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L'ONU patine sur la question des violences sexuelles lors des conflits

Vidé de sa substance, le texte de l'ONU contre les violences sexuelles faites aux femmes en temps de guerre crée la controverse.
Vidé de sa substance, le texte de l'ONU contre les violences sexuelles faites aux femmes en temps de guerre crée la controverse. / 19h30 / 2 min. / le 24 avril 2019
Les Nobel de la Paix 2018 Denis Mukwege et Nadia Murad ont réclamé mardi à l'ONU justice pour les victimes de violences sexuelles dans les conflits. Une résolution a été adoptée, mais a été amputée de sa substance par les Etats-Unis, la Russie et la Chine.

"Nous déplorons que des menaces de veto aient été agitées par des membres permanents de ce Conseil pour contester 25 ans d'acquis en faveur des droits des femmes dans des situations de conflits armés", a lancé l'ambassadeur français à l'ONU, François Delattre, après l'adoption du texte par le Conseil de sécurité par 13 voix et 2 abstentions (Russie et Chine).

En recul sur l'avortement et opposés à la Cour pénale internationale, les Etats-Unis ont voté pour la résolution, mais après en avoir fait retirer ses mentions liées aux droits sexuels et reproductifs. La création d'un "mécanisme" facilitant la poursuite en justice des auteurs de violences sexuelles a aussi été rejetée par Washington, Moscou et Pékin.

"Intolérable"

"Nous sommes consternés par le fait qu'un Etat ait exigé le retrait de la référence à la santé sexuelle et reproductive pourtant agréée" dans de précédentes résolutions en 2009 et 2013, a précisé François Delattre en visant les Etats-Unis.

"Il est intolérable et incompréhensible que le Conseil de sécurité soit incapable de reconnaître que les femmes et les filles qui ont subi des violences sexuelles en temps de conflit et qui n'ont évidemment pas choisi d'être enceintes, ont le droit d'avoir le choix d'interrompre leur grossesse", a-t-il insisté.

Triple opposition

Dans son texte d'origine, l'Allemagne voulait créer un groupe de travail formel - idée abandonnée -, pousser à la création d'un organisme international pour aider à faire juger les coupables, et développer la protection des survivants, notamment les femmes violées tombant enceintes.

Les négociations ont été ardues, selon des diplomates. Outre la menace d'un veto américain, Russie et Chine ont été jusqu'à proposer un texte concurrent à celui de l'Allemagne sans aller jusqu'à demander un vote.

En définitive, cette triple opposition américano-russo-chinoise a conduit l'Allemagne à réduire à la "portion congrue" de son texte, selon un diplomate.

ats/gma

>> Ecouter l'interview de Céline Bardet, juriste et spécialiste des questions de crimes de guerre :

Affiche de la campagne "I am not a weapon of war" contre le viol comme arme de guerre [Notaweaponofwar.org - DR]Notaweaponofwar.org - DR
L'ONU adopte une résolution pour combattre le viol utilisé comme arme de guerre: Interview de Céline Bardet / Le 12h30 / 3 min. / le 24 avril 2019

>> La réaction et l'analyse de Manon Schick, directrice d'Amnesty International Suisse :

Manon Schick (Amnesty International) réagit au texte adopté par l'ONU.
Manon Schick (Amnesty International) réagit au texte adopté par l'ONU. / 19h30 / 2 min. / le 24 avril 2019
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