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La Suisse appelée à mieux surveiller ses banques

Johann Schneider-Ammann et le secrétaire général de l'OCDE Angel Gurria. [Lukas Lehmann]
Johann Schneider-Ammann et le secrétaire général de l'OCDE Angel Gurria. - [Lukas Lehmann]
La Suisse devrait encore mieux surveiller ses deux grandes banques, l'UBS et le Crédit Suisse, qui sont déjà plus encadrées depuis septembre 2011, estime l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), dans une étude publiée mardi.

En septembre dernier, le Parlement a pris une série de mesures devant entrer en vigueur en 2012, afin d'empêcher que l'éventuelle faillite de ces grandes banques n'ait de lourdes conséquences pour le pays (lire aussi: Loi sur les banques).

Parmi ces mesures, la Suisse leur impose un ratio de fonds propres "durs" (capital et bénéfices mis en réserve rapportés aux prêts accordés) de 19%, au lieu de 8% actuellement ainsi qu'un ratio de levier financier de 5%. Ce dernier représente le rapport entre les fonds propres de la banque et l'ensemble de ses actifs.

"Progrès substantiels"

Si l'OCDE reconnaît qu'il y a eu des progrès "substantiels" au niveau législatif pour limiter les risques liés au secteur financier, l'organisation appelle à des règles encore plus strictes. "Il faudrait appliquer un ratio de levier plus strict, supérieur au taux prévu d'environ 5%", plaide notamment l'OCDE.

Les grandes banques seront soumises à des règles plus strictes pour éviter qu'elles n'entraînent toute l'économie dans une faillite. [ALESSANDRO DELLA BELLA]
Les grandes banques seront soumises à des règles plus strictes pour éviter qu'elles n'entraînent toute l'économie dans une faillite. [ALESSANDRO DELLA BELLA]

Bien que les banques suisses soient peu exposées au problème de la dette dans la zone euro, la "Suisse pourrait être touchée par les turbulences financières internationales, à travers son secteur bancaire", a déclaré le Secrétaire-général de l'OCDE Angel Gurria, lors d'une conférence de presse à Berne pour présenter ce rapport.

De son côté, Johann Schneider-Ammann a déclaré que la nouvelle législation bancaire était un "compromis acceptable" par les parlementaires, et que la calendrier de la réforme avait été fixé. "L'important est que nous soyons arrivés à une décision raisonnable, nous devons la mettre en oeuvre, et ce sera fait au plus tard en 2019", a ajouté le ministre de l'économie,

"D'ici là, c'est dans l'intérêt des deux grandes banques concernées de faire en sorte qu'elles assurent leur stabilité, si c'est fait plus tôt et de façon plus ambitieuse", personne ne viendra le leur reprocher, a ajouté le ministre suisse.

Taux plancher bien accueilli

L'OCDE juge par ailleurs appropriée la décision de la Banque nationale suisse de fixer un taux plancher de 1,20 franc pour un euro. Elle considère l'intervention de la BNS conforme à sa mission d'assurer la stabilité des prix, vu la rapidité et l'ampleur de l'appréciation de la devise helvétique (lire aussi: Franc fort). D'autres pays ont également pris des mesures unilatérales dans le domaine des taux de change, note Angel Gurria. Reste que, selon l'OCDE, la généralisation de telles pratiques pourrait avoir des retombées défavorables sur les échanges et sur l'affection internationale des capitaux.

Parité entre le franc suisse (CHF) et l'Euro (€) [RTS - CHRISTIN Philippe]
Parité entre le franc suisse (CHF) et l'Euro (€) [RTS - CHRISTIN Philippe]

L'OCDE invite également la Suisse à revoir sa fiscalité. Elle plaide pour la diminution de l'imposition des personnes physiques et le relèvement de celle frappant les biens et les services. A ses yeux, l'élargissement de l'assiette de la TVA et la hausse du taux normal de TVA consolideraient la croissance et limiteraient les distorsions.

Risque de bulle immobilière

Au-delà de son appréciation globalement favorable de l'économie helvétique, l'OCDE, conformément à son habitude, a émis un certain nombre de recommandations. Le rapport préconise ainsi la poursuite d'une politique monétaire généreuse, compte tenu de la faiblesse des tensions inflationnistes.

L'OCDE fait remarquer cependant les signes avant-coureurs d'une possible bulle immobilière. Selon l'organisation, une législation macroprudentielle plus stricte s'avère nécessaire afin de contenir l'expansion du crédit hypothécaire que peut induire la faiblesse actuel des taux d'intérêt (lire aussi: Immobilier).

agences/cab

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L'"exception" économique suisse

Les perspectives économiques s'annoncent incertaines pour la Suisse, en raison de la crise de la dette en zone euro, a relevé mardi devant la presse à Berne le secrétaire général de l'OCDE Angel Gurria lors de la présentation du dernier rapport de l'organisation consacrée à la Suisse en présence du ministre de l'économie Johann Schneider-Ammann.

"La Suisse pâtira probablement de la décélération de l'activité de ses partenaires commerciaux, notamment européens, ainsi que de la forte appréciation du franc suisse", estime-t-il.

"Les indicateurs augurent une période de stagnation économique sur le court-terme, en particulier dans le domaine manufacturier", compte tenu du ralentissement de l'activité observé chez les grands partenaires de la Suisse, comme l'Allemagne, et aussi de la hausse du franc suisse.

Pour 2012, l'OCDE s'attend à une croissance "affaiblie" en Suisse, et à un "redémarrage du chômage". Les experts de la Confédération prévoient une croissance faible, voire négative pour le début de 2012, avant de s'établir autour de 0,5% pour l'ensemble de l'année, à comparer avec 0,8% en 2011.

"La stabilité économique de la Suisse s'est fait remarquer, dans un contexte d'instabilité économique et financière dans le reste du monde", a encore ajouté Angel Gurria, qui explique la rapide sortie de crise du pays par ses règles budgétaires strictes et son marché du travail.

La Suisse, où le taux de chômage des jeunes n'a été que de 2,5% l'an dernier, est une "exception" par rapport aux autres pays de l'OCDE, où ce chiffre est proche de 20%, voire de 30% et 40% dans certains cas, a indiqué Angel Gurria.