"On a trouvé deux ADN identifiables sur les scellés: un ADN
féminin sur ou sous le timbre d'une lettre du corbeau et un ADN
masculin sur cette même lettre du corbeau", a dit à l'AFP le
procureur général de Dijon (est), Jean-Marie Beney.
Cette découverte promet un nouveau rebondissement dans l'enquête,
rouverte en décembre 2008 par la cour d'appel de Dijon, sur cette
affaire jamais élucidée qui n'a cessé de passionner la France
depuis le décès de Grégory, 4 ans, retrouvé ligoté dans la rivière
Vologne le 16 octobre 1984.
Lettre du "corbeau"
Ces traces d'ADN ont été retrouvées par les experts sur le
timbre et une lettre envoyée à la famille. Le "corbeau", qui
harcelait la famille, avait adressé cette lettre à Albert Villemin,
le grand-père de Grégory, en juillet 1985, soit neuf mois après la
découverte du corps du garçonnet.
Ces nouvelles expertises ont été réalisées à la demande des
parents du petit garçon, Christine et Jean-Marie Villemin qui,
selon leurs avocats, sont toujours à la recherche de la vérité, 25
ans après les faits intervenus dans un petit village de la vallée
froide et encaissée de la Vologne.
La date du courrier sur lequel les traces d'ADN ont été retrouvées
montre qu'il a été reçu par la famille Villemin plusieurs mois
après le décès du cousin de Jean-Marie Villemin (voir
ci-contre). Ce cousin fait encore figure de principal
suspect aux yeux de nombreux connaisseurs de l'affaire.
"Avancée réelle"
Pour le procureur général, les nouvelles expertises constituent
néanmoins "une avancée réelle dans l'enquête". En juin 2000, la
justice, déjà saisie par les parents de Grégory, avait une première
fois fait expertiser un demi-timbre apposé sur une enveloppe
expédiée par le "corbeau". Mais l'ADN était alors "inexploitable",
selon les experts.
Désormais, une comparaison est possible, si des prélèvements sur
les différents protagonistes de l'affaire sont demandés par un
magistrat. Sollicité par la famille du petit Grégory, l'Institut de
police scientifique (IPS) de l'Université de Lausanne avait réalisé
une étude sur les progrès en matière d'analyses génétiques. Il a
conclu l'année dernière que les moyens actuels pourraient permettre
de trouver des indices sur l'assassinat du garçonnet.
Pas l'ADN des parents
Aucune trace d'ADN de Christine et Jean-Marie Villemin n'a été
retrouvée sur l'ensemble des pièces analysées lors d'une nouvelle
expertise ordonnée par la justice française, a déclaré jeudi le
procureur de Dijon. "Les profils génétiques" des parents de Grégory
"ont été établis et (...) il n'y a aucune trace sur aucun des
supports analysés", a assuré le procureur Jean-Marie Beney, au
cours d'une conférence de presse en présentant les résultats de ces
analyses.
En outre, selon Jean-Marie Beney, "sur certaines cordelettes, ont
été mis en évidence un mélange d'ADN excluant Christine et
Jean-Marie (Villemin)" mais "dont les résultats ne permettent pas
de déduire un profil contrairement" au timbre et à la lettre.
Cependant, pour deux des trois cordelettes, ils permettront "le cas
échéant d'effectuer des comparaisons ultérieures".
Le procureur général de Dijon a ajouté que "sur l'ensemble des
autres supports, les recherches n'ont pas permis de mettre en
évidence ni de profils ni de traces exploitables ou suffisamment
exploitables".
agences/cab
Bref rappel de l'affaire
Le 16 octobre 1984, le corps du petit garçon âgé de 4 ans est retrouvé, ligoté, dans la rivière Vologne (est de la France).
C'est le point de départ de "l'affaire Villemin", véritable feuilleton judiciaire doublé d'un déferlement médiatique que la France suivra avec passion durant des années.
Mais la justice n'a jamais réussi à identifier le meurtrier, ni le mystérieux "corbeau" qui a envoyé des lettres menaçantes à Christine et Jean-Marie Villemin, les parents du petit garçon, un jeune couple apparemment sans histoire.
Au lendemain du meurtre, les parents du petit garçon avaient reçu une lettre anonyme: "Ton fils est mort. Je me suis vengé".
Un mois plus tard, le cousin de Jean-Marie Villemin, Bernard Laroche, avait été inculpé pour l'assassinat et incarcéré. Relâché en février 1985, tout en restant inculpé, il était abattu d'un coup de carabine, peu après, par Jean-Marie Villemin.
En juillet 1985, c'était au tour de la mère de l'enfant, Christine Villemin, d'être inculpée de l'assassinat de son fils par le juge Lambert.
Ecrouée puis remise en liberté sous contrôle judiciaire quelques jours plus tard, elle a bénéficié d'un non-lieu en février 1993.
Depuis, Christine et Jean-Marie Villemin se sont établis en région parisienne. Ils ont eu trois autres enfants.