Le vote des députés sur ce projet de loi, voulu par le président
Nicolas Sarkozy, doit encore être confirmé mercredi au Sénat, la
chambre haute du Parlement.
C'est à l'automne que les auteurs de téléchargement illégal de
musique et de films, dont les Français sont de grands adeptes,
devraient recevoir les premiers courriels d'avertissement, envoyés
par une nouvelle Haute autorité pour la diffusion des oeuvres et la
protection des droits de l'internet (Hadopi) créée par cette
réforme. En cas de récidive, les premières suspensions de l'accès à
l'internet devraient être prononcées début 2010, les "pirates"
devant alors continuer à payer leur abonnement, ce qui équivaut à
une "double peine" pour l'opposition.
Couper l'accès au web, une première en Europe
La France devrait ainsi devenir le premier pays européen à faire
appliquer par la loi des coupures d'accès à l'internet. Il y a un
mois, à la surprise générale, le texte avait subi un revers à
l'Assemblée nationale. Les députés socialistes l'avaient rejeté, à
main levée, par 21 voix contre 15, après s'être assurés d'une
supériorité numérique dans l'hémicycle où était absente la grande
majorité des députés (577 au total).
Nicolas Sarkozy avait immédiatement dénoncé "les manoeuvres
dérisoires" de l'opposition, et réaffirmé son intention de "voir
appliquée au plus vite la loi création et internet", issue d'accord
signés à l'Elysée en novembre 2007 entre acteurs du secteur.
L'UMP divisée
Le texte de loi est à classer parmi les débats de société les
plus animés depuis l'élection de Nicolas Sarkozy, autour de la
question des droits d'auteurs et de l'accès à la culture sur
l'internet. Ses détracteurs, y compris au sein du parti majoritaire
de Nicolas Sarkozy l'UMP (Union pour un mouvement populaire), y
voient un dispositif déjà obsolète, qui porte atteinte aux libertés
et à la vie privée et n'apportera aucun revenu supplémentaire aux
artistes.
"Cette loi est le symptôme d'un aveuglement, d'une stupidité
archaïque face à l'angoissante vitesse du changement qui s'est
opéré depuis quelques dizaines d'années", écrivait mardi le
cinéaste Eric Rochant dans le quotidien Le Monde. "Aller contre
internet de la sorte, avec le bâton, le casque et les ciseaux,
c'est aller contre la jeunesse, l'avenir, l'enthousiasmante
créativité qu'internet a libérée", poursuivait-il. Mais la position
du cinéaste n'est pas emblématique de l'entier de la profession: la
question divise aussi le monde artistique (lire
ci-contre).
Par ailleurs, le Parlement européen n'a pas rendu la tâche facile
à l'UMP en s'opposant, le 6 mai, à toute coupure de l'internet sans
décision de justice préalable alors que le projet français prévoit
une sanction prononcée par l'Hadopi.
afp/hof
Les artistes sont divisés
Les artistes, premiers concernés par le piratage de leurs oeuvres, sont divisés.
Si l'actrice Catherine Deneuve demande l'abandon d'un "mécanisme de sanctions à la constitutionnalité douteuse", une quarantaine de cinéastes, dont Bertrand Tavernier, ont plaidé en faveur de cette loi.
Et certains, comme la chanteuse Juliette Gréco ou les comédiens Michel Piccoli et Pierre Arditi, ouvertement de gauche, ont publiquement annoncé qu'ils cessaient de soutenir le Parti socialiste après le premier rejet du texte le 9 avril.
Recours du PS avant l'adoption définitive?
L'un des derniers recours du Parti socialiste contre l'adoption de la loi Hadopi reste la saisine du Conseil constitutionnel, qui contrôle la constitutionnalité des lois, et peut invalider tout ou partie du texte.