"Le matériel iranien montré ici a été récupéré à travers différents lieux au Moyen Orient, du Golfe persique jusqu'aux champs de batailles au Yémen. Il comprend des missiles balistiques, des missiles sol-air, des drones et des petites armes", détaille Rebecca Rebarich, l'une des porte-paroles du Département américain de la Défense.
Elle était le seul contact pour le petit groupe d'une dizaine de journalistes qui a pu se rendre en bus sur la base militaire de Bolling, en face de Washington, de l'autre côté de la rivière Anacostia. La commandante leur a servi de guide durant la visite, limitée à une seule salle: celle où sont entreposées les armes iraniennes. Une "preuve irréfutable", selon Washington, des ventes d’armes par l' Iran au Yémen, en contradiction totale avec les règles internationales.
Ces armes ont permis au président américain Donald Trump de dénoncer l'accord nucléaire iranien: des numéros de séries, des détails de fabrication qui permettent aux Etats-Unis d’affirmer que Téhéran reste un danger pour la communauté internationale. On y voit par exemple des missiles longue portée tirés depuis le Yémen sur l'Arabie saoudite. Et certaines pièces ont été récupérées il y a peu.
L'Arabie saoudite, "un partenaire"
"Nous avons en effet de nouvelles preuves par rapport à ce que nous avons montré la première fois, en décembre 2017. Nous avons notamment pu ajouter un missile balistique supplémentaire. Et nous recevons ces preuves de nos forces armées, mais aussi des forces de coalition via nos partenaires dans la région", souligne Rebecca Rebarich. Par "ses partenaires", la commandante sous-entend l’Arabie Saoudite, qui mène la coalition armée au Yémen.
La grande majorité des arme iraniennes ont été remises aux Etats-Unis directement par l’Arabie Saoudite, même si les relations politiques entre Washington et Riyad se sont détériorées depuis le meurtre du journaliste saoudien Jamal Khashoggi. L'ONU, elle, se montre encore prudente par rapport à ces "preuves irréfutables", et le Sénat américain se méfie désormais de Riyad. Quant à l'Iran, il réfute toutes les accusations.
Nous avons confiance en nos partenaires saoudiens quand ils nous disent où et quand ils ont trouvé ce matériel. Ce sont des faits!
"Nous avons un partenariat militaire très fort avec l’Arabie Saoudite. Et nos relations ont été forgées il y a des dizaines d’années. Nous avons donc confiance en nos partenaires saoudiens quand ils nous disent où et quand ils ont trouvé ce matériel. Ce sont des faits!", assure Rebecca Rebarich. Même après le meurtre de Khashoggi? "Nos relations militaires restent très fortes!", assure-t-elle.
La collection d’armes iraniennes devrait continuer de s’étoffer au fil des mois, précise encore le Département américain de la Défense.
Raphaël Grand/jvia
Préserver les relations avec Riyad
Les Etats-Unis "ne veulent pas mettre en danger leur relation avec l’Arabie Saoudite à cause d’un meurtre (celui de Jamal Khashoggi, ndlr), aussi tragique soit-il. Et même si le Sénat a décidé de retirer quelque peu son soutien militaire à l’Arabie Saoudite, je ne pense pas que l’on verra un changement dans les relations entre Washington et Riyad", analyse Naysan Rafati, spécialiste de l'Iran à l'International Crisis Group à Washington, dans l'émission Tout un monde.
Pour lui, une visite de journalistes étrangers sur une base militaire ultra-sécurisée, cela n'a rien d'anodin. "L'administration Trump est en pleine campagne pour mettre ce qu'elle appelle 'une pression maximale' sur l’Iran. Il y a les sanctions, mais aussi ce matériel exposé, qui fait partie d’une campagne plus large pour dépeindre l’Iran comme un Etat voyou", analyse-t-il
Et d'ajouter: "Le matériel que l'on vous a montré tend à suggérer que l'Iran est un agent déstabilisateur et pousse la communauté internationale à agir, que ce soit les Nations-unies ou les alliés européens. Le Secrétaire générale de l’ONU se penche lui aussi sur ce matériel iranien.. et essaie encore d’établir d’où ces armes viennent et d’où elles ont été transportées".