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Des journalistes de la Tribune de Genève refusent une augmentation

La résistance vient particulièrement de Genève en raison d'une tradition syndicale bien ancrée. [RTS - Olivier Angehrn]
Des journalistes de la Tribune de Genève refusent une promotion salariale / La Matinale / 2 min. / le 8 juin 2018
Alors qu'il licencie de nombreux collaborateurs du Matin, le groupe Tamedia augmente d'autres journalistes désignés comme experts dans leur domaine. Mais certains ont refusé cette promotion à la Tribune de Genève, a appris la RTS.

Une enveloppe de près d'un million de francs a été débloquée pour augmenter de 500 francs par mois plus de 120 journalistes promus à ce rang d'experts.

"Ne pas se laisser diviser dans la tourmente"

Mais cette manière d'augmenter d'un côté et de licencier de l'autre passe mal. Six collaborateurs de la Tribune de Genève, à la connaissance de la RTS, ont ainsi refusé d'entrer dans ce cercle destiné selon la direction à valoriser et partager leur savoir. Ces résistants ne veulent pas se laisser diviser alors que les temps sont durs pour le journal genevois et pour les collègues du Matin.

Cette résistance vient particulièrement de Genève en raison d'une tradition syndicale bien ancrée. La combativité a toujours été plus marquée à la Tribune de Genève que dans les autres titres romands. "Le geste de nos collègues est franchement noble par les temps qui courent", relève Laurence Bezaguet au nom de la Société des rédacteurs et du personnel de la Tribune de Genève.

Une lettre collective de protestation a été envoyée à la direction de Tamedia à Zurich mais n'a pas vraiment été suivie d'effet. La mesure a aussi suscité des critiques du côté alémanique.

Une mesure pour "les journalistes de premier plan"

Les noms des 121 collaborateurs qui ont accepté leur nomination au sein du cercle des experts ont été publiés cette semaine sur l'intranet de Tamedia, avec un petit mot du président Pietro Supino. Ce dernier estime "important de proposer aux journalistes de premier plan des perspectives à long terme (...) indépendamment d'une carrière hiérarchique".

Mais le malaise est là, et même certains cadres ont dit à la RTS ne pas comprendre une telle dépense alors qu'on annonce la fermeture d'un titre.

L'équivalent de dix postes de travail

Pour la rédaction du Matin, dont la version papier va être abandonnée, c'est un coup de plus sur la tête et la sensation d'être "les pestiférés" du groupe, comme le résume Patricia Alcaraz du syndicat Syndicom. Elle a fait le calcul: les augmentations servies aux experts vont coûter environ un million de francs annuels avec les charges sociales. "Cela représente quand même dix postes de travail", souligne-t-elle. "Donc pourquoi ne met-on pas plutôt les forces pour maintenir un titre historiquement important, qui est aussi une marque importante, plutôt que de créer de la division supplémentaire?"

Le service de presse de Tamedia, de son côté, répète que cette mesure se veut positive et touche l'ensemble du groupe.

Ludovic Rocchi/oang

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"Il faut réfléchir à une aide publique directe pour les médias"

Interrogé dans La Matinale vendredi, Philippe Amez-Droz, chargé de cours à l'Université de Genève, estime que les autorités doivent changer de discours par rapport aux aides directes à la presse. "Il faut une réflexion cantonale pour des opérations coup-de-poing afin de soutenir des titres mis en difficulté du fait de la faillite de Publicitas. Pas pour Ringier ou Tamedia, mais pour les petits titres indépendants".

Le spécialiste de l'économie des médias appelle également les lecteurs à s'abonner aux journaux sans quoi, dit-il, il faudra s'attendre à d'autres disparitions.

>> L'interview complète de Philippe Amez-Droz: