Des centaines de nationalistes ont manifesté dès son arrivée en
milieu d'après-midi à l'aéroport, exigeant une reconnaissance du
«génocide arménien» qui remonte à l'empire ottoman au début du XXe
siècle.
«Nous avons la volonté politique de résoudre les différends
entre la Turquie et l'Arménie. J'espère que cette visite pourra
créer la possibilité d'améliorer nos relations», a affirmé A.Gül à
Erevan.
Stabiliser le Caucase
«Nous avons échangé sur la façon de favoriser la stabilité et la
coopération dans le Caucase», a-t-il ajouté lors d'une conférence
de presse commune avec son homologue arménien.
Employant les mêmes termes que son homologue, Serge Sarkissian a
souligné une «volonté politique de résoudre les différends» entre
les deux pays «pour ne pas les laisser aux générations à
venir».
Le Caucase est une région riche en hydrocarbures et l'un des
enjeux majeurs de la course mondiale aux ressources énergétiques.
La crise russo-géorgienne a poussé Ankara à revoir sa politique
dans le Caucase, favorisant le réchauffement des relations turco
arméniennes.
Serge Sarkissian avait invité son homologue à l'occasion du match
aller auquel les deux dirigeants ont assisté ensemble samedi soir.
Signe de ce réchauffement diplomatique, il a annoncé que A.Gül
l'avait invité en Turquie à l'occasion du match retour
Turquie-Arménie de qualification pour le mondial 2010 de
football.
Abdullah Gül hué
Des mesures de sécurité renforcées étaient en vigueur dans la
capitale arménienne à l'occasion de cette visite qui a été
accompagnée toute la journée par des centaines de manifestants, à
l'appel du parti nationaliste Dachnak Tsoutioun. «Reconnaissance»,
«arrêtez de nier le génocide», scandaient notamment les
manifestants qui ont hué A.Gül à son arrivée à la présidence et ont
formé une chaîne humaine aux abords de l'aéroport.
Ils ont aussi organisé une marche aux flambeaux devant le mémorial
dédié au «génocide arménien». Les sifflets et les huées ont
également retenti dans le stade dès l'arrivée de A.Gül qui s'est
installé derrière les vitres blindées de la tribune
présidentielle.
Génocide arménien
Abdullah Gül est le premier président turc à se rendre en
Arménie depuis l'indépendance en 1991 de cette ex-république
soviétique, avec laquelle Ankara n'entretient pas de relations
diplomatiques en raison de divergences sur le caractère des
massacres d'Arméniens commis entre 1915 et 1917 en Anatolie.
L'Arménie estime que les massacres commis sous l'empire ottoman
ont fait jusqu'à 1,5 million de morts et constituent un génocide,
une position adoptée par plusieurs pays mais catégoriquement
rejetée par la Turquie. La Turquie a fermé sa frontière avec
l'Arménie en 1993 pour soutenir l'Azerbaïdjan turcophone dans son
conflit avec l'Arménie sur la région du Nagorny-Karabakh, enclave
peuplée d'Arméniens en territoire azerbaïdjanais, dont la sécession
a conduit à une guerre entre les deux pays.
ats/afp/jeh/bri
La presse arménienne reste réservée
La presse arménienne restait prudente samedi sur la visite du président turc après deux décennies de silence diplomatique, n'attendant aucun "grand changement" dans l'immédiat.
Selon le quotidien indépendant Ayots Ashkar, Abdullah Gül évoquera trois sujets avec son homologue arménien:
- la création d'un forum pour le Caucase
- la mise en place d'une commission d'historiens sur les massacres d'Arméniens entre 1915 et 1917 (un "génocide" pour Erevan)
- la question de la région du Nagorny-Karabakh, enclave peuplée d'Arméniens en territoire azerbaïdjanais dont la sécession a conduit à une guerre entre les deux pays au début des années 90.
Le quotidien Aravot, par la plume de son rédacteur en chef Aram Abramian, estimait pour sa part "exagérée" l'ampleur donnée à cette visite.
"Il me semble que cette passion autour de cette visite est exagérée", écrit-il.
"C'est seulement un jeu après tout. Si nous gagnons, nous pouvons tous le fêter et si nous perdons, ce n'est pas la fin du monde", conclut-il.