1. Participation en forte hausse
Si le taux de participation à ces élections européennes est resté inférieur à celui des scrutins nationaux, il atteint cependant, avec 51%, son niveau le plus élevé depuis 20 ans. Cette mobilisation marque un coup d'arrêt à l'érosion continue de la mobilisation qui caractérise le scrutin depuis 1979. En 2014, 43% des citoyens s'étaient déplacés.
2. Un Parlement plus fragmenté
Les grands partis dominant traditionnellement le Parlement européen ont subi des pertes importantes lors du scrutin 2019. Le Parti populaire européen (PPE, droite pro-européenne) reste, avec 180 sièges, contre 216 actuellement, la première force de l'hémicycle, selon les résultats encore provisoires dans certains pays.
Les sociaux-démocrates (S&D) composent le deuxième parti du Parlement à l'issue du scrutin, avec 145 sièges (contre 185). Le chef du gouvernement socialiste espagnol Pedro Sanchez sort grand vainqueur des européennes - avec 32% des voix - en Espagne, un résultat dont il va tenter de profiter pour avoir plus de poids sur le continent.
L'élection marque un tournant pour le bipartisme européen. Les deux formations traditionnelles, le PPE et le S&D restent en tête de l'hémicycle, mais perdent leur capacité à réunir à eux seuls une majorité pour faire passer des textes législatifs. Un nouvel équilibre devra être trouvé.
3. La victoire (limitée) des nationalistes
Dopés par les scores des partis de Marine Le Pen et Matteo Salvini, mais aussi celui du parti pro-Brexit de Nigel Farage au Royaume-Uni, les eurosceptiques devraient remplir, toutes tendances confondues, jusqu'à un quart de l'hémicycle (171 sièges selon les projections les plus récentes contre 155 dans l'hémicycle sortant). Ils restent néanmoins loin de la majorité au Parlement européen (376 sièges).
En France, le Rassemblement national (RN) s'impose avec 23,31% des suffrages, en deçà de son score de 2014 (24,9%). Sa cheffe de file Marine Le Pen a immédiatement appelé à la "constitution d'un groupe puissant" au Parlement européen réunissant les formations eurosceptiques. Elle espère fédérer une large alliance de partis nationalistes, eurosceptiques et populistes avec la Ligue de Matteo Salvini qui est arrivée en tête en Italie avec 34,3% des voix.
Mais le regroupement est compliqué entre ces groupes aux intérêts par définition divergents. Les conservateurs polonais du Parti Droit et justice (PiS), finalement en tête à 45,38% des voix, refusent tout compromis sur la Russie. Quant au tribun hongrois, Viktor Orban, qui rafle plus de la moitié des suffrages dans son pays, il reste - techniquement - rattaché au PPE.
4. La croissance des écologistes
Passant de 52 à 69 sièges, les écologistes espèrent devenir un interlocuteur indispensable dans ce paysage politique européen plus fragmenté. Ils finissent, en France, à une inattendue troisième place avec 13,4% des voix. Ce résultat fait écho au score enregistré en Allemagne par les Verts, deuxièmes du scrutin, selon les sondages, juste derrière les conservateurs d'Angela Merkel, qui enregistrent un plus bas historique avec 28,6%.
La croissance verte s'explique notamment par le vote des jeunes, très mobilisés dans les récentes marches pour le climat qui ont eu lieu dans le monde entier.
5. Un renforcement du centre
Les Libéraux (ALDE), dont le parti du président français Emmanuel Macron, sortent renforcés des européennes. Ils obtiennent 109 sièges contre 69 actuellement.
Malgré sa courte défaite face au Rassemblement national, en France, le parti La République en marche (LaRem) du président Emmanuel Macron devrait être en mesure d'exercer une influence à Strasbourg au sein du bloc centriste, l'alliance des libéraux et démocrates, qui sort nettement renforcé du scrutin.
Ils pourront compter sur l'appui des Italiens du Parti démocrate de Matteo Renzi, qui pointe au deuxième rang, derrière la Lega mais devant le Mouvement 5 étoiles, qui s'essouffle.
Juliette Galeazzi (avec AFP)
"L'Europe des peuples a gagné"
Invité lundi dans le 19h30 de la RTS, l'ancien chef du gouvernement italien Enrico Letta estime que c'est "l'Europe des peuples" qui est sortie gagnante de ces élections. "Cette victoire des Verts, des écologistes, signifie que les jeunes ont participé. Cela veut dire qu'il s'agit du thème de l’avenir, qui va être au centre de cette futur législation européenne", explique-t-il.
Concernant la situation de la Suisse après ce scrutin européen, l'ex-président du Conseil des ministres pense que le feuilleton du Brexit jouera un rôle déterminant. "La Suisse est en train de payer l'incertitude du Brexit. Si on trouve une solution, je pense qu'il peut y avoir une période de tranquillité majeure entre l'Union européenne et la Suisse. Franchement je n’aurais pas de crainte si j’étais vous", rassure Enrico Letta.
>> L'interview d'Enrico Letta dans le 19h30: