"C'est un petit pas pour un homme, mais un bond de géant pour l'humanité". Il est trois heures du matin en Suisse, le lundi 21 juillet 1969. L'américain Neil Armstrong vient de prononcer l'une des plus grandes phrases de l'histoire humaine. De l'histoire du monde, puisqu'il s'exprime depuis la Lune tant convoitée.
Astrophysicien à l'Université de Berne, Willy Benz a 14 ans cette nuit-là. Comme beaucoup, il suit l'événement avec une assidue fascination. "C'était fantastique. La science-fiction devient réalité. On avait l'impression de participer à l'Histoire, de changer d'époque."
Quelques minutes avant ces premiers pas historiques, le module Eagle de la mission Apollo 11 s'est donc posé sur la Lune, en pleine mer de la Tranquillité. Deux astronautes, Neil Armstrong et Buzz Aldrin, foulent le sol lunaire. Le troisième, Michael Collins, reste en orbite.
C'est l'aboutissement d'une compétition féroce entre deux superpuissances, les Etats-Unis et l'Union soviétique, jusque-là en tête de cette folle course contre-la-montre. Les Américains font la différence in extremis. Le discours du président Kennedy, sept ans plus tôt, s'est avéré décisif. "Les yeux du monde sont dorénavant tournés vers l'espace, vers la Lune et les planètes au-delà, et nous avons fait voeu de ne pas voir cet espace gouverné par l'étendard hostile de la conquête, mais par la bannière de la liberté et de la paix. (...) Les vœux de cette nation ne peuvent être accomplis que si nous sommes premiers et, par conséquent, nous avons bien l'intention de l'être."
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Par ces déclarations à Houston, le 12 septembre 1962, John Fitzgerald Kennedy place la conquête spatiale comme une priorité pour le pays. "Le programme Apollo a coûté l'équivalent de 125 milliards de dollars, raconte Willy Benz. Il y avait 400'000 employés. 20'000 industries ou universités ont participé à ce programme. Les Etats-unis ont mis les moyens et ils y sont arrivés."
Thierry Courvoisier, professeur honoraire d'astrophysique à l'Université de Genève, décrypte le discours fondateur de JFK: "Il y met quelques éléments scientifiques et technologiques ainsi qu'un peu d'idéal pacifiste. En disant que le USA doivent être les premiers, il y a des éléments d'hégémonie américaine. Ce que sous-tend ce discours, c'est que les États-unis veulent façonner le monde comme ils l'entendent."
Aller sur la Lune, pas parce que c'est facile, mais justement parce que c'est difficile
Pour Willy Benz, ce qu'il y a d'extraordinaire dans cette aventure, “c'est que ça a fonctionné du premier coup! Avec l'électronique et l'informatique de l'époque, ils ont réussi à aller sur la Lune. C'est incroyable. Il y avait plein de petits boutons que l'on actionnait manuellement. Ça n'a rien à voir avec le spatial d'aujourd'hui."
"Les astronautes de l'époque étaient un peu des kamikazes. On les attachait dans des boîtes de conserve. Ils étaient assis au sommet d'une fusée, sur des tonnes d'explosifs."
"Quand on voit la toute petite capsule sur cet immense tube rempli de carburant, on se dit qu'on est à la limite de ce qu'on peut faire, surenchérit Thierry Courvoisier. Il y a aussi un aspect d'organisation du travail très bien géré par la NASA."
Un souvenir impressionnant aussi pour John Diethelm, qui était en 1969 employé de la firme horlogère Omega. A l'époque, la NASA a testé la résistance de montres dans le but d'en envoyer une au poignet des astronautes d'Apollo 11. La gagnante fut la Speedmaster suisse, surnommée désormais la Moonwatch.
"Mais chez Omega, les employés n'en savaient rien avant le jour J", se souvient John Diethelm. "Puis, mystérieusement, nous avons appris que la NASA avait fait des essais et nous nous sommes empressés de demander les résultats. Ils nous ont surpris, nous n'avions jamais pensé qu'une montre pourrait résister à tout cela", raconte-t-il fièrement dans le 19h30.
En 1969, c'est le 16 juillet que le voyage concret commence, dans un suspense insoutenable. Le lanceur Saturn 5, pesant plus de 3000 tonnes, décolle de Cap Canaveral. Près d'un million de personnes assistent à l'événement.
Après un trajet de trois jours, le vaisseau Apollo se place en orbite autour de la Lune. Au bout de 13 tours, le vaisseau Apollo se scinde en deux. Armstrong et Aldrin entament leur descente vers le sol lunaire.
L'Aigle se pose. L'Histoire se fige. Armstrong lit le texte à haute voix: "Ici des hommes de la planète Terre ont pris pied pour la première fois sur la Lune, juillet 1969 apr. J.-C. Nous sommes venus dans un esprit pacifique au nom de toute l'humanité."
Les astronautes sont restés 21 heures et 36 minutes sur la Lune. Le retour sur Terre dure 2 jours et demi. Le 24 juillet, la capsule Apollo 11 amerrit dans l'océan Pacifique.
Mais a-t-on vraiment posé le pied sur la Lune? Un drapeau qui flotte alors qu'il n'y a pas d'atmosphère, des images trop belles pour être vraies, un éclairage suspect, l'absence de cratère sous le module lunaire, pas d'étoiles dans le ciel… autant d'arguments mis en avant par les complotistes pour nier l'alunissage de la nuit du 20 au 21 juillet 1969.
Si ces arguments ont tous été scientifiquement démontés, rien n'y fait: 11% des Suisses croient que les astronautes n'ont jamais marché sur la Lune, selon un sondage Sotomo en 2018.
>> Voir aussi les explications de Chloé Carrière, présidente de l’association Space at your Service et étudiante en physique à l’ Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL):