"C'est quelque chose que je ne considérais pas comme raciste à l'époque, mais je reconnais aujourd'hui que c'était raciste, et j'en suis profondément désolé", a rapidement réagi, le candidat libéral lors d'un point-presse impromptu, en marge de sa campagne.
Quelques heures plus tôt, le magazine américain Time publiait une photo en noir et blanc qui a fait l'effet d'une bombe au Canada, une semaine après le début de la campagne électorale: on y voit Justin Trudeau, alors âgé de 29 ans, souriant, entouré de quatre femmes, portant un turban, le visage et les mains recouverts de maquillage foncé.
La photo, tirée d'un album de fin d'année de l'école privée de Vancouver où Justin Trudeau enseignait, a été prise lors d'une soirée sur le thème des Mille et une Nuits. "Je suis déguisé avec un costume d'Aladdin et je me suis maquillé. Je n'aurais pas dû le faire", a-t-il expliqué.
Autre vidéo embarrassante
Une télévision canadienne a diffusé jeudi une vidéo montrant elle aussi un jeune Justin Trudeau grimé en noir, prise quelques années avant la photo du Time.
Concernant ces nouvelles images, le dirigeant a reconnu s'être grimé lors d'un concours de chant dans son lycée, au cours duquel il avait interprété une chanson du chanteur noir Harry Belafonte.
"On ne peut pas vivre dans une société multiculturelle sans respecter l’autre"
Interrogé dans le 19h30 de la RTS, le secrétaire général du Carrefour de réflexion et d’action sur le racisme anti-Noir (CRAN) reconnaît l’honnêteté des excuses du Premier ministre canadien, mais souligne qu’à chaque fois qu’il y a des résurgences de ce passé raciste douloureux, "cela suscite des colères et des rages".
Pour Kanyana Mutombo, la déconstruction du racisme a du mal à s’enclencher: "On ne peut pas vivre dans une société multiculturelle sans respecter l’autre. Et lorsqu’on voit des joueurs à qui on lance des bananes dans les stades, on voit bien que ça continue et qu’il y a encore de gros efforts à faire ici en Occident"
ats/jvia
Les adversaires de Justin Trudeau dénoncent
Les principaux adversaires de Justin Trudeau pour les législatives ont immédiatement réagi, mettant en doute la personnalité profonde du Premier ministre sortant, qui cultive une image d'ouverture et de tolérance.
"C'est troublant, c'est insultant", a notamment réagi Jagmeet Singh, chef du Nouveau parti démocratique. De confession sikhe, il est aussi le premier chef de parti fédéral issu d'une minorité visible. "Les blackfaces, c'est rire de quelqu'un pour ce qu'il vit, ce qu'il est", a-t-il déploré.
Le chef des conservateurs Andrew Scheer, qui n'a cessé de questionner la sincérité de Justin Trudeau, a immédiatement saisi l'occasion pour dénoncer le "manque de jugement" du Premier ministre. "Je suis choqué et déçu", a-t-il déclaré.
Plusieurs cas de "blackface" épinglés
Plusieurs célébrités ont été épinglées ces dernières années pour avoir arboré un "blackface", pratique qui remonte aux "minstrel shows" américains nés dans la première partie du 19ème siècle, des spectacles pendant lesquels des Blancs se noircissaient le visage pour jouer des Noirs et se moquer d'eux.
En décembre 2017, par exemple, le footballeur français Antoine Griezmann avait fait face à de violentes critiques lorsqu'il avait publié sur Twitter une photo de lui déguisé en joueur de NBA des Harlem Globetrotters, le visage grimé en noir.
En juillet dernier, la compagnie aérienne Alitalia avait également dû retirer une publicité censée promouvoir sa ligne directe entre Rome et Washington, car elle avait fait jouer le rôle de Barack Obama à un acteur blanc maquillé de noir.