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Pour Stéphane Garelli, la Suisse devrait se doter d'un fonds souverain

Stéphane Garelli.
Stéphane Garelli, professeur à l'IMD / L'invité de la rédaction / 22 min. / le 11 août 2015
Pour l'économiste Stéphane Garelli, invité du Journal du Matin, la Suisse aurait dû créer un fonds souverain plutôt que d'abandonner le taux plancher, afin de garantir sa capacité à investir.

Questionné sur l'abandon du taux plancher, l'économiste et professeur à l'IMD Stéphane Garelli dit qu'il n'a "pas compris la décision de la BNS".

Pour lui, une réflexion aurait dû être menée avant l'abandon du taux plancher visant à mettre en place une solution alternative, que ce soit un fonds souverain, un fonds public-privé - une idée lancée récemment par Andreas Höfert, chef économiste de l'UBS -, ou un fonds d'infrastructures.

"Dans la situation actuelle, il y a beaucoup trop d'argent sur le marché qui ne sait pas où aller, qui ne sait pas où s'investir", souligne le professeur de l'IMD, "on est dans un système où on est très riche en cash et très pauvre en investissement."

"Le monde veut de la stabilité, pourquoi est-ce que nous ne leur en vendrions pas?"

Les fonds de pension cherchent à investir, rappelle Stéphane Garelli, qui souligne qu'en gardant un taux de 1 franc 20 pour 1 euro, il aurait été possible d'engranger l'argent dans un fonds souverain, à l'image de ce que fait la Norvège.

Et en plus, "nous vendons de la sécurité, nous vendons de la stabilité. Le monde en veut, pourquoi est-ce que nous ne leur en vendrions pas", propose Stéphane Garelli. Il rappelle que le fonds souverain norvégien est le principal actionnaire privé de Nestlé. "Et pourquoi n'est-ce pas nous?", s'interroge-t-il.

Stéphane Garelli explique qu'avec un tel fonds souverain, il serait possible de laisser une partie du fonds disponible en liquide à la BNS, une partie pourrait servir à acheter des actions comme le fait le fonds souverain norvégien. Enfin, la dernière partie pourrait être un fonds d'infrastructure qui permet d'investir dans les infrastructures en Suisse, avec un retour garanti.

De nombreux intérêts sont en jeu dans la BNS

Questionné sur la non-existence d'un fonds souverain en Suisse, Stéphane Garelli met en cause la grande prudence de la Suisse, mais surtout les nombreux intérêts en jeu dans la BNS:"il y a la BNS elle-même, qui veut garder sa marge de manoeuvre, mais aussi des intérêts politiques: une grande partie des dividendes de la BNS part à la Confédération et aux cantons. Se séparer de cet argent n'est jamais bienvenu, surtout que certains cantons ont mis dans leur budget des revenus de la BNS, qu'ils n'auront pas cette année."

Dans tous les cas, pour Stéphane Garelli, il n'est pas possible de continuer à avoir plus de 530 milliards de francs d'argent "parqué à quelque part et qui ne fait rien".

Eric Butticaz

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Des négociations salariales variées selon les secteurs

Au moment où syndicats et patrons entament les négociations salariales pour 2016, Stéphane Garelli rappelle que l'économie suisse est l'une des plus diversifiées au monde et que l'impact du franc fort sur les entreprises varie selon les secteurs.

Une entreprise pharmaceutique active aux Etats-Unis ou réalisant ses ventes en dollars ou l'industrie du luxe qui peut varier ses prix à la hausse seront moins touchées par le franc fort que des PME jurassiennes ou neuchâteloises actives dans le domaine de la mécanique et qui réalisent 90% de leurs ventes à l'exportation. La grande distribution, elle, a pu bénéficier du franc fort et a baissé le prix des produits qu'elle importe.

"Dans les négociations salariales que l'on va avoir, il y aura des impacts très différents selon le type d'entreprises", explique Stéphane Garelli. "Certaines pourront se permettre d'être plus flexibles, comme la grande distribution, alors que d'autres devront faire beaucoup plus attention, comme les PME exportant vers la zone euro."

Travail.Suisse à l'offensive

Travail.Suisse réclame des augmentations salariales comprises entre 0,5% et 1,5% l'an prochain. Des hausses de salaires sont tout à fait possibles malgré l'appréciation du franc, estime l'association faîtière indépendante des travailleurs.

Pour les entreprises dont l'existence est menacée, des solutions de partenariat social sont proposées pour protéger les emplois. Il est possible de renoncer à une augmentation salariale dans ces situations d'exception, estime Travail.Suisse.