Tiananmen: la démocratie fissurée

Grand Format

AP Photo - Elizabeth Dalziel

Introduction

Peu imaginaient à l’époque la portée des évènements du 4 juin 1989. Ce jour, plus connu sous le nom de "massacre de Tiananmen", le Parti communiste chinois ordonne aux militaires de mettre un terme, par les armes, aux mobilisations prodémocratiques qui secouent la capitale et plusieurs grandes villes du pays. Le bilan reste à ce jour un mystère: il serait compris entre 300 et 10'000 morts. Au-delà des victimes civiles, cette sanglante répression marque un coup d’arrêt aux élans de démocratisation dans le pays.
Depuis lors, le gouvernement n’a cessé d’accroître son autoritarisme, soutenu par un développement économique fulgurant. Ce modèle chinois aujourd’hui solidement implanté est devenu une source importante de tensions entre la Chine et les démocraties occidentales. Cette série, diffusée à la radio dans l'émission "Tout un monde", revient sur le déroulement de cet évènement qui a transformé durablement le pays et sa relation au monde.

Episode 1
1980, une décennie d’espoir

Keystone

Comment en est-on arrivé là? Quel est l'état d'esprit des jeunes, de la population en général et, surtout, des autorités à l'époque? Il faut savoir que les années 1980, en Chine, contrastent radicalement avec les décennies précédentes profondément marquées par le chaos de la révolution culturelle. Donc pour comprendre d'où vient la Chine dans les années 1980, il faut évoquer cette révolution culturelle, un évènement qui a façonné en profondeur la société chinoise.

A partir de 1966, la Chine est plongée dans une décennie sombre de violence. Mao Zedong décide de faire place nette, de nettoyer le pays des forces révisionnistes qui mettent à mal sa révolution socialiste. Il ordonne aux jeunes de faire table rase et les enjoint à se rebeller contre l'autorité et les influences bourgeoises capitalistes. A plusieurs reprises il réunit des millions de jeunes adolescents à Pékin. Imaginez la place Tiananmen noire de monde. Des jeunes transis devant leur cher leader. Tous lui jurent fidélité et secouent frénétiquement le Petit Livre rouge, bible de citations du président sensée abreuver l'esprit de ces jeunes gardes rouges. Une armée chargée de tout détruire pour ensuite tout reconstruire.

De jeunes chinois en 1966 brandissent leur Petit Livre rouge [Keystone]
De jeunes chinois en 1966 brandissent leur Petit Livre rouge [Keystone]

Zhang Lifan est un historien, critique de Mao Zedong. Aujourd'hui fervent opposant du parti communiste, il est issu d'une famille d'enseignants et d'intellectuels. Il a 16 ans lorsque débute la révolution culturelle. "Ils mettaient à sac les maisons, ils confisquaient tous nos biens. Il y a eu toutes sortes de violences, des humiliations publiques. Ma famille a tout vécu. Tous nos livres ont été brûlés. Mon père collectionnait des antiquités. Ils ont tout emmené par camion. Ils ont confisqué notre maison. On a dû s'installer dans un petit abri."

S'attaquer aux intellectuels, aux bourgeois, mais aussi à l'autorité. Cet appel émane de Mao qui incarne pourtant ce pouvoir… Pourquoi un tel ordre ? Parce que dans les années 1960, à l'abri des regards, Mao Zedong est en train de se faire pousser vers la sortie.

Plusieurs à l'intérieur du parti communiste critiquent son dogmatisme, ses politiques désastreuses. Des figures progressistes comme un certain Deng Xiaoping, le futur père des réformes, plaident déjà en faveur d'une certaine libéralisation. Mao sent le pouvoir lui échapper et veut purger le parti communiste pour se débarrasser de ses adversaires. Il joue de son culte de la personnalité pour manipuler les jeunes. Il les pousse à renier toutes les figures d'autorité – sauf la sienne évidemment. Mao consolide son pouvoir et devient le soleil rouge de la Chine.

Ma mère n’était pas d’accord avec les idées de Mao. Un soir, elle a décroché son portrait et l’a brûlé. Nous l'avons dénoncé avec mon père. Elle a été fusillée.

Un ancien garde rouge, qui souhaite rester anonyme

"On chantait cette chanson: 'Ma mère et mon père me sont chers, mais le président Mao m'est encore plus cher'." Cet ancien garde rouge tient à rester anonyme. Il incarne le traumatisme vécu à cette époque. A 13 ans, en pleine révolution culturelle, il suit aveuglément les ordres.

"Ma mère n'était pas d'accord avec les idées de Mao. Un soir elle a décroché son portrait et l'a brûlé. Mon père et moi sommes allés à la police et on l'a dénoncée. Moins de deux mois plus tard, elle a été condamnée comme contre-révolutionnaire et fusillée. Aujourd'hui je sais que j'ai fait une erreur. Je m'en veux. J'aimerais lui présenter mes excuses, me repentir. La révolution culturelle a été une catastrophe pour notre nation. Cette leçon historique cruelle ne doit jamais être oubliée pour éviter que de tels faits se reproduisent."

Cette période sombre s'achève donc au bout de dix ans. Le pays sort de cette révolution culturelle traumatisé. A la mort de Mao Zedong, en 1976, la société panse ses plaies. Le système d'éducation est en lambeaux, l'économie est ravagée. Le pays est en très mauvais état. Mis à l'écart par Mao, les progressistes, Deng Xiaoping en tête, s'emparent alors du pouvoir.

Deux conducteurs de char près de Pékin en 1975 [Keystone]
Deux conducteurs de char près de Pékin en 1975 [Keystone]

Zhang Xianling est une activiste, fondatrice de l'association des "mères de Tiananmen". Son fils est mort sur la place en 1989. Elle se souvient cependant de l'espoir suscité par ces nouveaux dirigeants. "Quand Deng Xiaoping est arrivé au pouvoir, la théorie des classes a été officiellement abolie. Avant j'étais considérée comme intouchable car issue d'une famille de propriétaires. Mais ce statut a été levé. Je suis devenue égale aux autres. Quelle joie! A l'époque, j'avais pleine confiance dans le gouvernement et les dirigeants. Je sentais au fond de moi que nous étions en train de prendre la bonne voie. Le chemin vers l'ouverture et les réformes étaient juste."

Réformes sociales et économiques, décollectivisation de l'agriculture. Dès 1978, des signes de privatisation voient le jour… Une énergie nouvelle s'empare généralement du pays. Guo Jian s'installe à Pékin au début des années 1980. Il vient alors d'abandonner sa carrière militaire pour étudier les beaux-arts dans la capitale. "C'était la meilleure période de l'histoire moderne chinoise. On trouvait des publications philosophiques, des livres dont on n'avait jamais entendu parler auparavant. Il y avait des expositions ou encore des concerts… Je passais le plus clair de mon temps à faire le tour de Pékin pour profiter de tout ça au lieu d'étudier à l'université. Je me souviens avoir vu George Michael. C'est le tout premier artiste étranger à s'être produit en Chine."

"Jusqu'en 1989, je dirais que le gouvernement et la population avaient atteint un consensus sur une vision de l'avenir", affirme l'historien Zhang Lifan. "La révolution culturelle derrière nous, tout le monde était plein d'espoir. Les citoyens se préparaient à des lendemains radieux. Une grande légèreté régnait dans l'aire. Il n'y avait même pas d'entraves à la liberté d'expression. On pouvait presque tout dire."

A l'image de Zhang Lifan, ils sont nombreux à décrire avec nostalgie ces années d'euphorie. Mais la machine s'est grippée principalement à cause des divisions politiques à l'intérieur du parti communiste. L'ouverture économique, et surtout politique suscite une certaine crainte. Et puis la transition d'une économie planifiée vers une économie de marché engendre des effets collatéraux d'inflation, de chômage. Des phénomènes qui se manifestent vers la fin de la décennie.

>> Ecoutez l'épisode diffusé dans l'émission Tout un monde :

Mao Zedong, homme d'Etat chinois (1893-1976). [Roger-Viollet /AFP]Roger-Viollet /AFP
Tout un monde - Publié le 3 juin 2019

Episode 2
La montée des tensions

Keystone - Jim Palmer

Malgré l'espoir caractéristique des années 1980, les tensions dans le parti communiste au pouvoir sont importantes. Il y a d'un côté les progressistes réformateurs et de l'autre les conservateurs. Jusque vers le milieu de la décennie, les progressistes mènent le bal. La censure est restreinte, les gens débattent, les intellectuels s'expriment. Et les étudiants commencent à revendiquer des changements plus rapides.

"Même si nous, les étudiants, étions remplis d'espoir dans les années 1980, on avait faim de plus d'espoir, de plus de libertés. On voulait reprendre au gouvernement la maîtrise de notre destin." Wuer Kaixi est l'un des trois principaux leaders du mouvement étudiant de 1989. Exilé à Taiwan, il est toujours sur la liste des individus les plus recherchés par le gouvernement chinois. En 1986, il participe déjà à plusieurs manifestations.

"Les autorités promettaient la libéralisation politique dans leurs slogans d'ouverture, mais elles ne l'ont jamais concrétisée. Dès que l'on demandait au gouvernement d'honorer ses engagements, on faisait face à la répression. Les années 1980 étaient très particulières en Chine. C'était une période pleine de promesses, mais en même temps très déprimante."

Deng Xiaoping, alors président de la commission militaire du parti communiste (à gauche) en compagnie du président du parti communiste Hu Yaobang (à droite) en septembre 1981. [Keystone]
Deng Xiaoping, alors président de la commission militaire du parti communiste (à gauche) en compagnie du président du parti communiste Hu Yaobang (à droite) en septembre 1981. [Keystone]

Les autorités ont interdit cette première vague de manifestations, mais le chef du parti communiste de l'époque, Hu Yaobang, refuse de les réprimer. Proche de Deng Xiaoping, il fait partie du camp des progressistes. Il calme le jeu en répétant les promesses de libéralisation politique. Sa gestion de la crise est critiquée à l'interne, les conservateurs le qualifient de laxiste. À la suite à ces manifestations, il est limogé. Une mise à l'écart qui redéfinit les équilibres au sein du pouvoir.

Le courant progressiste est affaibli, mais il reste influent. Et il décide d'en profiter pendant qu'il en est encore temps pour accélérer les réformes économiques en marche. Peut-être un peu vite, estime Zhang Lifan, historien et opposant du régime.

"Les gens nourrissaient trop d'attentes vis-à-vis des réformes, ils étaient impatients. Et il y a eu des erreurs d'appréciation. En 1988, le gouvernement a décidé de libéraliser brusquement le système des prix. Avant tout était contrôlé. Le résultat a été une escalade drastique des prix des biens de consommation. Le système de salaire n'a pas été adapté en conséquence. Les gens ne pouvaient pas faire face à cette inflation. Le mécontentement s'est emparé de la société. Parallèlement, les inégalités ont augmenté. Certains officiels ont profité de l'ouverture pour s'enrichir. Le public était exaspéré. Dans ce contexte, le décès de Hu Yaobang en 89 a mis le feu aux poudres. Les gens ont laissé exploser leur émotion"

Mi-avril, la population descend dans la rue et défile en hommage à Hu Yaobang, l'ancien chef du parti communiste tombé en disgrâce pour avoir affiché sa sympathie envers les idées démocratiques des étudiants. Ces derniers appellent à honorer son héritage et ses engagements.

Manifestation sur la place Tiananmen le 22 avril 1989 après la mort de Hu Yaobang [Keystone - Sadayuki Mikami]
Manifestation sur la place Tiananmen le 22 avril 1989 après la mort de Hu Yaobang [Keystone - Sadayuki Mikami]

La mort de Hu Yaobang sert de prétexte aux premières mobilisations. Le catalyseur, c'est surtout le contexte international de l'époque comme l'explique Wuer Kaixi, leader du mouvement "L'évènement important à signaler, c'est la Pologne. C'était le pays du monde communiste qui allait de l'avant. Il a réussi à briser le rideau de fer. Il a généré la démocratie de l'intérieur. C'était très encourageant. C'était un exemple. Bien sûr il y avait aussi la fin de l'ère soviétique avec un Gorbatchev également très encourageant. On pensait vraiment qu'avec la politique d'ouverture et de réforme de la Chine, c'était la direction commune vers laquelle se dirigeaient tous les pays communistes. On voulait pousser le gouvernement à aller dans cette direction."

Un gouvernement divisé et de plus en plus apeuré. Guo Jian, est alors étudiant à Pékin "A l'époque je pensais sincèrement qu'on était sur le point de devenir une démocratie. Quand les étudiants ont commencé à défiler dans les rues, je pense que le gouvernement a eu peur. Peur de perdre le contrôle. Il faut se souvenir que les dirigeants de l'époque avaient traversé la révolution culturelle, certains avaient été purgés, avaient fait les frais d'une jeunesse manipulée. Les dirigeants étaient très inquiets à l'idée de perdre à nouveau le contrôle."

Guo Jian décrit le large soutien de la population lorsque les étudiants occupent la place début mai. "Les gens nous donnaient des couvertures, de la nourriture, de l'eau, du lait. Ils nous encourageaient. Et puis la semaine suivante, plusieurs bus sont arrivés. Au début on a cru qu'on allait essayer de nous évacuer. Mais c'était pour nous abriter la nuit. Je ne sais pas d'où ils venaient, mais les gens nous soutenaient comme ça."

Les étudiants de l'université de Pékin occupent la place Tiananmen. [Keystone - Terril Jones]
Les étudiants de l'université de Pékin occupent la place Tiananmen. [Keystone - Terril Jones]

A l'époque, Zhang Lifan est historien à la prestigieuse académie des sciences sociales de Pékin. Il est alors chargé d'entamer une médiation entre les jeunes manifestants et le pouvoir. "J'espérais vraiment parvenir à un compromis entre les étudiants et les autorités. Mais les deux côtés ont campé sur leur position. Les étudiants menaçaient d'escalader les tensions, le pouvoir ne voulait rien lâcher. Au fond les deux parties étaient le produit d'un même système d'éducation. Leur état d'esprit empreint de la théorie de lutte de Mao qui consiste à dire que deux opposants ne peuvent pas coexister. Les vainqueurs sont couronnés, les perdants sont vilipendés. Dans un tel état d'esprit, en l'absence de part et d'autre de toute notion démocratique de tolérance, c'était sans issue. 'Sois tu m'abats, soit je t'abats...'".

Ce dialogue de sourds dégénère quand les deux parties se rencontrent officiellement. Wuer Kaixi et deux leaders sont invités à dialoguer avec le Premier ministre, Li Peng, un conservateur "Quand je rencontre le Premier ministre Li Peng, ça c'est le tournant. On espérait que ce mouvement déboucherait sur un résultat. Peut-être que cette entrevue avec Li Peng pouvait produire ce résultat. Alors quand on a été invité à se rendre au palais du peuple, ça aurait pu se débloquer. Mais il s'est vite mis à nous faire la leçon de manière très condescendante. A ce moment, on a senti l'espoir diminuer."

Deux jours plus tard, à la radio, à la télévision et dans les haut-parleurs de la ville, Li Peng annonce l'entrée en vigueur de la loi martiale "Si on ne réagit pas à cette situation, l'avenir de ce pays – construit sur le sang des martyres de la révolution – sera sérieusement menacé."

La loi martiale est un état d'urgence dans lequel l'armée est chargée de maintenir l'ordre. Les manifestants dressent des barrages, les militaires de la capitale sont bloqués par les habitants et les manifestants. Certains soldats discutent, écoutent. Les bataillons de la capitale restent calmes. A l'époque, Guo Jian ne prend pas au sérieux les mises en garde "On n'y croyait pas. A l'époque le gouvernement avait changé, on bénéficiait d'un soutien populaire. Il y avait des grandes manifestations partout à Pékin et plus d'un million de personnes se joignaient à nous. Et certains officiers venaient même nous parler. Certains montraient même leur soutien. Alors on ne pensait pas que la menace était réelle."

Pendant deux semaines, le calme prédomine à Pékin sous l'oeil d'une poignée de soldats. Mais si la paix règne encore sur la place Tiananmen, une dizaine de bataillons, soit près de 350'000 hommes, sont en train d'être mobilisés autour de la capitale et des principales villes du pays.

>> Ecoutez l'épisode diffusé dans l'émission Tout un monde :

Les étudiants portent Wu'er Kaixi, qui tient le drapeau de son école, contre un "mur de policiers". [www.64museum.org]www.64museum.org
Tout un monde - Publié le 4 juin 2019

Episode 3
Nuit de terreur

Keystone - Jeff Widener

"Les coups de feu deviennent très proches... ils sont assourdissants. Des gens autour de moi sont touchés par les balles et meurent, à côté de moi…" Cet homme, au milieu des balles, c'est Guo Jian, un étudiant présent sur la place Tiananmen, la nuit du 4 juin 1989, date de la sanglante répression du mouvement en faveur des réformes politiques en Chine.

Guo Jian vit aujourd'hui à Sydney, en Australie. Harcelé par les autorités, il a quitté la Chine après la répression de 1989. A l'époque, Guo Jian a 27 ans. Il est parmi les étudiants les plus âgés. Après près de 10 ans dans l'armée, il a entamé des études d'art à Pékin en 1985 avant de se joindre au mouvement de contestation.

Ce soir-là, la rumeur court… les soldats arrivent lourdement armées. Ancien militaire, Guo Jian n'imagine pas une seconde des tirs sur des civils. Mais soudain, sur le coup de 1 heure du matin, sa vision se trouble. Les rues qui bordent la place sont enfumées "A cause des gaz lacrymogènes, on n'y voyait rien. Mais peu à peu, le vent a dispersé la fumée. On a alors aperçu les soldats et les tanks qui se dirigeaient vers nous. Ils se sont mis à tirer sur les gens. Les balles ricochaient sur le sol, contre les murs… partout. Même à ce moment, je ne me rendais pas compte de ce qui arrivait. Les gens étaient abattus tout autour de moi. Tout un coup je me suis dit, merde… C'est réel… Ils tirent les gens à balles réelles."

Guo Jian prend alors ses jambes à son coup… "J'ai été pourchassé par un soldat. Je me suis retrouvé coincé dans une allée. J'ai alors pensé que j'allais mourir à cet endroit. Mais les gens qui vivaient dans les immeubles alentour ont commencé à jeter des objets sur le soldat: des bouteilles, des briques. Il a alors tiré au hasard avant de s'enfuir. Voilà comment je m'en suis sorti."

Le nombre de victimes reste à ce jour encore un mystère: il s'élèverait à 10'000 morts selon les estimations les plus pessimistes.

Zhang Xianling est chez elle ce soir-là. Son fils de 17 ans, passionné de photographie, est sorti en douce avec son appareil malgré les mises en garde de sa mère. Elle ne l'a jamais revu. "Les coups ont commencé vers 23 heures. Au début, c'était des coups sporadiques. Et puis vers 1 heure du matin, c'était un flot continu. Exactement comme sur un champ de bataille. Les tirs résonnaient de partout. Les ambulances hurlaient, les gens criaient. C'était un champ de bataille. J'ai appelé un ami de mon mari qui vivait proche d'une grande avenue du centre-ville. Il m'a confirmé que les soldats tiraient à balles réelles: il voyait le feu sortir des canons de fusils."

Des corps de civils tués près de la place Tiananmen, le 4 juin 1989. Le nombre de victimes reste encore inconnu [Keystone - STR]
Des corps de civils tués près de la place Tiananmen, le 4 juin 1989. Le nombre de victimes reste encore inconnu [Keystone - STR]

Cette grande avenue, c'est Chang'an. Guo Jian s'y trouve justement. Avec d'autres, il tente de se réfugier dans un hôpital quelques rues plus loin. "On a trouvé un blessé sur le chemin. Il était vivant, touché à l'estomac. Le sang coulait comme de l'eau. Avec d'autres on l'a porté pour l'emmener à l'hôpital. Mais une des personnes qui m'aidait à le porter et que je ne connaissais pas a reçu une balle dans le dos juste au moment où on arrivait. Il est mort sur place."

Arrivé dans les couloirs de l'hôpital, le répit de Guo Jian est de courte durée. "Plusieurs personnes avaient déjà été emmenées là. C'était inondé de sang, partout. Un médecin est alors sorti en disant 'On a besoin d'aide! Qui peut nous aider?', j'ai répondu 'Oui, moi'. Le docteur nous a conduit dans une chambre. Elle était remplie de cadavres. On nous a demandé de les mettre sous l'abri à vélos dans la cour. Là j'étais sous le choc. Tous ces morts. Tous ces corps. J'étais terrifié à cause de l'odeur, de la position dans laquelle certains étaient morts. Et puis il y avait le sang… Du sang très épais recouvrait le sol. Je suis presque tombé parce que le sang avait rendu le sol tellement glissant. Cette expérience a été vraiment terrifiante."

Guo Jian est lui-même un ancien soldat… Comment il a vécu le fait de se retrouver sur cette place, sous les tirs de ses anciens camarades? Il décrit une situation très confuse pour lui, dès le début de la mobilisation.

"Quelques jours auparavant, quand les soldats ont commencé à bloquer les routes d'accès à la place Tiananmen, je suis allé leur parler. Je leur ai dit: 'je suis un ancien soldat. Pourquoi vous nous empêchez d'avancer? On n'est pas dangereux, on essaie juste d'obtenir plus de libertés'. L'un d'eux m'a répondu en me disant 'Oui… si vous êtes un ancien soldat alors vous comprenez qu'on ne fait qu'obéir aux ordres'. A ce moment-là, j'ai réalisé que j'étais sur cette place en tant qu'étudiant. Mais je me suis aussi vu comme le soldat que j'avais été. Et quand les tirs ont débuté, j'ai pensé à ça. Si ces deux personnes que je suis avaient été là en même temps, je me serais tué moi-même."

Si vous êtes un ancien soldat, alors vous comprenez qu’on ne fait qu’obéir aux ordres

Un militaire sur la place Tiananmen

Rongé par ce conflit intérieur, Guo Jian reste aussi hanté par les questions. Qui est responsable? D'où venaient ces ordres disproportionnés? Deng Xiaoping seul? Les conservateurs? Ou l'ensemble d'une classe de vieux leaders politiques traumatisés, paniqués par le souvenir de la révolution culturelle et le chaos engendré?

Il n'y a donc à ce jour aucune réponse à ces questions. Officiellement le gouvernement a maté une révolte menée par des fauteurs de troubles, des contre-révolutionnaires. Cette répression aurait fait environs 200 morts selon Pékin qui refuse, depuis, d'évoquer le sujet. Au grand dam des victimes, comme Guo Jian.

"C'est une plaie à vif. C'est comme si on m'avait tiré dans la tête et qu'on ne m'avait pas offert la chance de guérir, comme si je n'avais jamais eu de traitement. Aujourd'hui encore, je suis triste. Je n'arrive pas à avancer, je n'arrive pas à changer. Cette cicatrice, c'est le symbole d'un vrai problème. Ma vie et mon travail ont été très affectés."

Le massacre de Tiananmen reste aujourd'hui un des plus grands tabous d'une Chine qui plonge depuis, année après année, dans une forme d'amnésie collective.

>> Ecoutez l'épisode diffusé dans l'émission Tout un monde :

Des soldats dans les rues de Pékin le 5 juin 1989. [AP Photo/Keystone]AP Photo/Keystone
Tout un monde - Publié le 5 juin 2019

Episode 4
La grande amnésie

AP Photo - Elizabeth Dalziel

Il y a aujourd'hui en Chine une forme d'amnésie collective. Après avoir écrasé le mouvement place Tiananmen et toutes les mobilisations à travers le pays, le gouvernement a assené un énorme coup sur la tête des Chinois. La répression s'est poursuivie bien au-delà du mois de juin. Les mois suivants, plusieurs milliers de personnes ont été arrêtées. La surveillance s'est accrue, la presse mise sous contrôle et les libertés restreintes. Après la période de relâchement du début des années 1980, les autorités ont donc resserré la vis au grand regret de Zhang Lifan, historien et opposant du parti communiste.

"L'espace gagné en termes de liberté académique ou de liberté d'expression s'est réduit de plus en plus. Après Tiananmen la fenêtre s'est brutalement refermée. Bien sûr, le leader de l'époque, Deng Xiaoping a fait sa tournée d'inspection du sud de la Chine peu après en encourageant tout le pays à faire des affaires. Il a été très intelligent. Il a incité la population à s'enrichir. Il a neutralisé les frustrés, les potentiels opposants. C'était une brillante astuce de Deng."

>> Regardez le Temps présent intitulé "La Chine dans l'oeil du cyclone" tourné au printemps 1989 :

Reportage sur la société chinoise pendant les évènements de 1989. [RTS]
Temps présent - Publié le 5 octobre 1989

Deng Xiaoping s'est donc rendu dans la province du Guangdong, fief manufacturier aux portes de Hong-Kong, symbole du dynamisme économique naissant. Il a ordonné au parti communiste de négocier franchement le virage capitaliste. C'est à l'époque qu'apparaît le terme de socialisme de marché.

"Le capitalisme se développe depuis des siècles", déclare Deng Xiaoping. "Et nous? Où en est notre développement? Nous avons gâché plusieurs décennies. Nous sommes en retard. Sans ce retard, notre pays serait très différent aujourd'hui. Il ne faut plus gaspiller de temps. Ne soyez pas déstabilisés. Continuez de développer le pays. Faites en sorte que le niveau de vie de la population s'améliore. Les gens vous soutiendront seulement s'ils vivent mieux."

Wuer Kaixin, leader des manifestations étudiantes de 1989, évoque un contrat du gouvernement avec la population, "le gouvernement a conclu un pacte avec le peuple chinois. Il donnait la liberté économique aux Chinois en échange de leur coopération politique. Pour moi, c'est une très mauvaise affaire, parce que la liberté économique et la liberté politique appartenaient à l'origine toutes deux au peuple chinois. On n'échange pas une liberté contre une autre. Mais les Chinois ont conclu cette mauvaise affaire, parce qu'au fond moins de liberté, c'est toujours mieux que pas de liberté du tout, et la peur instaurée par le gouvernement reste très présente."

Le 5 juin 1989, alors que des tanks remontent l'avenue Changan pour rejoindre la place Tiananmen, un citoyen pékinois se place en opposition. Des photographes captent l'événement et la photo devient le symbole de Tiananmen. Personne ne sait son nom, ni ce qu'il est devenu. [64museum.org]
Le 5 juin 1989, alors que des tanks remontent l'avenue Changan pour rejoindre la place Tiananmen, un citoyen pékinois se place en opposition. Des photographes captent l'événement et la photo devient le symbole de Tiananmen. Personne ne sait son nom, ni ce qu'il est devenu. [64museum.org]

Une peur malgré laquelle le ressentiment populaire restait fort envers le parti juste après le massacre de 1989. Même si à l'époque les gens se sont rangés, le pouvoir a souffert d'une vraie perte de légitimité. Le parti est paradoxalement ressorti affaibli de sa démonstration de force.

Zhang Xianling a perdu son fils de 17 ans ce fameux soir de juin 89. Co-fondatrice de l'association des "mères de Tiananmen", elle demande depuis trente ans des comptes au gouvernement. Une dame embarrassante de 81 ans qui vit en résidence surveillée. "Je peux dire avec certitude que la conscience politique de la société chinoise est à son plus bas niveau. Les gens se battent uniquement pour des habits, du luxe, des voitures. Comme des animaux. Personne ne se soucie des choses de l'esprit. Tout le monde s'en fiche ou bien ils n'osent pas. Ils ont peur d'être arrêtés."

Lorsque son fils tombe sous les balles ce soir-là, ses camarades tentent de lui venir en aide, en vain. Deux garçons, une fille qui ont ensuite accompagné Mme Zhang dans son deuil. Qui ont vieilli avec elle. Et qui eux aussi ont été façonnés au fil des ans.

"A l'époque ils étaient indignés, révoltés. Mais aujourd'hui l'un d'entre eux a complètement changé. C'était un des étudiants les plus actifs à l'époque. C'est devenu quelqu'un d'indifférent, réticent à participer à toute revendication. Les autres se taisent. Mais je sais qu'un jour, s'ils n'ont plus peur, ils parleront."

Wuer Kaixi, était un des leaders étudiants des manifestations de la place Tiananmen. Il vit désormais en exil, à Taïwan. [DR]
Wuer Kaixi, était un des leaders étudiants des manifestations de la place Tiananmen. Il vit désormais en exil, à Taïwan. [DR]

Parler. Une nécessité pour ne pas voir 1989 tomber complètement dans l'oubli estime Wuer Kaixin. Recherché par les autorités dès le lendemain de la répression de Tiananmen, le jeune étudiant de 21 ans à l'époque s'enfuit. Il passe à Hong-Kong et trouve refuge à Taiwan où il vit depuis 30 ans. Il a pourtant tenté de se rendre plusieurs fois aux autorités. Il n'est donc jamais parvenu à se faire arrêter par la Chine où il est officiellement recherché.

Il a multiplié les tentatives pour se faire arrêter : à Macao, auprès des ambassades de Chine aux Etats-Unis ou au Japon. Il le sait, en cas de succès, il serait immédiatement jugé et emprisonné. Mais un procès lui permettrait de relancer le dialogue, de médiatiser à nouveau la cause démocratique en Chine. Pékin refuse cependant de l'arrêter. "Ils ont peur du dialogue. En 1989, la raison pour laquelle ils ont déployé les troupes pour réprimer le mouvement étudiant, c'était justement parce qu'ils refusaient ce dialogue."

"Au fil des ans, nous ne sommes pas les seuls à avoir demandé le dialogue. Le Dalaï-lama bien avant 89 a demandé de manière répétée un dialogue avec Pékin. Pendant la révolte des parapluies à Hong Kong, les étudiants voulaient eux aussi un dialogue. Ilham Torti, ce professeur Ouïghour reconnu, insistait lui aussi pour dialoguer. Les autorités l'ont condamné à la prison à vie pour le faire taire. Ce dialogue… le gouvernement chinois en a peur. Et pourquoi un gouvernement aurait-il peur de dialoguer ? C'est une très bonne question que le monde entier doit se poser aujourd'hui."

Une attitude qui, pour Wuer Kaixin pose un problème bien au-delà de la question de Tiananmen… Et compromet l'avenir des libertés en Chine 30 ans après.

>> Ecoutez l'épisode diffusé dans l'émission Tout un monde :

Des dizaines de milliers d'étudiants et citoyens à Pékin en 1989. [AP Photo/Keystone - Sadayuki Mikami]AP Photo/Keystone - Sadayuki Mikami
Tout un monde - Publié le 6 juin 2019

Episode 5
La Chine et le mirage démocratique

EPA - Olivier Weiken

Rares sont les opposants au parti communiste à oser s'exprimer ouvertement aujourd'hui. La plupart sont surveillés de près. Certains acceptent quand même de rencontrer des médias étrangers. C'est le cas de Zhang Lifan, historien, acteur des manifestations de 1989. Ce fervent critique du parti communiste, aujourd'hui âgé de 68 ans, est très pessimiste quant à une possible démocratisation.

"70 ans de domination du parti communiste ont formaté l'esprit des gens. C'est un lavage de cerveau collectif par l'éducation. Les produits du système d'éducation du parti communiste chinois sont dénués de réflexion indépendante. Ce type d'éducation permet seulement de cultiver des sujets obéissants, mais en aucun cas des citoyens dignes de ce nom. Aujourd'hui, les Chinois courent aveuglément après l'argent mais sont dénués de toute notion de citoyenneté ou de responsabilité politique."

Une notion de citoyenneté à l'occidentale que le gouvernement veut éviter à tout prix de voir germer dans l'esprit de la population selon Zhang Lifan.

Une petite fille pose sur la place Tiananmen le 6 juin 2019 [EPA - Wu Hong]
Une petite fille pose sur la place Tiananmen le 6 juin 2019 [EPA - Wu Hong]

Pour Zhang Lifan, la démocratisation n'a jamais été aussi loin depuis la mort de Mao Zedong "A l'époque de Mao on vivait sous une dictature menée d'une main de fer. Puis sous l'autorité de Deng Xiaoping, c'était le contraire, c'était l'ouverture, les réformes, la liberté d'expression naissante et les avantages du capitalisme, comme la propriété, pour stimuler l'économie du pays. Et il y a eu 1989. Les dirigeants d'aujourd'hui tentent de combiner ces deux héritages. Xi Jinping veut une dictature menée d'une main de fer à la Mao tout en profitant des avancées de Deng en matière d'accumulation de fortune. Xi est très puissant, parce qu'il a appris de Mao et de Deng."

Ce modèle rigide peut-il évoluer vers plus de libertés, politiques notamment? Les différentes personnes rencontrées n'y croient plus, en tout cas pas dans un avenir proche. Wuer Kaixin, un des anciens leaders du mouvement prodémocratie de 1989 exilé à Taiwan le martèle: "le gouvernement chinois n'est ouvert à aucun compromis. Il reste obnubilé par une chose et une seule: son maintien au pouvoir."

"Ce gouvernement ne se préoccupe que de son propre intérêt. Le monde doit ouvrir les yeux et s'en rendre compte. Le gouvernement chinois a tellement peur du dialogue parce qu'il veut agir selon sa propre vision qui est en conflit avec la vision du reste du monde. Tout espoir que la croissance économique ou la coopération commerciale avec la Chine va forcer le pays à suivre les règles du jeu imposées par le reste du monde est illusoire. Le monde doit comprendre qu'en disant NON à la Chine, on aura peut-être une chance d'engager enfin le dialogue. Sinon, on ne fera que suivre les exigences du parti communiste chinois."

Le gouvernement chinois n’est ouvert à aucun compromis. Il reste obnubilé par une chose et une seule : son maintien au pouvoir.

Wuer Kaixin, ancien leader du mouvement étudiant exilé à Taïwan

Des propos qui résonnent particulièrement dans cette période de tensions croissante entre la Chine et l'occident. Les Etats-Unis bien sûr, mais aussi l'Europe, commencent à se montrer de plus en plus critiques à l'égard de Pékin. Mais pour Wuer Kaixin, ce réveil balbutiant arrive trop tard.

"Les démocraties occidentales, Etats-Unis en tête, ont mené une politique d'apaisement avec la Chine depuis son ouverture, ces 40 dernières années. Le monde n'a pas seulement toléré un régime totalitaire brutal – qui a commis beaucoup d'atrocités ces 40 dernières années, comme Tiananmen – il ne les a pas seulement permises, il les a nourries! L'Occident en particulier a aidé la Chine à devenir ce qu'elle est aujourd'hui. Et ça par pur égoïsme en se disant que 'bon, si le régime nous ouvre son marché, alors au fond la politique ce n'est pas nos affaires… On va laisser faire'."

Un constat sévère. Et qui n'est évidemment de loin pas un constat neutre. Il émane, on le rappelle d'une des figures de proue du mouvement de 1989 devenu un fervent militant en exil.

"Ces trente dernières années, on n'a cessé de mettre le monde en garde", affirme Wuer Kaixin. "Mais comme nous sommes justement une bande de dissidents en exil, tout ce que l'on dit tombe dans l'oreille d'un sourd. On nous accuse d'avoir un agenda politique. Oui. C'est vrai. Et cet agenda consiste à conduire la Chine vers la liberté et la démocratie telle qu'appliquée en Occident. Et cet agenda devrait aussi être le vôtre."

Ray Wong (à g.) et Alan Li Tung Sing sont des militants pro-démocratie hongkongais. Ils sont réfugiés en Allemagne. Devant le parti écologiste allemand, ils ont affirmé le 4 juin 2019 que "la Chine est plus brutale que jamais" et que "Le monde libre doit se réveiller" [AP Photo - Markus Schreiber]
Ray Wong (à g.) et Alan Li Tung Sing sont des militants pro-démocratie hongkongais. Ils sont réfugiés en Allemagne. Devant le parti écologiste allemand, ils ont affirmé le 4 juin 2019 que "la Chine est plus brutale que jamais" et que "Le monde libre doit se réveiller" [AP Photo - Markus Schreiber]

L'Occident aurait donc cessé, selon lui, de défendre ses valeurs à l'égard de la Chine. Une Chine qui remet d'ailleurs en cause l'universalité de valeurs comme la démocratie, les droits de l'homme. Et le discours de Pékin fait son chemin. Il semble en tout cas de plus en plus accepté, y compris du côté de l'Occident. Un relativisme des valeurs que dénonce fermement Wuer Kaixin

"C'est l'excuse standard. C'est bidon. Il faut rétorquer au gouvernement chinois:'quelle partie des soi-disant valeurs occidentales sont incompatibles avec le peuple chinois? La liberté? L'égalité? Le droit de participer? Laquelle de sa valeur spécifique ne convient pas à la Chine?' Le peuple chinois veut sa liberté… C'est certain! Confier son destin dans les mains de quelqu'un d'autre, ce n'est pas une valeur chinoise, asiatique, orientale ou même confucéenne.

"Le concept de liberté, de droits de l'homme ont été inscrits comme étant universels pour une bonne raison. Les pays asiatiques ont tous participé à l'élaboration de la déclaration des droits de l'homme et aux différents engagements. Les Chinois veulent leur liberté au moins autant que les Occidentaux qui en jouissent déjà. Et peut-être même qu'on la désire encore plus."

30 ans après Tiananmen, la cicatrice est encore là, bien ouverte. Et l'heure est plutôt à la désillusion. Mais tous les acteurs des manifestations de 1989 évoquent malgré tout un infime espoir: celui de la chute ou de la transformation du Parti communiste chinois. Peu y croient cependant. Et pour cause: le destin du régime est scellé à l'économie du pays. Et personne aujourd'hui dans le monde n'a véritablement intérêt à voir l'économie chinoise se fissurer.

>> Ecoutez l'épisode diffusé dans l'émission Tout un monde :

Un garde chinois à proximité du Monument aux Héros du Peuple. [AP Photo/Keystone - Ng Han Guan]AP Photo/Keystone - Ng Han Guan
Tout un monde - Publié le 7 juin 2019