La Chine, l'Inde ou le Brésil devront encore patienter avant d'être mieux représentés au Fonds monétaire international (FMI): la réforme renforçant la place des pays émergents au sein de l'institution n'entrera pas en vigueur comme prévu au sommet du FMI à Tokyo, en raison du blocage de fait des Etats-Unis.
En 2010, les pays du G20 s'étaient mis d'accord pour rebattre légèrement les cartes au sein du conseil d'administration du FMI, actuellement dominé par les Européens, en donnant plus de droits de vote aux puissances émergentes.
Cette réforme, qui fera notamment de la Chine le troisième pays le plus puissant du Fonds, devait entrer en vigueur lors de l'assemblée annuelle du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale, qui s'achève dimanche dans la capitale japonaise. Mais il n'en sera rien.
Accord des Etats-Unis nécessaire
La directrice générale du FMI, Christine Lagarde, a dû le reconnaître vendredi: "Nous voyons la ligne d'arrivée, elle est proche et j'exhorte à nouveau les Etats membres à la franchir", a-t-elle déclaré. La patronne du Fonds s'est bien gardée de mettre un pays à l'index et surtout pas son principal actionnaire, les Etats-Unis, qui bloque pourtant l'ensemble du processus après l'avoir encouragé.
Le texte, qui doit être approuvé par 113 pays représentant 85% des droits de vote, ne peut tout simplement pas entrer en vigueur sans l'apport des Etats-Unis, qui totalise 16,7% des voix, et la ratification de son Congrès.
L'enjeu est d'autant plus crucial que cette réforme va de pair avec le triplement des ressources permanentes (quote-parts) du Fonds, à 767 milliards de dollars.
afp/jgal
Un nouveau front s'élève contre ce blocage
Présent à Tokyo, le secrétaire américain au Trésor Timothy Geithner a appelé samedi le FMI à "donner plus de voix" aux émergents sans toutefois donner d'indication sur les intentions de son pays, actuellement en pleine campagne présidentielle.
Réunissant les principales puissances émergentes, le G24 a déploré ce blocage qui met la "réputation" du FMI en jeu et affecte "la crédibilité" de ses décisions.
Si le ministre brésilien des Finances, Guido Mantega, s'est montré le plus cinglant, cette préoccupation n'est toutefois pas l'apanage des pays émergents. "Ce retard entame notre crédibilité et la légitimité des activités du FMI", a déclaré le ministre français des Finances, Pierre Moscovici, dans un discours à Tokyo.
Ce nouveau front pourrait permettre aux émergents de faire avancer leur cause.
La Suisse pose ses exigences
Du point de vue de la Suisse, non seulement le produit intérieur brut doit déterminer l'attribution de quotas et de droits de vote, mais aussi l'ouverture économique d'un Etat, a déclaré la présidente de la Confédération et ministre des Finances Eveline Widmer-Schlumpf. De plus, il faudrait tenir compte des contributions financières déjà effectuées.
Lors de discussions, le Japon et la Suède se seraient également prononcés pour des critères supplémentaires.
La Suisse a obtenu son siège au conseil exécutif du FMI en 1992 en formant un groupe de vote avec l'Azerbaïdjan, le Kazakhstan, le Kirghizstan, la Pologne, la Serbie, le Tadjikistan et le Turkménistan. Ils ont atteint ainsi un poids économique suffisant pour y être admis.
Alors que la conduite politique du groupe doit rester en mains helvétiques après la réforme, il est prévu que la Suisse et la Pologne se partagent la direction de l'exécutif dès 2014.