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Tortionnaires libérés en Argentine: revirement

Le tortionnaire Alfredo Astiz restera en prison.
Le tortionnaire Alfredo Astiz restera en prison.
La justice argentine a suspendu vendredi l'ordre de libération de l'ex-capitaine de la marine Alfredo Astiz, accusé de crimes contre l'humanité commis sous la dictature (1976-1983), a annoncé l'agence gouvernementale Télam.

La mesure a été adoptée à peine deux heures après l'annonce du
gouvernement argentin de faire appel d'un ordre de la libération
d'Alfredo Astiz devant la Cour suprême de justice afin que
l'ex-capitaine de la marine demeure en prison jusqu'à l'heure de
son procès.

Des milliers de disparus

La Cour de Cassation jeudi avait ordonné la libération d'Astiz,
dit "l'ange blond de la mort" ainsi que celle d'autres officiers,
accusés de crimes contre l'humanité, arguant du fait qu'ils avaient
passé deux ans en prison sans condamnation.



Alfredo Astiz, surnommé "l'ange blond de la mort", est poursuivi
pour l'enlèvement et la disparition en 1977 de deux religieuses
françaises Léonie Duquet et Alice Domon et de dizaines de
dissidents politiques.



Autre officier de la marine à bénéficier de cette décision, Jorge
Acosta, dit "le Tigre", redoutable geôlier et chef des groupes
chargés de l'arrestation des militants d'opposition à la dictature
au sein de l'ESMA, un des plus importants centres de détention, de
torture et d'extermination de prisonniers politiques.



Sur 5000 opposants qui y ont été conduits, à peine une centaine
aura survécu. Alfredo Astiz, 56 ans, et les autres militaires, sont
également poursuivis pour la "disparition" d'Azucena Villaflor,
fondatrice de l'association des Mères de la Place de Mai, qui
réclame justice au nom de leurs enfants "disparus" durant la
dictature. Les religieuses françaises avaient disparu en même temps
qu'Azucena Villaflor avec qui elles travaillaient. Alfredo Astiz
est incarcéré dans une prison depuis 2007 après avoir passé
plusieurs années en résidence surveillée dans une caserne.

"Vols de la mort"

Il a déjà été condamné en France par contumace à la prison à vie
pour le meurtre des religieuses françaises. Mais l'Argentine a
refusé son extradition à plusieurs reprises. Jorge Acosta fait
partie de cinq anciens membres de l'armée argentine condamnés en
Italie pour les meurtres de trois Italiens pendant la
dictature.



Les restes de Léonie Duquet ont été identifiés en août 2005 et les
experts légistes ont pu établir qu'elle avait été victime des "vols
de la mort", méthode d'exécution consistant à jeter les opposants à
la mer depuis un avion ou un hélicoptère. Alice Domon reste une
"disparue" comme 30'000 autres victimes de la dictature, selon le
décompte des organisations de défense des droits de l'homme. Seize
Français ont disparu pendant la dictature militaire
argentine.



agences/lan

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Une honte pour l'Argentine

"Cette mesure fait honte à l'Argentine et à l'humanité. C'est une perversité du système, il devrait être jugé", a estimé la présidente argentine Cristina Kirchner.

"La décision est extrêmement grave" estime le directeur à Buenos Aires du centre pour les études légales et sociales. "Elle reflète l'incapacité et l'inefficacité du système judiciaire argentin à juger des crimes contre l'humanité dans un délai raisonnable".

"Sa remise en liberté, avant même que son procès en Argentine ne se tienne, serait choquante. Nous attendons avec impatience que le procès qui est ouvert contre lui par la justice argentine aille à son terme", a déclaré vendredi le ministère français des Affaires
étrangères.