de francs, dont 450 millions seront comptabilisés sur le 3e trimestre 2011. Alors que l'établissement a vu son bénéfice net plonger de près de moitié au 2e trimestre à 1,015 milliard de francs, il est ainsi fort probable que les pertes liées à cette fraude le plongent dans le rouge. UBS avait affiché des chiffres rouges pour la dernière fois au 3e trimestre 2009, avec une perte nette de 564 millions de francs.
agences/mre/ffi
Rappel des scandales financiers retentissants des dernières années
- BARINGS: en février 1995, la plus ancienne banque d'affaires britannique, la Barings, est déclarée en faillite après les mauvais placements d'un de ses courtiers. Basé à Singapour, Nick Leeson avait parié sur un rebond de l'indice de la Bourse de Tokyo et spéculé sur le prix du pétrole, accumulant 1,3 milliard de dollars de pertes. Il est condamné à six ans et demi de prison.
- DAIWA BANK: en septembre 1995, la banque japonaise Daiwa Bank annonce une perte exceptionnelle d'environ 1,1 milliard de dollars du fait des agissements frauduleux de l'un de ses employés à New York. Toshihide Iguchi est condamné à quatre ans de prison et deux millions de dollars d'amende.
- SUMITOMO: en juin 1996, le groupe japonais Sumitomo Corp., un des géants du négoce international, annonce des pertes colossales sur le marché du cuivre. Les spéculations hasardeuses, pendant une dizaine d'années, de son courtier vedette Yasuo Hamanaka a fait perdre à la prestigieuse maison de commerce 2,6 milliards de dollars. Hamanaka est condamné à huit ans de prison pour escroquerie et falsification de documents.
- ALLFIRST: en février 2002, la première banque irlandaise, l'Allied Irish Bank, révèle qu'un courtier travaillant dans une de ses filiales américaines Allfirst a dissimulé 691 millions de dollars de pertes sur des opérations de change. John Rusnak reconnaît s'être engagé dans une série d'opérations fictives dans le but de couvrir des pertes subies au milieu des années 90. Il est condamné à sept ans de prison et à rembourser les pertes qu'il a occasionnées au groupe bancaire.
- CAISSE D'EPARGNE: en octobre 2008, un trader de la Caisse d'épargne, soupçonné d'être à l'origine d'une perte de 751 millions d'euros subie par la banque française, est mis en examen pour "abus de confiance". Boris Picano-Nacci est soupçonné d'avoir outrepassé son mandat en prenant des positions hors normes sur les marchés entre le 15 septembre et la mi-octobre.
- SOCIETE GENERALE: en janvier 2008, la banque française découvre des transactions hors-normes effectuées par un de ses traders, Jérôme Kerviel. Pour éviter d'être mise en faillite, la SG liquide les positions gigantesques prises par le trader. L'affaire coûtera à la banque près de 5 milliards d'euros. Reconnu seul responsable, Kerviel est condamné à trois ans de prison ferme et à payer à la banque l'équivalent de la somme perdue.
Outre ces scandales dus aux initiatives sans contrôle de traders, le monde de la finance a été secoué fin 2008 par l'une des plus gigantesques escroqueries de tous les temps, l'affaire Bernard Madoff. Le célèbre gestionnaire de fonds de Wall Street a été condamné en juin 2009 à 150 ans de prison, pour avoir monté une fraude pyramidale portant sur quelque 50 milliards de dollars.