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En Inde, une loi sur la citoyenneté "anti-musulmans" divise le pays

Le mouvement de contestation, principalement mené par des membres de la communauté musulmane, qui constitue 14% du 1,3 milliard d'Indiens, dure depuis la semaine dernière. [Keystone - Divyakant Solanki]
Rassemblements interdits dans plusieurs quartiers de New Delhi / Le Journal horaire / 27 sec. / le 18 décembre 2019
Des manifestations d'envergure secouent l'Inde depuis l'adoption la semaine dernière d'une réforme sur les conditions d'obtention de la citoyenneté indienne. Le texte est jugé discriminatoire envers les musulmans.

Voté par le Parlement indien le 11 décembre, le texte facilite l'attribution de la citoyenneté indienne aux réfugiés d'Afghanistan, du Bangladesh et du Pakistan, des pays à majorité musulmane, mais à la condition qu'ils soient de confession hindouiste, sikh, bouddhiste, jaïniste, parsie et chrétienne, excluant de facto les musulmans.

Pour ses détracteurs, le Citizenship Amendment Act (CAA) s'inscrit dans la volonté et la tendance générale des nationalistes hindous à marginaliser les musulmans en Inde, soit 200 millions de personnes sur une population de plus d'un milliard.

"Ce texte correspond à la tradition séculaire indienne d'assimilation et de respect des valeurs humanitaires", avait déclaré le Premier ministre Narendra Modi dans un message sur Twitter, ajoutant être "ravi" de cette adoption.

Attroupements interdits à Delhi

Au lendemain de nouveaux heurts dans la capitale, qui ont vu les forces de l'ordre tirer des gaz lacrymogènes et des manifestants jeter des pierres, la police de Delhi a interdit mercredi les attroupements de plus de quatre personnes dans plusieurs quartiers à majorité musulmane du nord-est de la mégapole.

Saisie par des plaignants, la Cour suprême a indiqué mercredi qu'elle entendrait les recours contre le CAA en janvier. Les opposants au texte l'estiment contraire à la Constitution et à l'esprit de laïcité indiens. L'ONU s'est dit mardi "inquiète de la violence et des présumés excès de force par les forces de sécurité".

Dérive de l'idéologie hindoue de Modi selon certains

Dans un contexte où la politique du pouvoir en place n'a cessé de cibler les musulmans, cette réforme est pour beaucoup la goutte d'eau qui fait déborder le vase.

Des villes et rues aux noms musulmans ont été rebaptisées ces dernières années pour leur donner une appellation plus "hindoue". Dans le même temps, des milices hindoues autoproclamées ont lynché plusieurs dizaines de personnes au nom de la défense de la vache sacrée, principalement des musulmans et des dalits (ex-"intouchables").

En août, New Delhi a révoqué de force le statut d'autonomie du Cachemire, seule région à majorité musulmane d'Inde. Dans l'Etat d'Assam (nord-est), un registre controversé sur la citoyenneté a laissé le même mois près de deux millions de personnes hors de sa liste finale, en grande partie des musulmans. Elles pourraient se retrouver apatride.

>> Lire aussi : Près de deux millions d'Indiens exclus de la liste de citoyenneté

En novembre, la Cour suprême a autorisé la construction d'un grand temple hindou à Ayodhya, sur l'emplacement d'une mosquée démolie en 1992 par des zélotes hindous. Cette destruction avait entraîné l'une des pires vagues de violences de l'histoire de l'Inde indépendante.

>> Lire aussi : Trois hauts responsables jugés pour la vague de violence de 1992 en Inde

ani avec agences

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