L'exécutif européen, gardien de la concurrence dans l'UE, punit ainsi le géant américain Apple pour avoir bénéficié d'accords fiscaux avantageux de la part du gouvernement irlandais.
"Cette pratique est illégale... car elle a permis à Apple de payer nettement moins d'impôts que les autres sociétés" sur "pratiquement l'intégralité des bénéfices générés" par ses ventes dans l'UE, indique la Commission européenne.
Les avantages accordés ont été tels que l'entreprise s'est même vu "appliquer un taux d'imposition effectif sur les sociétés de 1% sur ses bénéfices européens en 2003, taux qui a diminué jusqu'à 0,005% en 2014", a déclaré la commissaire européenne à la Concurrence, Margrethe Vestager, lors de la conférence de presse.
L'Irlande et Apple contestent
"Je suis en profond désaccord avec la décision de la Commission", a immédiatement déclaré le ministre des Finances irlandais, Michael Noonan, qui a annoncé vouloir faire appel. Apple entend faire de même.
L'exécutif européen avait accusé l'Irlande en 2014 de contourner le droit fiscal international en laissant le fabricant de l'iPhone domicilier sur son sol des dizaines de milliards de dollars imposables en échange d'un maintien de l'emploi à son centre de Cork, où Apple est basé depuis 1980. La firme emploie près de 5000 personnes dans le pays.
Une facture record à relativiser
Le montant réclamé à Apple est toutefois à relativiser vu les quelque 570 milliards de dollars de capitalisation boursière du groupe, première capitalisation mondiale, et le chiffre d'affaires de 234 milliards enregistré sur son dernier exercice clos fin septembre 2015.
En outre, "Apple a près de 215 milliards de dollars de liquidités disponibles à l'étranger, cette facture fiscale record ne fera qu'un petit accroc dans le matelas de liquidités de l'entreprise", résume la société de recherche Morningstar.
A la Bourse de New York, son action a d'ailleurs clôturé mardi en baisse de seulement 0,77% à 106 dollars.
agences/cab
Nombreuses entreprises visées
C'est la quatrième fois en moins d'un an que la Commissaire danoise Vestager punit des multinationales qui ont passé des accords fiscaux avantageux avec certains pays européens.
En octobre 2015, la Commission européenne avait exigé de l'américain Starbucks et de l'italien Fiat le remboursement des aides reçues "illégalement" par les Pays-Bas et le Luxembourg. Ces deux pays ont fait appel de la décision.
En janvier, elle s'était attaquée à au moins 35 multinationales, notamment le brasseur belgo-brésilien AB InBev, qui ont bénéficié d'avantages en Belgique.
Tensions aves les Etats-Unis
Le département du Trésor américain a dénoncé mardi la décision de la Commission européenne. "Les actions de la Commission pourraient menacer de saper les investissements étrangers, le climat des affaires en Europe et l'important esprit de partenariat entre les Etats-Unis et l'Union européenne", a affirmé un porte-parole.
Mercredi dernier, le Trésor américain avait déjà haussé le ton dans la dispute qui l'oppose à la Commission européenne sur le traitement fiscal des multinationales américaines qui, outre Apple, concerne aussi Starbucks, Fiat-Chrysler et Amazon.
Dans un "Livre blanc" de 26 pages transmis à Bruxelles, le Trésor américain dénonçait les enquêtes de la Commission sur le traitement fiscal des aides d'Etat et leur rétroactivité.
"Toutes les entreprises, quelle que soit leur nationalité, si elles génèrent des profits dans un pays européen, devraient payer des impôts en accord avec les lois fiscales nationales", avait rétorqué la Commission.