L'information est révélée lundi dans l'hebdomadaire français Le Point. Le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed veut moderniser sa vieille armée de l’air et, pour cela, il a adressé une lettre officielle au président français.
Il y demande une douzaine d’avions de combat (dont le Rafale, fleuron du constructeur Dassault), 18 hélicoptères français, une dizaine de drones dernier cri ou encore des radars et des systèmes pour brouiller les communications. La facture totale devrait approcher les 4,4 milliards de francs.
Aussi des missiles nucléaires
"Plus extravagant encore", souligne la journaliste Arianne Lavrilleux lundi dans l'émission Tout un monde: la missive mentionne aussi des missiles nucléaires. Auteure de l'article, elle souligne cependant qu'il est peu probable que la France accepte puisque les deux pays ont signé le traité de non-prolifération nucléaire.
Le problème de l'Ethiopie est qu'elle n'a pas les moyens de s'offrir ces armements. "Son Premier ministre le reconnaît lui-même et écrit qu’il aura besoin d’un prêt pour tous ces équipements", relève Arianne Lavrilleux. Addis-Abeba achèterait donc à crédit les armes françaises et c’est l’Etat français qui garantirait ce prêt. "Donc si l’Ethiopie n’arrivait pas à rembourser, c’est le contribuable français qui paierait."
S'imposer comme puissance régionale
Et si l’Ethiopie a besoin d’autant d’armes alors qu’elle vient de faire la paix avec l’Erythrée après plusieurs décennies de conflits, c'est pour réaffirmer son statut de puissance régionale, explique la journaliste. Car "le prix Nobel de la Paix est venu confirmer sa légitimité sur la scène géopolitique."
En construisant une armée puissante, l’Ethiopie espère renforcer sa crédibilité dans la Corne de l’Afrique et installer son image de gardienne locale de la paix auprès des institutions internationales. "Elle est déjà présente dans plusieurs missions de maintien de la paix de l’ONU en Afrique de l’Est", rappelle Arianne Lavrilleux. C’est aussi une manière de s’imposer face à ses voisins, de grandes puissances comme le Kenya et l’Egypte, qui ne voient pas forcément d’un bon œil la montée en puissance de l’Ethiopie.
Un pays au bord de l'implosion
Mais c’est un pari risqué au moment où le pays est le théâtre de violentes manifestations. La chercheuse Sabine Planel estime que l’Ethiopie est au bord de l’implosion interne, souligne Arianne Lavrilleux.
"Les tensions sont très profondes entre le président et une partie de la communauté Oromo et le risque, en restructurant l'armée, est que le gouvernement décide aussi de renforcer ses pouvoirs et d’opter pour une résolution violente et autoritaire de la crise actuelle."
Propos recueillis par Eric Guevara-Frey/oang