L'Espagne était encore fortement bousculée mardi sur les marchés, qui continuent de douter de sa capacité à assumer seule ses engagements financiers. Madrid doit voler au secours de ses banques et de ses régions, en pleine récession.
Les investisseurs n'accordent pas un jour de répit au pays, qui voit s'accumuler les mauvaises nouvelles: au menu de mardi, l'annonce par la banque centrale que l'économie, entrée en récession au premier trimestre avec un recul de son PIB de 0,3%, poursuivra son repli au deuxième, confirmant la tendance déjà avancée par le gouvernement.
Autre déconvenue du jour: selon des données provisoires, les ventes de détail en Espagne ont plongé de 9,8% au mois d'avril, la pire chute mensuelle depuis 2003, ce qui confirme la faiblesse de l'économie.
Plusieurs fronts
Dans ce contexte morose, les investisseurs continuent de fuir tant les entreprises espagnoles, avec une Bourse qui a chuté de 2,34%, que la dette publique du pays, avec une prime de risque (surcoût que doit payer l'Espagne pour emprunter à dix ans, par rapport à l'Allemagne, référence du marché) qui a encore battu des records mardi matin, à 515,5 points.
Si le marché est si méfiant, c'est que, malgré la récession, le gouvernement doit actuellement agir sur plusieurs fronts pour venir en aide à son secteur bancaire et à ses régions, tous deux fragilisés après avoir trop profité de la bulle immobilière, qui a éclaté en 2008.
Les banques restent la source principale de tracas, car l'Espagne va devoir mener le sauvetage public le plus cher de son histoire, celui de Bankia, troisième banque du pays par les actifs. Pour se renflouer, celle-ci a besoin de 23,5 milliards d'euros, dont 19 restent encore à trouver (lire La maison-mère de Bankia reconnaît des pertes cent fois plus élevées que prévu).
Banques en quête de solutions
Une porte-parole du ministère de l'Economie a confirmé mardi que "la priorité est d'aller sur le marché", Madrid étant donc disposé à lancer une émission obligataire, malgré la tension actuelle, pour obtenir ces fonds. De quoi faire grimper la dette publique espagnole bien au-delà des 79,8% du PIB visés par le gouvernement à fin 2012.
Alors que l'ensemble du secteur bancaire doit réaliser plus de 80 milliards d'euros de nouvelles provisions en 2012, sous la pression du gouvernement, les banques se mettent en mouvement: Banco Popular, numéro quatre par la capitalisation boursière, a dit négocier la vente d'un "pourcentage majoritaire" de son activité de banque en ligne afin de couvrir en partie ces nouvelles provisions.
Autre stratégie adoptée par les banques: fusionner pour se renforcer. C'est l'option choisie mardi par trois caisses d'épargne, Ibercaja, Liberbank et Caja3. Celles-ci ont annoncé avoir adopté en conseil d'administation leur fusion, qui créera la septième banque du pays par actifs (120 milliards d'euros).
ats/afp/vtom
Régions mauvaises élèves
Le marché s'inquiète aussi pour les 17 régions espagnoles: jouissant d'une grande autonomie, elles sont responsables des trois quarts du dérapage budgétaire de l'Espagne en 2011.
Le pays a ainsi enregistré un déficit de 8,9% du PIB, au lieu des 6% promis, et les régions, qui s'étaient engagées à atteindre 1,3%, ont cumulé un déficit de 2,94%.
Considérées comme les mauvaises élèves de la rigueur budgétaire, elles ont de plus en plus de mal à se financer auprès du marché. Pour leur venir en aide, le gouvernement approuvera vendredi la "mise en commun" des émissions de dette des régions, pour "réduire la pression" sur ces collectivités, a annoncé la porte-parole du ministère de l'Economie.
"Je peux vous confirmer que ce sera (approuvé) vendredi", a-t-elle déclaré, indiquant que les émissions seront "mises en commun, avec la garantie du Trésor", sous forme d'"hispanobons".
Mi-mai, le gouvernement a déjà dû souscrire un prêt de 30 milliards d'euros pour aider les villes et régions à régler les factures de leurs fournisseurs.