L'Espagne, quatrième économie de la zone euro, au coeur de la crise de la dette, a vu jeudi sa note abaissée de trois crans, de A à BBB, par l'agence de notation Fitch. Celle-ci a assorti sa décision d'une perspective négative. Fitch signifie ainsi qu'elle pourrait à nouveau dégrader le pays.
Parmi les raisons évoquées figure le "coût budgétaire d'une restructuration et d'une recapitalisation du secteur bancaire espagnol", estimé entre 60 et 100 milliards d'euros par l'agence, soit un bond de plus du double par rapport à l'estimation précédente de Fitch, 30 milliards d'euros.
Soutien extérieur nécessaire
Plus tôt, jeudi, l'agence Standard & Poor's avait elle aussi asséné un nouveau coup à l'Espagne, estimant que les besoins de ses banques pourraient atteindre entre 50 et 82 milliards d'euros, "ce qui augmenterait en conséquence la probabilité d'un soutien de l'Union européenne au gouvernement espagnol".
Selon Fitch, Madrid n'est pas en mesure de faire face sans aide extérieure. Ainsi, l'agence "s'attend à ce que l'Espagne obtienne un soutien financier extérieur pour recapitaliser ses banques de taille moyenne ainsi que ses caisses d'épargne, ce qui redonnerait confiance dans tout le secteur bancaire".
Récession jusqu'à fin 2013
Dans cette optique, selon les prévisions de Fitch, sur la base d'une facture qui s'élèverait à 60 milliards d'euros, la dette publique brute de l'Espagne pourrait exploser à 95% du Produit intérieur brut en 2015.
En outre, "l'Espagne devrait rester en récession jusqu'à la fin de l'année et en 2013, alors que dans sa précédente prévision Fitch s'attendait à ce que son économie bénéficie d'une reprise modérée en 2013".
Emprunt test
Depuis l'annonce du sauvetage historique de Bankia en mai, la pression s'est brusquement intensifiée autour de l'Espagne et de son secteur bancaire. Dans ce contexte, le pays a dû s'aventurer sur les marchés jeudi. Même si elle réussi à emprunter plus de 2 milliards d'euros, l'Espagne a dû concéder des taux d'intérêt en forte hausse (6,044% sur dix ans).
Cet emprunt faisait figure de test alors que l'Espagne se refuse toujours à demander un plan de sauvetage global, à l'image de ce qui a été fait pour le Portugal, l'Irlande ou la Grèce. Ce qu'elle souhaite, c'est un coup de pouce uniquement pour son secteur bancaire, fragilisé par les actifs immobiliers risqués depuis l'éclatement de la bulle en 2008.
afp/dk
Sauvetage "sur mesure" pour les banques espagnoles?
Madrid milite pour que le fonds de secours européen soit autorisé à recapitaliser directement ses banques. De quoi éloigner la perspective du plan de sauvetage, qui placerait le pays sous tutelle et irait de pair avec des conditions strictes dictées par ses bailleurs de fonds internationaux.
L'Espagne a assuré qu'elle prendrait une décision dans les quinze jours sur un éventuel appel à l'aide internationale, attendant pour ce faire les résultats d'un rapport du FMI sur ses banques, qui doit être publié lundi, et les rapports de deux cabinets d'audit.
"Ce qui est sûr, c'est que les choses sont en train de bouger: il semble que l'Espagne va réussir à obtenir un sauvetage "sur mesure" pour son secteur bancaire problématique", soulignaient jeudi les analystes de Bankinter.
Le journal El Economista affirmait jeudi que Berlin accepterait finalement un sauvetage de 80 milliards d'euros limité aux banques, à travers l'Etat espagnol qui donnerait ensuite cet argent au Frob, le fonds public d'aide au secteur.