Dans son édition de lundi, la Frankfurte Allgemeine Zeitung écrit que le vote de dimanche témoigne
d'un «esprit borné», de «craintes» et d'une «volonté d'isolement»,
comme le soulèvent d'autres dans la presse suisse ou sur le web .
La Süddeutsche Zeitung parle d'un vote
de «frustration». Selon le journal, la «fin du secret bancaire» et
l'affaire Kadhafi ont joué un rôle dans le «oui» glissé dans les
urnes par une majorité de citoyens suisses.
Les Suisses ont également «donné une leçon» à leur gouvernement
qui «n'a pas brillé», notamment dans la gestion de l'affaire
Kadhafi, considère le quotidien allemand.
«Une peur irraisonnée»
Les titres français font écho à leurs collègues d'outre-Rhin en
parlant d' «esprit de clocher» pour commenter le vote de dimanche.
«En Suisse, la peur a gagné», souligne L'Est Républicain . «La peur
totalement irraisonnée d'une 'islamisation sournoise' de la
société», l'a emporté, écrit le journal.
Pour Libération , «la force absurde du
préjugé se vérifie d'autant plus que ce sont les cantons où il y a
le moins de musulmans qui ont le plus approuvé la mesure anti-islam
réclamée par la droite extrême».
Pour La Charente Libre , «la leçon de la
votation suisse vaut pour toutes les démocraties: elle démontre par
l'absurde les dangers du référendum dit «d'initiative populaire»,
«une aubaine et une arme redoutable pour tous les extrémistes
sachant surfer sur les peurs irrationnelles des opinions
publiques».
«Prendre pour cible des tours verticales en s'attaquant, en
réalité, aux fidèles qui sont en bas, c'est hypocrite et
fallacieux. Et, par les temps qui courent, un jeu dangereux»,
renchérit le journal belge Le Soir .
L'image de la Suisse prend un coup
Outre-Manche, le Times de Londres appelle clairement
à une invalidation du vote helvétique. Cette décision populaire est
un coup porté à la liberté de croyance, écrit le journal
britannique.
Son confrère Luxemburger Wort évoque quant à lui une possible nouvelle
affaire des caricatures. Le titre du Grand Duché fait allusion à la
vive colère provoquée dans le monde musulman par la publication de
caricatures du prophète Mahomet dans un journal danois en
2005.
Selon l'hebdomadaire allemand Der Spiegel , la décision d'interdire la
construction de minarets aura de «graves» conséquences pour la
Suisse. Le pays «va se trouver en face de gros problèmes» sur la
scène internationale. L'économie, les banques et le tourisme
helvétiques vont souffrir, prédit le magazine.
Et l'hebdomadaire d'ajouter que ce vote porte un coup à la
crédibilité de la Suisse auprès des pays musulmans en temps que
pays médiateur. Une référence aux bons offices qu'offre la Suisse
pour régler certaines crises.
ats/sbo
Le scrutin suisse fera-t-il des petits?
Au-delà du cas suisse, plusieurs journaux s'interrogent sur le résultat d'un tel vote dans d'autres pays européens. «La xénophobie n'est pas limitée à la Suisse», écrit le Stuttgarter Zeitung.
Selon Paris-Normandie, «personne ne peut aujourd'hui garantir qu'interrogés sur la même question, les Français auraient rejeté le projet d'interdire les minarets».
«La France de la burqa n'est pas la Suisse du minaret», écrit de son côté La Montagne. Mais la victoire de la droite helvétique «dans sa virulence contre les étrangers n'en sonne pas moins comme un coucou!», prévient le journal auvergnat.
«Le minaret fait peur. Il y a gros à parier que si la votation existait en Belgique, une majorité de citoyens se prononceraient contre, eux aussi. Fascistes notoires et néo-populistes se faisant fort d'attiser les passions les plus basses», analyse également le journal belge Le Soir.
Fort de cette constatation, plusieurs journaux souhaitent de profonds changements. Les appels généraux au dialogue et à la reconnaissance de la diversité ne suffisent plus pour contrer la xénophobie, écrit notamment La Repubblica. «Nous avons besoin d'une politique pragmatique en Europe qui permette de vivre ensemble», conclut le journal italien.