Eva Janadin, 30 ans, et Anne-Sophie Monsinay, 29 ans, ont dirigé samedi dernier à Paris la première prière mixte de la mosquée itinérante qu’elles ont créée. Elle a eu lieu dans un local loué pour l’occasion. Les deux jeunes femmes imams ont prêché sans être voilées. Elles veulent proposer un modèle alternatif au conservatisme religieux qui, selon elles, prédomine dans les mosquées de France. Et elles entendent aider les musulmans progressistes à sortir de l’ombre.
Appelée Sîmorgh, en référence à un oiseau mythologique qui symbolise le guide intérieur de chaque croyant, cette mosquée veut mettre l’accent sur le fait que la religion doit être avant tout une relation spirituelle entre Dieu et l’individu. Les femmes y sont égales aux hommes et tous les sermons sont prononcés en français.
Prière mixte outre-Sarine
Aux Etats-Unis, une femme imam dirige la prière depuis 2005. Au Danemark, au Canada, à Londres ou encore Berlin, et même en Suisse, des femmes dirigent la prière devant des assemblées mixtes, mais pas forcément dans des mosquées dédiées ou de façon suivie.
C’est le cas notamment outre-Sarine où l’enseignante Jasmina El Sonbati et la politologue Elham Manea dirigent parfois la prière dans des chapelles protestantes ou à la Maison des religions à Berne.
Premiers pas
Le Coran n’interdit pas à une femme d’être imam, comme le confirme Wissam Halawi, professeur d’histoire de l’islam et des mondes musulmans à l’Université de Lausanne. Pour lui, l’infériorité de la femme a été théorisée dès le 10ème siècle selon une vision patriarcale qui n’a rien à voir avec les textes.
Il salue d’ailleurs cette première prière féminine en France comme un progrès social et théologique et espère qu’elle soit porteuse de quelque chose de nouveau, de profond. "Il s’agit de premiers pas pour faire éclater un islam rétrograde, qui ne colle plus à la réalité d’aujourd’hui", souligne-t-il.
Gabrielle Desarzens/boi