"C'est un premier pas très important, mais beaucoup d'autres pas
devront suivre", a résumé la commissaire européenne aux Relations
extérieures Benita Ferrero-Waldner à son arrivée à une réunion des
ministres européens des Affaires étrangères à Luxembourg. "Vous
connaissez la position de l'UE: nous voulons une solution à deux
Etats avec un Etat palestinien viable", a-t-elle souligné.
Un "petit progrès"
Les Européens, qui recevaient le chef de la diplomatie
israélienne Avigdor Lieberman en marge de leur réunion de lundi,
attendent clairement davantage de Benjamin Netanyahu. Ce dernier a
exclu dimanche tout gel de la colonisation israélienne, tout
partage de Jérusalem. Il a posé comme condition à un futur Etat
palestinien sa démilitarisation et la reconnaissance par la
direction palestinienne d'Israël comme Etat du peuple juif.
"C'est un petit progrès" mais "par rapport aux attentes, ce n'est
pas suffisant", a ainsi souligné le ministre français Bernard
Kouchner. "Les conditions pour créer cet Etat avec les Palestiniens
ne sont pas remplies" et "sans cet Etat palestinien, il n'y a
aucune chance pour la paix dans la région", a-t-il estimé.
Des conditions "trop dures"
"Le fait qu'il (Benjamin Netanyahu) ait prononcé le mot 'Etat'
est un petit pas dans la bonne direction", a aussi estimé son
homologue suédois Carl Bildt. Mais "savoir si ce qu'il a mentionné
peut être défini comme un Etat est sujet à débat", "un Etat ne peut
pas être défini n'importe comment", a-t-il souligné. "Je suis
content qu'il ait mentionné la solution à deux Etats, mais les
conditions qu'il a avancées (pour un Etat palestinien) sont je
crois trop dures", a renchéri le Finlandais Alexander Stubb.
Dans l'immédiat, les Européens espèrent que ce discours permettra
de "relancer les négociations" israélo-palestiniennes et l'ensemble
du processus de paix au Proche-Orient, comme l'ont souligné le
diplomate en chef de l'UE Javier Solana ou le ministre espagnol
Miguel Angel Moratinos.
Avigdor Lieberman à Luxembourg
Beaucoup de gouvernements européens semblent vouloir s'assurer
que cette "dynamique" sera bien réenclenchée avant de mettre en
oeuvre le renforcement annoncé en décembre des relations de l'Union
européenne avec Israël - mais de facto gelé depuis l'offensive
lancée par l'Etat d'Israël contre Gaza cet hiver.
Les ministres devaient avoir une discussion animée à Luxembourg
sur l'opportunité de renforcer ces relations, avant l'arrivée
d'Avigdor Lieberman. Ils ne sont pas tous d'accord, comme l'a
montré une récente polémique qui a opposé la présidence tchèque de
l'UE, parmi les plus fervents défenseurs d'Israël en Europe, et la
commissaire Ferrero-Waldner.
Une unanimité difficile
Certains estiment qu'il faut encourager Israël en renforçant dès
maintenant ces relations bilatérales. D'autres estiment qu'il faut
conditionner formellement ce renforcement à l'avancée du processus
de paix. Un renforcement nécessitant l'unanimité des ministres, il
semblait hautement improbable lundi vu l'opposition très ferme
affichée par certains dans la matinée.
"Il ne faut pas parler d''upgrade' (renforcement) avec Israël si
on n'arrive pas à débloquer de façon très positive le redémarrage
du processus" de paix, a ainsi déclaré le Luxembourgeois Jean
Asselborn. "La concrétisation (du renforcement), si le processus de
paix ne reprend pas, doit rester lettre morte".
Les conditions posées par Netanyahu
Soumis à de fortes pressions internationales, notamment de
Washington, Benjamin Netanyahu a accepté dimanche dans son discours
le principe d'un Etat palestinien, tout en posant une série de
conditions draconiennes. Il a notamment exigé la démilitarisation
de cet Etat et la reconnaissance par la direction palestinienne
d'Israël comme Etat du peuple juif.
Il a aussi exclu un gel de la colonisation juive, un retour des
réfugiés palestiniens poussés à l'exode au moment de la création
d'Israël en 1948, ou un retrait de la partie arabe occupée de
Jérusalem. Comme les voisins arabes d'Israël, les Palestiniens et
la presse syrienne ont dénoncé le discours de Benjamin Netanyahu
(lire encadré), tandis que le président américain
Barack Obama a salué le discours de Benjamin Netanyahu comme un
"important pas en avant".
afp/hof
Les voisins arabes d'Israël déçus
Les voisins arabes d'Israël, à l'image des Palestiniens, ont dénoncé lundi le contenu du discours prononcé la veille par le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, le président égyptien jugeant que le point sur le caractère juif d'Israël "ruinait les possibilités de paix".
Des Palestiniens et des trois pays voisins de l'Etat hébreu (Egypte, Liban, Jordanie), seul Amman n'avait pas manifesté sa réprobation à la mi-journée.
"L'appel à reconnaître Israël en tant qu'Etat juif complique davantage les choses et ruine les possibilités de paix", a affirmé, au cours d'une cérémonie militaire, Hosni Moubarak.
"Personne ne soutiendra cet appel, ni en Egypte ni ailleurs", a-t-il ajouté. L'Egypte est le seul pays arabe de la région, avec la Jordanie, à avoir signé un traité de paix avec Israël.
Selon l'agence Mena, le président égyptien a souligné avoir eu l'occasion de dire au président américain Barack Obama que "la solution de toutes les crises (...) dans le monde arabe passait par Jérusalem".
"J'ai dit au Premier ministre Benjamin Netanyahu que les négociations sur le statut définitif des territoires palestiniens devaient reprendre là où elles ont été laissées, immédiatement", a-t-il poursuivi.
"Il devient manifeste que nous sommes en présence d'un gouvernement israélien qui refuse en réalité une solution à deux Etats, l'arrêt de la colonisation et la reprise des négociations du point où elles s'étaient arrêtées" fin 2008, a affirmé le négociateur palestinien Saëb Erakat.
Selon lui, la direction palestinienne est entrée en contact "dès dimanche soir" avec l'administration américaine et des pays européens et arabes "pour expliquer que (Benjamin) Netanyahu n'a fait qu'émettre cinq 'non'".
"Il a dit 'non' à une solution à deux Etats, 'non' au gel de la colonisation, 'non' à la vision du président Barack Obama pour un nouveau Proche-Orient, 'non' à la reprise des négociations au point où elles s'étaient arrêtées et 'non' à l'initiative de paix arabe" proposant une normalisation avec Israël en échange de son retrait des territoires occupés, a-t-il estimé.
Dimanche soir, le Hamas islamiste, au pouvoir à Gaza, avait dénoncé une "idéologie raciste et extrémiste".
A Damas, le quotidien à grand tirage al-Watan a jugé lundi que Benjamin Netanyahu avait "torpillé tous les efforts de paix".
Le Premier ministre "a confirmé qu'il rejetait l'initiative arabe pour la paix ainsi que toutes les initiatives et les résolutions du Conseil de sécurité relatives à la paix" régionale, a écrit le quotidien du parti au pouvoir al-Baas.
Dans un communiqué, le président libanais Michel Sleimane a lui appelé la communauté internationale à "faire pression" sur Israël pour qu'il accepte les précédentes initiatives de paix.