Il y a dix ans apparaissait un virus inconnu, totalement nouveau. Ce qu'on appelle le H1N1, sous-type du virus grippal, contient un mélange de gènes des virus des grippes porcine, humaine et aviaire. Les experts s'alarment. La maladie est très contagieuse. On lui attribue déjà plusieurs décès et l'Organisation mondiale de la santé (OMS) réagit très fort. En juin 2009, sa directrice parle de pandémie. Le monde entier est en alerte. En Suisse aussi.
Les autorités suisses craignent que les hôpitaux soient surchargés et les médecins débordés. Une campagne de vaccination est lancée et le parlement débloque 84 millions pour acheter 13 millions de doses.
Un an plus tard, on fait le bilan. A échelle mondiale, on parle de moins de 20'000 morts - une quinzaine en Suisse - alors qu'une grippe saisonnière peut faire 300'000 victimes en un an. Les États endossent le coût des millions de vaccins inutilisés, plus de 80 millions de francs pour la Suisse seulement.
L'Organisation mondiale de la santé au centre des critiques
L'OMS est alors vivement critiquée. On l'accuse d'avoir surréagi. Pire, on doute de l'indépendance de ses experts. Des experts qui, pour partie, seraient trop proches d'une industrie pharmaceutique très intéressée à la vente de ses vaccins et antibiotiques. L'OMS rejette catégoriquement ces critiques. Mais sa crédibilité est lourdement atteinte et l'organisation devra notamment introduire des mesures supplémentaire de transparence.
"Si on veut une recherche indépendante des grands groupes pharmaceutiques, il faut que les pouvoirs publics investissent, réagit Sylvie Briand, directrice du Département de Gestion des Risques Infectieux à l'OMS. Désormais, nos experts doivent déclarer leurs liens avec l'industrie. Mais, encore aujourd'hui, il reste difficile de séparer le privé du public".
Mais qu'a-t-on réellement appris de cette crise? "Suite à cette pandémie, l'OMS a mis en place des systèmes d'information pour recueillir des données sur les décès dus à la grippe, annonce Sylvie Briand. Ces systèmes n'existaient pas en 2009". Ce manque d'information a empêché l'OMS de connaître la gravité de la maladie en temps réel. "A la fin de la pandémie, nous avions seulement 18'000 morts notifiés à l'OMS, mais en faisant des analyses plus poussées nous arrivons désormais à un chiffre de plus de 400'000 décès."
Katja Schaer/Pascal Wassmer