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"La crainte d'une mainmise chinoise en Europe n'est pas légitime"

Dominique Jolly, spécialiste des échanges commerciaux avec la Chine. [Youtube - Pearson]
L'invité de la rédaction - Dominique Jolly / Le Journal du matin / 20 min. / le 15 juin 2016
Chaque opération chinoise en Europe suscite la méfiance. Des craintes infondées, selon Dominique Jolly, spécialiste des échanges commerciaux avec la Chine, qui rappelle que 300 entreprises suisses sont installées en Chine.

L'Europe concentre 60% des investissements chinois hors de ses frontières, contre 25% aux Etats-Unis et 15% en Afrique, Asie et Amérique du Sud. Un intérêt qui suscite la crainte d'une mainmise chinoise sur la technologie européenne, à l'image du rachat du suisse Syngenta par le groupe ChemChina ou de la visite de la chancelière allemande Angela Merkel, en Chine depuis lundi. Durant son séjour, elle s'est employée à empêcher la reprise du fabricant de robots Kuka, une institution en Allemagne.

Jeudi dernier, c'est le ministre allemand de l'Economie, Sigmar Gabriel, qui appelait l'Union européenne à ériger des barrières aux "investissements de prédateurs non européens" dans des industries stratégiques.

>> écouter sur ce sujet: "Les investissements chinois suscitent l'inquiétude en Allemagne" :

La chancelière Angela Merkel a effectué une visite de plusieurs jours en Chine. [AP/Keystone - How Hwee Young]AP/Keystone - How Hwee Young
Les investissements chinois suscitent l’inquiétude en Allemagne / Le Journal du matin / 2 min. / le 15 juin 2016

Des investissements "rassurants"

"Ces craintes ne sont pas légitimes", rétorque l'invité du Journal du Matin Dominique Jolly, professeur à la Webster Université de Genève et auteur de "Chine, un colosse aux pieds d'argile".

Pour lui, ces entreprises chinoises qui investissent à l'étranger montrent qu'elles s'insèrent dans un tissu économique mondial, ce qui est plutôt un signal positif. "C'est même rassurant de voir des partenaires investir chez nous. Cela signifie qu'ils croient en nous".

Nous sommes dans une logique de normalisation de l'économie chinoise.

Dominique Jolly, professeur à la Webster Université de Genève.

Citant l'exemple du rachat de Syngenta pour 43 milliards de francs, toujours en attente de validation par les Etats-Unis, le professeur à la Webster University met plutôt en avant l'opportunité pour cette société d'accéder au marché chinois. "Le but est d'aider l'agriculture chinoise à se développer, afin de nourrir les 20% de l'humanité avec seulement 7% des terres arables."

La Suisse emploie 55'000 Chinois

Quant au risque de devenir économiquement tributaire de la Chine, Dominique Jolly soutient qu'avec quelque 300 entreprises suisses installées en Chine et employant 55'000 Chinois, la Suisse est déjà dépendante de Pékin, au même titre que tous les pays qui ont investis en Chine.

Si la croissance chinoise continue de ralentir, il y aurait un risque, concède le professeur à la Webster University. "Mais est-ce qu'il existe une économie sans risque?", interroge-t-il.

Le spécialiste rappelle toutefois que la croissance chinoise flirte encore avec les 7% (contre 2% en Suisse), et que le pays possède l'équivalent 3200 milliards de francs de réserve de change. "Leurs investissements vont se poursuivre et l'idée du président Xi Jinping était de passer bien au-delà des 120 milliards investis chaque année en dehors de Chine."

fme

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