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Aux Etats-Unis, une commission remet en question les droits humains

Mike Pompeo annonce la création d'une commission pour choisir parmi les droits humains ceux qui sont vraiment inaliénables. [AFP - Mark Wilson/ Getty Images North America]
RTSreligion - Quand la liberté religieuse écrase les droits humains aux Etats-Unis / Chronique de RTSreligion / 2 min. / le 30 juillet 2019
Le secrétaire d'Etat américain Mike Pompeo a nommé lundi une opposante à l'avortement à la tête d'une commission pour choisir parmi les droits humains ceux qui sont vraiment inaliénables et ceux dont on peut se passer.

Mary Ann Glendon, professeure de droit à Harvard et l'une des penseuses du mouvement contre le droit à l'avortement, va diriger une commission des "droits inaliénables" au sein du département d'Etat – en anglais, "Commission on Unalienable Rights".

Ce panel de dix personnes "doit réfléchir à la question la plus fondamentale: qu'est-ce que cela signifie de dire, ou de prétendre, que quelque chose est un droit humain?", a affirmé Mike Pompeo, en disant se baser sur "les idées des pères fondateurs sur la liberté individuelle et le gouvernement constitutionnel".

En mai, lors de la création de cette commission, il décrivait ainsi son but: "proposer une pensée neuve sur le discours des droits de l'Homme quand ce genre de discours s'éloigne des principes fondateurs de la loi naturelle et des droits naturels des Etats-Unis d'Amérique".

Car pour le secrétaire d'Etat américain, un chrétien évangélique qui évoque souvent sa foi, "les institutions internationales, pensées et construites pour défendre les droits humains, se sont éloignées de leur mission originelle".

Mike Pompeo a toutefois souligné la diversité de la nouvelle commission, composée "d'experts des droits humains, de philosophes et d'activistes, de républicains, de démocrates et d'indépendants". Parmi eux figure Katrina Lantos Swett, une démocrate dont le père, Tom Lantos, a été un opposant des régimes dictatoriaux.

Inquiétudes autour de la nouvelle commission

Amnesty International a critiqué cette nouvelle commission, affirmant que les différentes administrations américaines avaient soutenu la Déclaration universelle des droits de l'Homme, adoptée par l'ONU en 1948: "Cette politisation des droits humains pour ce qui semble être une tentative de poursuivre des politiques haineuses visant les femmes et la communauté LGBT est honteuse", a déclaré Joanne Lin, d'Amnesty International USA.

Mary Ann Glendon avec le Pape Benoît XVI, lorsqu'elle était ambassadrice américaine au Saint-Siège. Vatican, le 29 février 2008. [Reuters - Osservatore Romano Vatican]
Mary Ann Glendon avec le Pape Benoît XVI, lorsqu'elle était ambassadrice américaine au Saint-Siège. Vatican, le 29 février 2008. [Reuters - Osservatore Romano Vatican]

Ce panel "risque de saper de nombreuses normes internationales sur les droits humains que les Etats-Unis ont aidé à établir, les droits LGBTQI inclus, tout comme d'autres droits dont la protection est en danger", a aussi regretté Eliot Engel, le chef démocrate de la commission des Affaires étrangères à la Chambre des représentants.

De nombreuses associations et responsables religieux ont fait part de leur inquiétude auprès de Mike Pompeo par une lettre ouverte. Ils critiquent notamment le choix des membres parmi lesquels l'un a dit admirer le président turc Recep Tayyip Erdogan, un autre a défendu l'Arabie saoudite, alors même qu'elle était accusée du meurtre du journaliste Jamal Khashoggi. Vingt-deux sénateurs ont aussi envoyé une lettre ouverte au Secrétaire d'Etat pour lui exprimer leur "profonde préoccupation".

>> Lire : "La responsabilité de l'Etat saoudien est engagée" dans l'affaire Khashoggi

Par ailleurs, sa présidente, Mary Ann Glendon, est une ancienne ambassadrice américaine au Vatican, connue pour ses prises de positions contre l'avortement et le mariage homosexuel.

Enfin, tous les commissaires sont accusés de ne s'être concentrés que sur la liberté religieuse pendant leur carrière professionnelle et universitaire. Parmi eux, certains auraient même cherché à l'élever au-dessus des autres droits fondamentaux.

La Commission ravit les conservateurs

Le Conseil de recherche sur la famille, un groupe d'activistes fondamentalistes américains qui s'oppose farouchement à la reconnaissance de l'homosexualité, a au contraire salué la création "historique" de cette commission.

Certains conservateurs américains dénoncent les grandes organisations des droits humains, en leur reprochant leur défense des droits reproductifs des femmes, des droits des homosexuels ou de l'égalité salariale.

>> Lire : L'Etat d'Alabama promulgue la loi sur l'avortement la plus restrictive des USA

Sujet radio: Noriane Rapin

Adaptation web: Stéphanie Jaquet et l'afp

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"Les principes, pas la politique"

Mary Ann Glendon représentait le Vatican lors de la conférence de l'ONU sur les femmes à Pékin en 1995 quand Hillary Clinton, alors Première dame des Etats-Unis, avait affirmé que "les droits des femmes sont un droit humain". L'universitaire avait critiqué l'accent mis par la conférence sur les politiques de contraception dans les pays en développement.

La commission travaillera "au niveau des principes, pas de la politique", a-t-elle assuré lundi.

Dans un mémo dévoilé dans la presse peu après l'élection de Donald Trump, le gouvernement américain était appelé à utiliser la question des droits humains pour condamner ses rivaux comme la Chine, l'Iran ou Cuba, sans insister auprès de ses alliés comme l'Egypte ou l'Arabie saoudite.

Les Etats-Unis ont en outre quitté le Conseil des droits de l'Homme de l'ONU en dénonçant le "sectarisme" de l'instance à l'égard d'Israël.

La droite religieuse a lancé depuis quelques mois une grande offensive contre le droit à l'avortement dans les Etats conservateurs, espérant faire revenir la Cour suprême sur son arrêt emblématique qui avait légalisé l'IVG aux Etats-Unis en 1973.