UNE FRATRIE BIEN ORGANISEE
Le 11 octobre 2012, une opération franco-genevoise menée sous le nom de code "opération Virus" permet le démantèlement d'un vaste réseau de blanchiment d'argent de la drogue.
Il implique une fratrie, des notables parisiens et des trafiquants de cannabis (lire: La justice genevoise démantèle un réseau de blanchiment d'argent).
Au total, 21 personnes sont interpellées, 17 seront mises en examen en France et deux en Suisse. Le volume d'argent blanchi est estimé à 100 millions d'euros (124,86 millions de francs), selon le ministre français de l'Intérieur Manuel Valls.
Les fraudeurs du fisc français utilisés
Trois frères d'origine marocaine ont mis au point une organisation ingénieuse. L'aîné, établi en banlieue parisienne, récolte et centralise l'argent tiré des ventes de cannabis acheminé du Maroc par des véhicules - les "go fast".
Il s'occupe de remettre aux clients parisiens de ses deux frères, respectivement directeur d'une société financière genevoise et cadre chez HSBC Genève, les sommes d'argent qu'ils souhaitent rapatrier au nez et à la barbe du fisc français.
Ceci fait, l'argent est aussitôt décaissé des comptes suisses et versé -via des sociétés écrans- sur des comptes à l'étranger (Londres, Madrid et au Panama) avant d'être réinvesti au Maroc et à Dubaï, dans des affaires appartenant aux trafiquants. (lire: Le réseau de blanchiment franco-suisse avait une mécanique bien rodée)
DES BANQUES GENEVOISES ÉCLABOUSSÉES
Selon une enquête de la police espagnole, un réseau international de blanchiment disposant de contacts en Suisse a utilisé des employés de banque de confiance, en particulier chez HSBC et Lombard Odier, pour mener à bien ses opérations (lire: Une affaire de blanchiment éclabousse des banques genevoises).
Le réseau mis au jour jouait les intermédiaires entre les mafieux chinois désirant discrètement sortir de l'argent gagné en Espagne et des évadés fiscaux espagnols à la recherche d'une méthode pour toucher en liquide leur argent déposé à l'étranger sans éveiller les soupçons des autorités fiscales ibériques.
Des employés complices
Une fois un équilibre trouvé entre le montant que les mafieux voulaient faire sortir d'Espagne et les besoins en cash des évadés fiscaux, le réseau se chargeait de passer des ordres de transferts à des employés de banques privées genevoises.
Ceux-ci effectuaient le versement d'un compte suisse vers un compte hébergé à la Bank of China, et détenu par le père du supposé chef de la mafia chinoise en Espagne.
Voir l'exemple développé dans notre infographie.
LES MULTIPLES REMOUS DE LA "LISTE LAGARDE"
La "liste Lagarde" -du nom de l'ex-ministre française des Finances Christine Lagarde- désigne un document transmis par les autorités françaises aux autorités grecques en 2010. Elle comprend 2063 noms de ressortissants grecs détenant ou ayant détenu un compte dans la filiale suisse de HSBC.
Le gouvernement grec avait dans un premier temps jugé "inutilisable" la liste, partant du fait qu'elle était établie à partir de données volées par Hervé Falciani.
D'ex-ministres effacés de la liste
Depuis le 21 décembre, des procureurs financiers grecs se penchent toutefois sur la "liste Lagarde". Quelques jours plus tard, une source judiciaire révèle sous couvert d'anonymat que des noms ont été effacés (Des proches d'un ancien ministre grec effacés de la "liste Lagarde").
Début janvier, des médias grecs annoncent qu'une procédure judiciaire est ouverte contre un ex-ministre dont la femme aurait des avoirs cachés en Suisse. Deux autres anciens ministres sont aussi sur la sellette (Trois ex-ministres grecs pris dans la tourmente des comptes suisses).
jgal
Finma: "les cas particuliers" pas commentés
L'Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (Finma), invitée à réagir sur les récentes affaires de blanchiment et d'évasion fiscale concernant la Suisse, a rappelé lundi qu'elle ne commentait "aucun cas particulier".
"Notre devoir est de contrôler que les banques suisses ont l'organisation et les processus adéquats pour respecter les règles en matière de blanchiment d'argent", a précisé le porte-parole de la Finma, Tobias Lux. Un contrôle est effectué au moins une fois par an auprès de chaque établissement.
Dans le cas où la Finma a des indications selon lesquelles quelque chose ne se déroulerait pas correctement au sein de la banque, elle "prend contact avec l'institution concernée".
En cas d’infraction à la loi sur le blanchiment d’argent, l'Autorité de surveillance des marchés n’a pas le moyen de distribuer d'amende. Elle a toutefois la possibilité de prendre les mesures nécessaires pour faire rétablir "l’ordre légal".