Devenu patriarche de Moscou et de toutes les Russies en 1990, un
an avant la chute de l'URSS, "il a(vait) hérité d'une Eglise
affaiblie par des décennies de répression", a rappelé son
successeur provisoire, le métropolite Kirill de Smolensk et
Kaliningrad.
"Aujourd'hui, il nous laisse une autre Eglise. Ce n'est plus une
Eglise faible, impuissante (...) Des millions de gens ont compris
que sans vérité divine, il n'y a pas de vérité humaine", a-t-il
ajouté au coeur de la somptueuse cathédrale du Christ-Sauveur, près
du Kremlin.
Medvedev et Poutine présents
Symbole de cette puissance retrouvée, le président Dmitri
Medvedev et le Premier ministre Vladimir Poutine ont assisté aux
funérailles, portant un cierge et se signant à plusieurs reprises.
A la fin de la cérémonie, ils se sont penchés tour à tour au-dessus
du cercueil ouvert, ont embrassé la mitre du défunt et se sont
inclinés, suivis de leurs épouses et d'autres personnalités.
Les présidents de Serbie, Boris Tadic, et des ex-républiques
soviétiques du Bélarus, Alexandre Loukachenko, de Moldavie Vladimir
Voronine, d'Arménie, Serge Sarkissian, ainsi que l'ancien Premier
ministre pro-russe d'Ukraine, Viktor Ianoukovitch, étaient
également présents.
Longue cérémonie
Pendant six heures, chants et prières ont empli l'immense
cathédrale au dôme doré, reconstruite à l'identique dans les années
1990 après avoir été dynamitée par Staline, qui avait fait ériger
une piscine à la place. Le cercueil, ouvert selon la tradition
orthodoxe, reposait sur un vaste catafalque entouré de roses
blanches. Le visage d'Alexis II était couvert d'un voile blanc. Un
tissu vert, couleur du patriarche, était posé sur le
cercueil.
Le métropolite Kirill a officié en présence de 200 évêques et
prêtres portant des bures blanches, incrustées de fils d'or et de
perles, symbole du passage à la vie éternelle. Dans la foule, le
banc et l'arrière banc de l'Etat et nombre de personnalités, telles
le cinéaste Nikita Mikhalkov et la grande-duchesse Maria
Vladimirovna, descendante du dernier tsar de Russie Nicolas II,
étaient présents.
Le patriarche oecuménique de Constantinople, Bartholomée Ier,
ainsi que des représentants des autres Eglises orthodoxes et du
Vatican, les cardinaux français Roger Etchegaray et allemand Walter
Kasper, assistaient à l'office, de même que l'évêque de Londres
Richard Chartres et l'ayatollah iranien Mohamad Ali Taskhiri parmi
les personnalités musulmanes.
Sous un ciel noir et une pluie incessante, le cercueil a ensuite
pris le chemin de la cathédrale de l'Epiphanie à Moscou, où le
patriarche sera inhumé, conformément à sa volonté.
afp/hof
Nombreux hommages
Plus de 80'000 fidèles se sont pressés depuis samedi dans la cathédrale du Christ-Sauveur pour rendre un dernier hommage à la dépouille d'Alexis II, a indiqué le service de presse de la police cité par l'agence Itar-Tass.
Dmitri Medvedev a demandé la suppression de tous les programmes de divertissement mardi, notamment à la télévision, signe du quasi-statut de religion d'Etat retrouvé par l'orthodoxie dans la Russie post-soviétique.
Le métropolite Kirill gère l'héritage
Alexis II, décédé vendredi à l'âge de 79 ans, laisse derrière lui une Eglise orthodoxe en plein renouveau: les monastères et églises se multiplient et les Russes affichent de nouveau leur foi.
La religion est redevenue un ciment de l'identité nationale après le vide laissé par l'effondrement de l'idéologie soviétique et l'Eglise s'est fortement rapprochée du Kremlin sous les présidences de Boris Eltsine (1990-1999) et Vladimir Poutine (2000-2008).
Un synode a nommé samedi comme patriarche intérimaire ou "gardien du trône" le métropolite Kirill, 62 ans. Un autre synode décidera mercredi de la date de l'élection du prochain patriarche, qui doit intervenir dans les six mois suivant le décès d'Alexis II.
Figurant parmi les favoris pour succéder au patriarche, le métropolite Kirill est le puissant chef du département des relations extérieures, responsable des liens avec les autres Eglises.
En coulisses, le Kremlin pourrait jouer un rôle clé, le président russe, Dmitri Medvedev, ayant l'intention de pousser à une amélioration des relations empoisonnées entre l'Eglise orthodoxe et l'Eglise catholique romaine, selon l'expert Sergueï Filatov, de l'Académie russe des sciences.
Selon certains analystes, le successeur par intérim deviendra probablement le futur patriarche.