"Je demeure absolument convaincu que la construction européenne seule nous a permis d’avoir ces décennies de paix que nous avons connues", déclare-t-il. "Il faut toujours regarder l’avenir, la vie !", ajoute l'ancien ministre français.
Dans cet entretien diffusé un mois avant les élections européennes, Robert Badinter s'inquiète de la montée nationaliste dans une Europe "fondée sur la réconciliation et même l'amitié."
Victime d'une rafle sous la direction du nazi Klaus Barbie, le père de Robert Badinter, Simon Badinter, avait été déporté puis assassiné dans le camp de Sobibor. Questionné sur la notion de pardon, Robert Badinter explique: "pendant très longtemps je n'ai pas voulu aller en Allemagne. Mais on ne construit rien sur la haine."
"Aimez la vie et la vie vous aimera!"
À 91 ans, Robert Badinter, figure de l'abolition de la peine de mort, qu'il a fait voter en France en 1981, estime que son legs tient en une phrase : "Aimez la vie et la vie vous aimera. Il n'y a pas d'amour sans réciprocité. C'est la grande tradition juive. On porte le toast à la vie."
Robert Badinter fait remonter ce sentiment au souvenir des pires moments d'histoire: "Il y avait des rabbins juifs aux pires moments qui disaient: nous aimons la vie, les SS aiment la mort, pas nous. C’est une des raisons pour lesquelles je suis si profondément abolitionniste."
"Un bon orateur doit parler du plus profond de lui-même"
Reconnu comme un des meilleurs orateurs judiciaires et politiques, Robert Badinter explique l'art du plaideur, qui lui a fait sauver des clients de la peine de mort et tenir plusieurs discours restés dans les annales politiques: "Ce que je sais, c'est que dans les grands moments, la parole ne convainc que si elle vient du plus profond de vous-même. Ce n'est pas la forme. La véritable éloquence c'est la puissance du sentiment qui s'exprime, et qui ne doit jamais être simulée."
L'intégrale de l’interview est diffusée dimanche 28 avril dans l’émission "Pardonnez-moi".
Darius Rochebin