C'était dans la nuit du 14 au 15 avril 2014 que les 276 lycéennes avaient été enlevées dans leur école de Chibok par des membres de la secte islamiste. Un mouvement de solidarité mondiale avait ensuite émergé, avec pour slogan "Bring back our girls" ("Ramenez nos filles").
Cinq ans plus tard, une partie de ces filles n'ont pas été retrouvées et certaines se seraient radicalisées auprès de leurs ravisseurs. Une centaine d'autres ont toutefois été libérées en 2016 et 2017, après plus de deux ans de détention.
Etablir un lien de confiance
Ces libérations ont notamment été rendues possibles grâce à la médiation d’un avocat nigérian, Zannah Mustapha. Celui-ci se bat désormais pour reconstruire la paix dans la région avec l'école qu'il a créée dans la ville de Maiduguri, bastion de Boko Haram dans le nord-est du pays, pour accueillir des orphelins du conflit.
"Ces enfants ont vécu des expériences très difficiles, certains ont vu leurs parents se faire tuer. En interagissant avec eux, on établit un lien de confiance", confie Zannah Mustapha samedi au micro du 19h30.
Enfant de bourreaux et de victimes étudient ensemble
Beaucoup de ces élèves sont orphelins après l'insurrection lancée par Boko Haram en 2009 qui a fait régner la terreur dans la région et qui a détruit des familles entières. Mais cette école a la particularité d'accueillir à la fois des enfants dont les parents ont été victimes de Boko Haram et des enfants des combattants.
Pour Zannah Mustapha, cette dimension est déterminante: "Mes enfants biologiques sont dans cette école. Vous ne verrez pas la différence entre les miens et les enfants de Boko Haram. On les éduque comme nos propres enfants. Parce que si dans le futur, ils doivent vivre tous ensemble, ils doivent commencer dès maintenant. Ces enfants seront certainement ceux qui auront à ramener la paix."
"Je veux leur montrer qu'on a un avenir"
Pour les élèves, les valeurs de dialogue et tolérance mises en avant dans l'école permettent de lutter contre l'obscurantisme. Elles leur rendent confiance en l'avenir.
"Ma vie future, je l'imagine fantastique. Je milite pour les droits des enfants et contre les mariages forcés. Et je voudrais continuer et donner une voix à ceux qui n’en ont pas, je veux leur montrer qu'on a un avenir", témoigne Fatima, 15 ans, admise dans l'école au décès de son père.
Zannah Mustapha a appelé sa fondation "L'école des prouesses futures", un choix rempli d'optimisme dans une région où des millions d’enfants sont toujours privés d’éducation.
Tristan Dessert/boi