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Suisse-Libye: pourparlers discrets mais intenses

Mouammar Kadhafi a appelé les musulmans à ne pas traiter avec la Suisse.
La crise entre la Suisse et le colonel Kadhafi dure depuis plus d'un an.
Les délégations suisse et libyenne sont arrivées à Berlin pour des entretiens visant à résoudre la crise entre Berne et Tripoli. A Bruxelles, des diplomates ont dit espérer que les "efforts intenses de médiation" de l'Union européenne (UE) permettent un réglement d'ici lundi.

Le secrétaire d'Etat au Département fédéral des affaires
étrangères (DFAE) Michael Ambühl est arrivé vendredi après-midi au
ministère allemand des affaires étrangères, selon des images de la
télévision alémanique SF. Les rencontres dans la capitale allemande
devaient débuter "vers le soir", ont dit à l'ATS des sources
diplomatiques.



Les rencontres dans la capitale allemande devaient débuter "vers
le soir", ont dit à l'ATS des sources diplomatiques. La réunion a
cependant été entourée de la plus grande discrétion afin de
préserver le maximum de chances à un éventuel accord face à la
forte pression médiatique. Ni le ministère allemand des affaires
étrangère ni le DFAE n'avaient confirmé la rencontre.



A Bruxelles, des diplomates ont dit avoir l'espoir que les
"efforts intenses de médiation" conduiraient à un "résultat
positif" et que le sujet serait réglé avant lundi. Jeudi, des
diplomates européens avaient déjà émis l'espoir que le différend
soit résolu dans les "48 heures".

Au plus haut niveau de l'UE

De retour de Madrid, où Micheline
Calmy-Rey a rencontré jeudi le ministre libyen des affaires
étrangères Moussa Koussa en présence du chef de la diplomatie
espagnole Miguel Angel Moratinos, la cheffe du DFAE s'est contentée
d'indiquer que les négociations se poursuivaient. "La Suisse
travaille à une solution politique", a-telle dit en marge de la
conférence du Conseil de l'Europe à Interlaken (BE).



Miguel Angel Moratinos, dont le pays assure la présidence
tournante de l'UE, avait fait état de "progrès" dans la situation
"difficile" entre la Suisse et la Libye. Les négociations entre les
parties ont d'ailleurs continué vendredi au niveau technique à
Madrid, a indiqué à l'ATS une source du ministère espagnol des
affaires étrangères.



Le conflit a pris une ampleur sans précédent, impliquant jusqu'à
la médiation européenne, depuis que la Libye a décidé le week-end
dernier de suspendre ses visas d'entrée aux ressortissants de
l'espace de Schengen. Cette mesure a été prise en représailles au
durcissement de la politique de visas de la Confédération à l'égard
de 150 Libyens, en vigueur depuis novembre dernier.

Libérer les deux Suisses

L'enjeu des négociations en cours concerne surtout le sort des
deux Suisses retenus depuis juillet 2008 en Libye et dont Berne
réclame la libération. Les deux hommes avaient été arrêtés après
l'arrestation de l'un des fils du colonel Kadhafi, Hannibal, dans
un palace genevois.



Max Göldi et Rachid Hamdani ont été accusés de "séjour illégal" et
d'"exercice d'activités économiques illégales" par la justice
libyenne. M.Hamdani a été blanchi sur les deux volets. Le
binational est à nouveau en possession de ses passeports (suisse et
tunisien), mais attend toujours un visa pour quitter le pays, selon
Amnesty International.



Max Göldi quant à lui a été condamné en appel le 11 février à
quatre mois de prison ferme pour le premier volet. Son avocat
français, Me Emmanuel Altit, a indiqué à l'ATS qu'il disposait de
30 jours pour faire recours. Max Göldi a également écopé d'une
amende de 860 francs pour le second volet. Les deux Suisses
résident à l'ambassade de Suisse à Tripoli.



Quelle que soit l'issue de la crise, la présidente de la
Confédération Doris Leuthard aura encore l'occasion d'évoquer le
sujet lundi à Madrid lors de sa visite de travail. "Mme Leuthard en
profitera pour remercier le roi d'Espagne et le gouvernement pour
leurs efforts", a indiqué Christophe Hans, chef de l'information du
Département fédéral de l'économie (DFE).



ats/cht

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Un "tour de force" de la Suisse

Pour Hasni Abidi, directeur du Centre d'études et de recherches sur le monde arabe et méditerranéen (Cermam), cité par l'AFP, l'aide inespérée de l'Europe dans ce dossier complexe représente un "tour de force", dans la mesure où les Européens, gardant en mémoire l'affaire des infirmières bulgares, "redoutaient de se mêler de ce duel car ils savent combien il est compliqué de gérer une crise avec Tripoli".

Selon les analystes, l'UE n'a pas eu le choix car elle a été à son tour "touchée par les foudres de Kadhafi", relève l'ancien diplomate helvétique, Raymond Loretan.

Une réunion des ministres des Affaires étrangères de l'UE est prévue lundi à Bruxelles et, selon des sources européennes citées par l'ATS, beaucoup espèrent que l'affaire sera réglée d'ici là.

Mais "l'affaire est sensible" et Berne ne lâchera pas sur sa "politique restrictive de visas" tant que les deux hommes ne sont pas revenus sur son territoire, explique un diplomate occidental sous couvert d'anonymat. C'est son seul moyen de pression, "ce n'est pas le moment de céder", abonde Hasni Abidi.

Mais le soutien de Bruxelles reste timide. "L'Italie, la France et Berlin ne peuvent pas se permettre de fâcher le régime libyen car les enjeux sont énormes", analyse Hasni Abidi. "Sur le plan politique, l'UE est engagée dans un processus d'intégration de la Libye", ajoute-t-il, tandis que sur le plan économique, de gros contrats sont en jeu.