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Ouverture du procès de l'ex-nazi John Demjanjuk

John Demjanjuk est arrivé à son procès sur une civière.
John Demjanjuk est arrivé à son procès sur une civière.
Le procès de John Demjanjuk, 89 ans, accusé de complicité dans l'extermination de 27'900 juifs dans le camp nazi de Sobibor, s'est ouvert lundi à Munich avec un retard dû à l'affluence. John Demjanjuk est entré une première fois dans un fauteuil roulant puis une second fois sur une civière.

Recouvert des pieds à la tête par une couverture blanche,
l'accusé, âgé de 89 ans, a agité un bras pendant que des experts
médicaux témoignaient qu'il était apte à être jugé pour son rôle
présumé d'ancien garde au camp de Sobibor, en Pologne.



Le juge a suspendu la séance au bout de 20 minutes, un responsable
du tribunal affirmant que l'accusé souffrait de maux de tête.
Vingt-huit minutes plus tard, il est revenu, toujours allongé sur
sa civière, mais le visage cette fois à découvert pour la reprise
du procès.



L'accusé est le premier sur la liste des criminels de guerre nazis
encore en vie établie par le Centre Simon Wiesenthal. Cet apatride
d'origine ukrainienne risque la perpétuité si la cour d'assises de
Munich (sud de l'Allemagne) décide qu'il a bien été garde pendant
six mois en 1943 dans le camp d'extermination de Sobibor,
aujourd'hui en Pologne.

Près de 28'000 juifs gazés

Durant cette période, quelque 27'900 juifs, notamment
néerlandais, ont été gazés. Selon l'accusation il a forcément
participé à cette extermination. Demjanjuk nie avoir été à
Sobibor.



Portant une casquette de baseball et vêtu d'une veste de cuir, il
avait une couverture bleu clair sur les genoux, et gardait la
plupart du temps les yeux fermés derrière ses lunettes épaisses. Il
était escorté de deux gardes en uniforme vert et de deux infirmiers
en blouse blanche.



L'audience de ce qui devrait être un des derniers grands procès
des crimes commis sous le nazisme a commencé avec retard en raison
de la foule qui se pressait à l'entrée du tribunal. La salle
d'audience ne peut accueillir qu'environ 150 personnes, alors que
des rescapés de l'Holocauste ou leurs descendants et les
journalistes sont venus du monde entier pour y assister.

Demjanjuk une victime, selon son avocat

Dès l'ouverture du procès, l'avocat du vieillard a récusé
l'impartialité de la cour, reprochant à l'Allemagne de poursuivre
un exécutant étranger alors que des SS allemands qui étaient à
Sobibor ont été acquittés. C'est apparemment la première fois que
l'Allemagne juge un étranger pour crimes commis sous le
nazisme.



L'avocat a affirmé que les gardes formés à Trawniki (Pologne), et
dont Demjanjuk faisait partie d'après l'accusation, étaient des
victimes au même titre que les Juifs morts dans les chambres à gaz
de Sobibor.



Il a même provoqué l'indignation dans l'assistance en comparant
Demjanjuk à un survivant, l'Américain Thomas Blatt, 82 ans, une des
parties civiles, qui aurait reconnu avoir été contraint d'aider les
SS à tuer d'autres Juifs. La cour a annoncé en fin de séance avoir
rejeté la requête de la défense.

Doutes sur son identité

Demjanjuk a été expulsé en mai des Etats-Unis où il vivait
depuis 1952. Sa famille assure qu'il ne survivra pas à un procès,
mais les justices américaine puis allemande l'ont estimé apte à
être jugé, avec deux audiences de 90 minutes par jour.



Il avait échappé à une condamnation à mort prononcée en 1988 en
Israël en raison de doutes sur son identité. Il était alors
soupçonné d'avoir été garde au camp d'extermination de
Treblinka.



afp/ats/bri

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Demjanjuk nie les faits

John Demjanjuk a été déchu de sa citoyenneté américaine en 2002 pour avoir caché son passé dans des camps nazis. Il assure qu'il était dans l'Armée rouge et avait été fait prisonnier par les Allemands en 1942.

L'accusation n'a que des déclarations écrites de témoins aujourd'hui décédés comme témoignage direct de la présence de Demjanjuk à Sobibor.

Elle dispose aussi d'une carte d'identité établie par les SS attestant que Demjanjuk avait été formé comme garde de camp et envoyé à Sobibor, et de décisions de tribunaux israélien et américain selon lesquelles il a notamment été dans ce camp où quelque 250'000 personnes ont péri.

Pour l'accusation, Demjanjuk y a été garde durant près de six mois en 1943, période pendant laquelle 27'900 juifs ont été gazés: il est donc forcément complice de cette extermination.

Demjanjuk a déjà sauvé sa tête une fois: condamné à mort en 1988 en Israël pour avoir été Ivan le Terrible, gardien au camp de Treblinka, il a été acquitté par la Cour suprême en raison de doutes sur son identité.

En bonne ou mauvaise santé?

La santé de l'accusé est devenu un enjeu du procès. Son défenseur, Ulrich Busch, a assuré que son client était «très, très malade (...) Je ne pense pas que c'est du spectacle», a-t-il dit.

L'expert médical qui le suit a cependant minimisé la gravité de ses maux.

Le docteur Christoph Nerl a expliqué que Demjanjuk souffrait d'une maladie du sang, le syndrome myélodysplasique. Mais selon lui, la progression de la maladie le place «tout au bas dans l'échelle des groupes à risques».

Un journaliste de l'AFP l'a vu plaisanté et rire avec son avocat en fin de séance.