Dans le centre commercial Coop de Matran, dans la périphérie de Fribourg, le changement est passé presque inaperçu. La pharmacie Benu, présente dans le complexe depuis son ouverture, a récemment dû quitter les lieux, laissant sa place à une autre enseigne, une Coop Vitality, la pharmacie du géant de la distribution.
Pour le directeur général de Benu Suisse, ce scénario pourrait se reproduire ailleurs, mais "le risque est très limité". "Nous avons quelques pharmacies dans des centres commerciaux où il y a une Coop, mais nous en avons relativement peu dans des centres qui appartiennent à Coop", explique Martial Barbier.
Le poids des grands distributeurs
Pourtant, la guerre des pharmacies pourrait bien se jouer dans les centres d'achats, dont les propriétaires sont souvent des investisseurs privés comme les caisses de pension. C'est en tout cas l'avis de Christian Rouvinez, vice-président de Pharmasuisse et pharmacien indépendant. Et dans ce petit jeu, Migros et Coop sont bien placés.
Les numéros un et deux du commerce de détail possèdent un important pouvoir de pression. Ils sont presque toujours les plus gros locataires des centres commerciaux et peuvent ainsi dicter leur loi aux propriétaires. Le non-renouvellement du bail de la pharmacie Benu à Matran pourrait être le signe que les hostilités sont ouvertes.
Le marché suisse des pharmacies pèse environ 4 milliards de francs et deux chaînes dominent ce business: Galenica, avec ses quelque 450 pharmacies Amavita ou Sunstore, et Benu, avec ses quelque 100 succursales. Mais Coop a de grandes ambitions. Le distributeur souhaite passer rapidement de 75 à 100 enseignes Coop Vitality, a -t-il indiqué à la RTS.
La stratégie novatrice de Migros
Du côté de Migros, la cohabitation avec les groupes Benu et Galenica se passent bien, mais l'entreprise vient de s'associer avec la pharmacie par correspondance Zur Rose. A Berne, elle teste aussi depuis une année un concept appelé "Shop in the shop". L'idée est d'ouvrir des pharmacies Zur Rose à l'intérieur même des supermarchés, aux côtés des fruits et légumes.
Cette stratégie - qui devrait être élargie à d'autres Migros à Zurich et Bâle d'ici la fin de l'année - risque de poser davantage de problèmes aux chaînes de pharmacie, selon Christian Rouvinez. En effet, dans un même centre commercial, "on pourrait voir une pharmacie traditionnelle et une deuxième mini-pharmacie à l'intérieur de la surface Migros."
A l'avenir, les places risquent donc de devenir de plus en plus chères dans les centres commerciaux. Cette nouvelle escalade dans la guerre des pharmacies devrait déclencher une nouvelle vague de consolidation du secteur, avec des rachats et des disparitions d'acteurs.
Fabrice Gaudiano/dk