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Après l'accord sur le Brexit, Boris Johnson doit convaincre Westminster

Boris Johnson à Bruxelles. [Keystone - EPA/Stéphanie Lecocq]
Le destin du nouvel accord sur le Brexit suspendu à la décision du Parlement britannique / La Matinale / 2 min. / le 18 octobre 2019
De retour à Londres après avoir trouvé sur le fil un accord sur le Brexit avec les 27 à Bruxelles, le Premier ministre Boris Johnson va s'atteler vendredi à la difficile tâche de convaincre les membres du Parlement britannique de l'adopter.

La Chambre des communes doit se réunir samedi, pour la première fois depuis la guerre des Malouines en 1982, pour une séance exceptionnelle.

Mais Boris Johnson, arrivé au pouvoir fin juillet, a perdu sa majorité à Westminster et ne dispose plus que de 288 élus, là où il aura besoin de 320 voix: "On est à la fin du début", souligne ironiquement Yves Bertoncini, consultant en affaires européennes jeudi au micro de La Matinale.

"C'est le troisième accord, il y a déjà eu deux refus. Boris Johnson est offensif, mais il ne possède pas de majorité, à la différence de Theresa May qui en avait une et qui, pourtant, n'y était pas arrivée". Si l'accord ne passe pas samedi, ce spécialiste prédit un délai supplémentaire ou d'éventuelles nouvelles élections au Royaume-Uni.

Encore un report?

S'il échouait à obtenir un vote favorable au Parlement, Boris Johnson serait contraint de demander à Bruxelles un nouveau report de trois mois du Brexit, en vertu d'une loi votée début septembre par les députés, dont vingt-et-un rebelles de son propre camp.

A Bruxelles jeudi aux côtés du président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker, le Premier ministre britannique s'est dit "très confiant": "J'ai très bon espoir que lorsque les députés de tous les partis (l')examineront, ils verront les avantages de le soutenir", a déclaré le Premier ministre britannique, qui n'a de cesse de répéter qu'il veut mettre en œuvre le Brexit – déjà repoussé deux fois – au 31 octobre, quoi qu'il arrive.

Pour Yves Bertoncini, c'est un "coup de pression" de la part des Européens. "Le Parlement britannique n'est d'accord que sur une chose, il ne faut pas de sortie sans accord: pas de no deal. Et c'est pour cela que les députés ont demandé au gouvernement de réclamer un délai jusqu'au 31 janvier. Si cette demande était faite, les Européens seraient enclins à l'accepter, car il n'ont aucune raison de prendre la responsabilité d'un chaos dès la Toussaint, le 1er novembre".

Selon Jeremy Corbyn, "la meilleure façon de résoudre le Brexit est de donner à la population le dernier mot" lors d'un deuxième référendum, plus de trois ans après que 52% des Britanniques ont voté pour quitter l'Union européenne. [Keystone/epa - Jessica Taylor]
Selon Jeremy Corbyn, "la meilleure façon de résoudre le Brexit est de donner à la population le dernier mot" lors d'un deuxième référendum, plus de trois ans après que 52% des Britanniques ont voté pour quitter l'Union européenne. [Keystone/epa - Jessica Taylor]

L'accord tout juste publié, le petit parti nord-irlandais DUP, allié des conservateurs l'a rejeté. Le parti unioniste, qui compte dix députés, a dit ne pas être "en mesure de soutenir ces propositions au Parlement", sur les questions de règlement douanier et du consentement de l'exécutif nord-irlandais au projet de Brexit (lire encadré).

Ultérieurement, Jean-Claude Junker a averti que la situation deviendrait "extrêmement compliquée" si le Parlement britannique rejette samedi l'accord trouvé pour le divorce entre le Royaume-Uni et l'UE: "Si c'est le cas, nous nous trouverons dans une situation extrêmement compliquée", a-t-il déclaré à la presse au terme de la première journée du sommet européen à Bruxelles.

Jeremy Corbyn veut un nouveau référendum

Le chef du Parti travailliste, principale formation d'opposition au Royaume-Uni avec 244 députés, a appelé les députés à "rejeter" l'accord entre Londres et l'Union européenne. Selon Jeremy Corbyn, "la meilleure façon de résoudre le Brexit est de donner à la population le dernier mot" lors d'un deuxième référendum, plus de trois ans après que 52% des Britanniques ont voté pour quitter l'Union européenne.

Favorables au maintien dans l'UE, les indépendantistes écossais du SNP (35 députés) et les Libéraux-démocrates (19) ont également opposé une fin de non-recevoir.

>> Ecouter Yves Bertoncini, consultant en affaires européennes, à propos du nouvel accord de Brexit :

Yves Bertoncini, consultant en affaires européennes. [RTS]RTS
Yves Bertoncini, consultant en affaires européennes, s’exprime sur le nouvel accord de Brexit / La Matinale / 7 min. / le 18 octobre 2019

Michel Barnier s'impatiente

"Il faudra bien qu'un jour dans cette assemblée (...) on prenne ses responsabilités et que ce qui a été décidé par un référendum, et soutenu par les différents gouvernements avec lesquels nous avons négocié, se mette en œuvre", a estimé le négociateur en chef de l'Union européenne Michel Barnier. Pour le président du Conseil européen Donald Tusk, "la balle est dans le camp du Royaume-Uni".

Pour Yves Bertoncini, "qu'il y ait accord de divorce ou non, les Britanniques vont rester là: il va bien falloir établir de nouvelles relations avec eux. On passe d'un mariage à une sorte de contrat d'union civile en matière économique, sociale, stratégique, défense. Il va falloir commencer à le négocier et ça sera beaucoup plus difficile. D'une certaine manière, le contrat de divorce, c'était le hors-d'œuvre... parce que là, il va y avoir des intérêts divergents entre pays et entre secteurs dans les mêmes pays".

Ce spécialiste rappelle qu'un tel processus, très complexe, prendra des années: "Et à la fin, il faudra une ratification par l'ensemble des Parlements non seulement à Westminster, mais des 27 pays de l'Union européenne".

Interview radio: Valérie Hauert

Adaptation web: Stéphanie Jaquet et l'afp

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Un compromis sans "backstop"

Le compromis trouvé jeudi fait disparaître le "backstop", la disposition la plus controversée de la version de l'accord de Theresa May, qui a démissionné cet été.

Cette clause de sauvegarde prévoyait le maintien du Royaume-Uni dans un territoire douanier unique avec l'Union européenne pour éviter le retour d'une frontière physique sur l'île d'Irlande, afin de préserver la paix après des décennies de violences.

Le nouveau compromis établit des règles particulières pour les douanes concernant les marchandises arrivant en Irlande du Nord, qui reste dans le territoire douanier britannique, selon que celles-ci sont destinées à y rester ou à passer dans le marché unique européen.

Il prévoit également un mécanisme de "consentement" des autorités nord-irlandaises sur la poursuite de l'application de certaines règles de l'UE dans la province britannique, après une période de quatre ans suivant la mise en œuvre de l'accord.

Plus généralement, le texte prévoit les conditions du divorce entre le Royaume-Uni et l'UE, notamment en matière de droit des citoyens et de respect des engagements financiers. Il introduit également une période de transition jusqu'à décembre 2020.