Plus de 300 morts, des milliers de blessés, des centaines d'arrestations. Après plus d'un mois de contestation en Irak, le bilan s'alourdit de jour en jour. Jeudi, plus de 13 manifestants ont été tués, selon des sources médicales.
Contacté sur place, un journaliste et membre de l'observatoire irakien des droits humains décrit les méthodes des forces de sécurité pour disperser les manifestants:
"Le gouvernement irakien a commis de nombreuses violations, dont le tir à balles réelles et l’utilisation de gaz lacrymogènes à courte portée, provoquant la mort de plus de 260 personnes à ce jour. Ajoutez à cela des opérations de kidnapping de manifestants et d’activistes de la société civile, mais aussi l’arrestation d’ambulanciers qui les soignent."
>> Lire aussi : Au moins dix morts durant un nouveau jour de contestation en Irak
Des grenades lacrymogènes meurtrières
Dans un rapport récent, Amnesty International dénonce l’utilisation de grenades lacrymogènes d’un nouveau genre. Des armes capables de briser des crânes et de fendre des os, selon l’organisation de défense des droits humains. Le journaliste irakien ne peut pas le confirmer, mais il est clair pour lui que la réponse policière est d’une violence démesurée.
"On soupçonne le gaz lacrymogène utilisé d’avoir été acheté ou importé par le gouvernement irakien pour combattre le terrorisme, mais il semblerait qu’il l’utilise pour disperser les protestations, explique-t-il. Il y a eu beaucoup de cas de suffocations graves parmi les manifestants à cause de ces gaz."
>> Lire aussi : Importante journée de manifestations contre le gouvernement en Irak
L'interminable affrontement
En dépit des violences, les manifestants assurent qu'ils resteront sur les places d'Irak jusqu'à obtenir une refonte du système politique post-Saddam Hussein et un renouvellement total d'une classe politique inchangée depuis la chute du dictateur il y a 16 ans.
De la place Tahrir, la ligne de front s'est déplacée au-dessus du fleuve Tigre. C'est désormais sur quatre des douze ponts de Bagdad que manifestants et forces de sécurité se font face. Des barrages de béton y ont été montés par les policiers antiémeutes.
>> Lire aussi : Du Liban au Chili, de Bolivie en Irak, l'inépuisable colère des peuples
Le journaliste se dit inquiet pour ce troisième vendredi consécutif de mobilisation. "Nous sommes sans arrêt préoccupés. Des manifestants peuvent être tués à tout instant sous les balles des autorités qui considèrent toujours la violence comme unique réponse aux manifestants."
Le défenseur des droits humains craint aussi pour sa propre sécurité. "Bien sûr que moi et mes collègues avons peur des autorités et des milices qui leur sont rattachées. Personnellement j'ai été obligé de quitter Bagdad, de me séparer de ma famille, et de changer mes enfants d'école. Je ne peux presque plus travailler. On attend que Dieu nous vienne en aide."
mh / Nicolas Vultier avec afp