"Le Comité national des droits de l'homme de la Grande
Jamahiriya (ministère libyen de la justice) condamne et déplore le
référendum raciste, qui a eu lieu en Suisse (...) et qui interdit
la construction de minarets", indique le communiqué publié par
l'agence libyenne Jana.
Ce référendum "constitue une violation flagrante des droits de
l'homme et des conventions internationales (...) et est une
atteinte au droit des musulmans en Suisse à la liberté religieuse",
ajoute le communiqué.
Le Comité affirme par ailleurs qu'il n'était "pas surpris par
cette action de la part d'un Etat pratiquant l'hypocrisie
politique". Il accuse la Suisse de "codifier le racisme et la haine
des religions à travers ses lois et sa Constitution tout en faisant
semblant de respecter les droits de l'homme et la primauté de la
loi".
Pays arabes appelés à agir
Le Comité appelle par ailleurs les pays arabes et l'Organisation
de la conférence islamique (OCI) à prendre "des mesures urgentes"
contre la Confédération "pour l'inciter à annuler cette loi
raciste".
"Je suis convaincu que cette décision (des électeurs suisses)
incitera nos frères musulmans à revoir leur décision de garder leur
argent dans les banques suisses", a dit de son côté à Ankara le
ministre turc chargé des Affaires européennes, Egemen Bagis.
Faire marche arrière
Le ministre a invité ces déposants à préférer les banques
turques, les moins affectées, selon lui, par la crise financière
globale. Il a ajouté que la Suisse devait faire "marche arrière sur
cette décision erronée". Co-président des Verts au Parlement
européen, Daniel Cohn-Bendit a lui aussi parlé, lors du débat
d'infrarouge mardi et dans Le Temps mercredi, d'un retrait d'argent
des banques suisses par les plus riches musulmans.
Quelques dizaines de personnes ont par ailleurs manifesté devant
l'ambassade de Suisse à Ankara. Une couronne mortuaire noire a été
déposée devant l'édifice, selon des images retransmises par la
télévision alémanique. Les manifestants ont scandé des slogans
contre la Suisse. Le président d'une fondation religieuse a appelé
les Helvètes à rectifier leur "faute".
La consternation en Egypte
Les musulmans du Caire, surnommée "la ville aux mille minarets"
avec ses 4800 mosquées, se disent consternés par le vote des
Suisses. Cette décision est jugée intolérante, d'autant plus
qu'elle émane d'un pays censé être démocratique et libre.
Mais à la différence de la vague de protestations et des appels au
boycottage qui avaient déferlé sur l'Egypte après la publication au
Danemark fin 2005 de caricatures du prophète Mahomet, les réactions
sont pour l'instant modérées. Peu prônent des sanctions comme le
boycottage des produits helvétiques.
Le grand mufti d'Egypte, Ali Gomaa, chargé d'interpréter la loi
islamique, a critiqué le résultat du référendum mais aussi appelé
au "dialogue" avec les autorités helvétiques. Dans un pays où les
chrétiens coptes désireux de construire de nouvelles églises
rencontrent de fortes résistances, les réactions officielles sont
rares.
Les Français aussi contre les minarets
Près d'un Français sur deux (46%) se déclare opposé à la
construction de minarets en France, selon un sondage Ifop publié
jeudi dans Le Figaro. A l'opposé, 40% des personnes interrogées
disent ne pas être opposés à la construction de minarets, et 14% ne
se prononcent pas.
Par ailleurs, 41% des sondés se déclarent opposés à l'édification
de mosquées en France, 19% favorables et 36% indifférents. Quatre
pour cent ne se prononcent pas.
ats/ap/bri
Un manifeste lancé en Suisse
Après l'interdiction des minarets décidée par le peuple, le Parti socialiste suisse lance un "manifeste pour une Suisse ouverte et tolérante".
Après la "gifle infligée aux quelque 400'000 personnes de confession musulmane vivant en Suisse", il s'agit de "donner un signe fort, digne et solidaire à l'égard des minorités", a communiqué mercredi le PS. La pétition peut être signée sur Internet.
De son côté, l'imam de la mosquée de Genève a estimé dans L'Illustré qu'il incombait aux musulmans de Suisse de changer les clichés qu'une partie de la population a envers l'islam. Youssef Ibram regrette que des événements étrangers aient servi d'arguments aux partisans de l'interdiction des minarets.