Jamais peut-être le contraste n'aura été aussi grand entre l'impression de lenteur des discussions et l'appel pressant à plus d'ambition émanant des ONG, des jeunes, de la rue et des Etats les plus vulnérables aux changements climatiques.
Les discussions ont été particulièrement techniques et laborieuses dans la capitale espagnole et se sont prolongées samedi, comme les années précédentes. Les conclusions peinent à voir le jour car plusieurs thèmes bloquent les discussions. Les positions sont notamment figées sur le financement de 100 milliards de dollars par an qu'ont promis les pays développés, dès 2020, aux pays en voie de développement.
Système de compensation
Il existe aussi un autre différend concernant les règles liées aux mécanismes d’échanges de quotas d’émission carbone. Ce blocage ne date pas d’hier: depuis l’accord de Paris en 2015, ce sujet très technique paralyse les négociations. L’idée est d’empêcher que des réductions d’émissions soient comptées deux fois, par deux pays différents. Le système de compensation de crédits carbone est loin aussi de faire l’unanimité. Les Etats présents à la COP se sont d’ailleurs scindés en deux camps.
La Suisse, avec 80 autres pays, fait partie du camp où l’on défend l’ambition en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Ce groupe de pays - la "High ambition coalition" - se veut à la pointe des efforts pour le climatique, aspirant à progresser sur ces dossiers et à relever ses engagements climatiques en 2020.
Deux camps
Il y a notamment la volonté de compenser le bilan carbone en finançant des projets de développement durable par exemple en menant un strict contrôle des projets en question. Pour la délégation suisse, le respect des règles approuvées lors de l’Accord de Paris est fondamental et elle fera tout jusqu’à la dernière minute du sommet pour que ces directives soient mises en oeuvre.
Face aux Etats les plus ambitieux, des pays comme les Etats-Unis, qui doivent quitter l'accord de Paris l'an prochain, l'Australie ou le Brésil n'ont, semble-t-il, pas facilité les choses.
"Les deux visions sont très claires, entre ceux qui veulent aller plus vite et ceux qui veulent se retrancher derrière ce qui ne fonctionne pas, afin de ne pas avancer", a déclaré la ministre espagnole de l'Environnement Teresa Ribera, dont le pays a accueilli la réunion au pied levé après le désistement du Chili.
Pas de compromis "à n'importe quel prix"
Vendredi midi, le vice-président de la Commission européenne, Frans Timmermans a prévenu que l'Union européenne était certes à la recherche d'un compromis mais pas à n'importe quel prix. "Il n'est pas question d'accepter un compromis qui mettrait en péril l'intégrité environnementale", a-t-il dit lors d'un point presse de la "High ambition coalition".
Au-delà des discussions techniques, la question de l'ambition demeure entière. Ceux qui attendaient que les Etats annoncent à Madrid un relèvement de leurs engagements climatiques sont restés sur leur faim. Ce rendez-vous-là avait déjà été pris pour 2020 et la COP26 qui se tiendra à Glasgow.
Pendant ce temps, la planète se réchauffe et, loin de se réduire, les émissions de gaz à effet de serre ont continué à croître en 2019. Même si les Etats tenaient les engagements pris dans le cadre de l'accord de Paris, la Terre se dirigerait vers un réchauffement de plus de 3°C à la fin du siècle.
dc/agences/kkub