Fondateur et rédacteur en chef de ce nouveau venu sur la scène romande, Serge Michel est un ancien du journal Le Monde, créateur aussi du Bondy blog en banlieue parisienne. La moitié des journaux pour lesquels il a travaillé ont mis la clef sous le paillasson, mais il est aujourd'hui convaincu de l'avenir d'Heidi.news.
"On est dans une nouvelle époque et il faut de nouveaux médias pour de nouvelles époques", explique-t-il dans La Matinale. L'aventure démarre avec des moyens limités, "mais en même temps de grandes ambitions."
On a lancé un produit qui montre qu'avec peu de moyens on peut faire beaucoup.
Et la recette, aux yeux du journaliste, c'est d'y aller petit à petit. "D'abord on a lancé une newsletter il y a à peu près deux semaines, qui fait le tour du monde chaque semaine, qui part chaque jour d'une ville différente (...) On a lancé un produit, surprenant je pense pour les gens, mais qui montre qu'avec peu de moyens on peut faire beaucoup."
La communauté scientifique comme public-cible
La rédaction va maintenant déployer progressivement ce qu'elle appelle des "explorations", autrement dit de grands reportages publiés en épisodes. Elle passera ensuite à la vitesse supérieure avec des flux thématiques - à commencer par la science. "Il y a une communauté scientifique très importante en Suisse romande", souligne Serge Michel, "et on espère qu'on trouvera du public dans cette communauté-là."
En septembre prochain viendra un flux consacré à la santé, puis d'autres flux thématiques tous les six mois pour couvrir petit à petit un spectre beaucoup plus large.
Et si Heidi.news cible prioritairement la recherche et la santé, c'est parce que "ce sont des sujets qui souffrent d'une certaine désaffection de la part des médias généralistes", explique le rédacteur en chef. "Il y a de bonnes émissions et de bons articles sur ces sujets-là, mais on sent qu'il y en a un peu moins qu'avant (...) On sent qu'il y a un petit fossé qui s'installe entre des lecteurs qui sont très compétents chacun dans son domaine et des journaux qui le sont un peu moins parce qu'ils ont dû - pour économiser de l'argent - un petit peu diminuer la couverture de la science ou de la santé."
Il y a beaucoup de gens ici qui viennent d'ailleurs, qui travaillent en relation avec l'ailleurs.
Le nouveau média a pris l'option de ne pas se focaliser sur l'information locale, une recette qui semble pourtant marcher chez d'autres. Car "le local, en Suisse romande, est très global", constate le fondateur du média. "Il y a beaucoup de gens ici qui viennent d'ailleurs, il y a beaucoup de Suisses romands qui sont ailleurs, qui travaillent en relation avec l'ailleurs (...) On est une région extrêmement globalisée, et donc c'était faux pour moi de partir sur un angle purement local. Aussi parce qu'il y a encore des journaux qui font ça bien."
Ne pas avoir d'encrage romand est aussi une façon de dépasser la frontière helvétique. "On va écrire à la fois en français et en anglais, parce que l'on pense que ce sont deux langues qui sont couramment utilisées ici. Mais on veut un ancrage local, on traitera la science avec un savoir-faire local qui est très important. Je pense qu'il faut avoir les pieds posés quelque part pour pouvoir regarder plus loin."
Une diversité "qui fait du bien"
Heidi.news fera aussi de l'investigation. "Ce n'est pas parce qu'on parle de la science qu'on ne fait que de saluer les progrès scientifiques. Je pense qu'il y a des sujets d'investigation très importants en sciences et en santé", note Serge Michel. "Et comme on va aller progressivement vers un média qui parle de plus de sujets, l'investigation fait partie de nos ambitions."
"On n'est concurrents de personne. On apporte quelque chose d'assez frais et je pense que la diversité fait du bien", conclut le rédacteur en chef.
Propos recueillis par Thibaut Schaller/oang