Le gouvernement de François Fillon sera remanié mercredi et
présentera par ailleurs un "emprunt" pour financer son programme, a
annoncé Nicolas Sarkozy.
Fort du large succès de son parti aux élections européennes,
Nicolas Sarkozy veut donner un nouvel élan à son action. Il
s'exprimait devant le Congrès, une première pour un président
français depuis 1848, permise par la révision de la Constitution en
juillet dernier.
Le discours dans l'hémicycle de l'aile du Midi du château de
Versailles a été suivi d'un débat, en l'absence de Nicolas Sarkozy.
Les parlementaires n'ont pu prendre la parole qu'après son
départ.
Un programme à financer
Le président de la République a fixé plusieurs objectifs à la
nouvelle équipe, qu'il n'a pas décrits dans le détail. Ainsi, le
"premier travail" du gouvernement remanié "sera de réfléchir à nos
priorités nationales et à la mise en place d'un emprunt pour les
financer", a-t-il dit.
Mais "la priorité de notre prochain gouvernement" sera de défendre
l'égalité afin de "donner plus à ceux qui ont moins", a-t-il
annoncé. L'amélioration de l'état des prisons et la construction de
nouvelles places "sera un impératif du prochain
gouvernement".
Quant à l'objectif de ramener à "zéro" le "déficit structurel", ce
sera une autre "priorité du calendrier d'action du prochain
gouvernement".
Le président a aussi dit que le gouvernement "prendrait ses
responsabilités" à la mi-2010 pour décider de la réforme des
retraites. Le Parlement et les partenaires sociaux seront associés
à l'élaboration de ce programme "dès le 1er juillet", a promis le
chef de l'Etat.
Vives critiques de la gauche
"C'est la nature même de notre
régime qui est en cause", a lancé le patron des députés
socialistes, Jean-Marc Ayrault, à l'ouverture de la réunion du
Congrès lundi matin. C'est la première fois depuis 1848 et la
prestation du prince-président Charles-Louis Napoléon Bonaparte
(futur Napoléon III) qu'un président de la République est autorisé
à s'exprimer, en personne, devant les parlementaires.
Sur les 577 députés et 343 sénateurs convoqués, une quarantaine de
parlementaires communistes et neuf écologistes ont décidé de
boycotter ce qu'ils qualifient de "simulacre de démocratie" et de
"mascarade". Les quelque 300 parlementaires socialistes, eux,
assisteront au discours mais ne participeront pas au débat.
"Ce droit d'adresse monarchique est tout à fait désastreux", a
jugé le député socialiste Pierre Moscovici. "Je pense que c'est une
mauvaise chose d'avoir une sorte de discours du trône du président
de la République qui ensuite se retire", a-t-il estimé
dimanche.
Le règne de "Nicolas II"
Le quotidien de gauche Libération faisait sa Une lundi sur
"Nicolas II", avec un dessin représentant le chef de l'Etat en
monarque face à une assemblée d'oreilles. "Qui peut nier la
connotation monarchique du rituel qui se déroulera aujourd'hui dans
le château du Roi Soleil?", relève le journal, en référence à Louis
XIV, le bâtisseur de ce palais symbole de la monarchie.
Mais "après tout, hormis l'apparat dont on peut légitimement
plaisanter, en quoi est-il contraire à l'esprit démocratique qu'un
président choisisse la représentation nationale plutôt que la
télévision pour annoncer sa politique?", s'interroge ensuite le
journal, critiquant l'attitude de l'opposition socialiste.
afp/ap/sbo
Objectif: réduire le déficit public
Sarkozy a exclu toute politique de rigueur pour réduire les déficits publics. "Je ne ferai pas la politique de la rigueur parce que la politique de rigueur a toujours échoué. Je n'augmenterai pas les impôts car cela retarderait longtemps la sortie de crise et parce qu'en augmentant les impôts, au niveau de prélèvements où nous nous trouvons, on ne réduit pas les déficits, on les augmente", a-t-il assuré.
Selon le ministre du Budget, Eric Woerth, le déficit public de la France (Etat, sécurité sociale et collectivités locales) atteindra entre 7 et 7,5% du Produit intérieur brut (PIB) en 2009 et en 2010.
Le président français a voulu faire une distinction entre les bons et les mauvais déficits, entre les déficits qui découlent d'investissements et ceux qui sont liés à des dépenses de fonctionnement qui sont trop élevées.
"2010 sera un rendez-vous capital, il faudra que tout soit mis sur la table: l'âge de la retraite, la durée de cotisation et la pénibilité" du travail, a-t-il ajouté, précisant que "toutes les options seront examinées".
Le débat s'est focalisé ces derniers jours sur l'opportunité de retarder l'âge légal de la retraite, fixé actuellement à 60 ans. Il s'agit de l'âge auquel un salarié peut cesser de travailler et percevoir une pension complète, à condition d'avoir cotisé suffisamment longtemps.
Le président français a estimé que l'allègement des effectifs de la fonction publique devait se poursuivre, et affirmé qu'il fallait "aller le plus loin possible sur la taxe carbone", c'est à dire une fiscalité pénalisant les énergies les plus polluantes.
La burqa n'est "pas la bienvenue" en France
Nicolas Sarkozy a déclaré lundi que la burqa, "un signe d'asservissement" de la femme, n'était pas la bienvenue sur le territoire français.
Le chef de l'Etat français a laissé le soin au Parlement de se saisir de la question du port de la burqa ou niqab - voile musulman intégral - en France.
La burqa, a-t-il souligné sous les applaudissements, "c'est un problème de liberté, c'est un problème de dignité de la femme".
"La burqa, ce n'est pas un signe religieux, c'est un signe d'asservissement, c'est un signe d'abaissement", a-t-il soutenu. "Elle ne sera pas la bienvenue sur le territoire de la République française", a-t-il insisté.
"Le Parlement a souhaité se saisir de cette question, c'est la meilleure façon de procéder", a jugé le président.