Depuis la mort dans un raid américain vendredi en Irak du général Soleimani et d'Abou Mehdi al-Mouhandis, l'homme de l'Iran en Irak et numéro deux du Hachd al-Chaabi, une coalition de paramilitaires pro-Iran intégrés aux forces de sécurité, le monde entier redoute une déflagration.
D'un côté, Téhéran crie "vengeance" et promet une riposte "militaire", de l'autre, le président américain Donald Trump menace de détruire 52 sites "de très haut niveau et très importants pour l'Iran et la culture iranienne".
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Donald Trump a à nouveau menacé l'Iran dimanche soir. "Ces messages sur les réseaux sociaux serviront de notification au Congrès des Etats-Unis si l'Iran devait frapper la moindre personne ou cible américaine, les Etats-Unis riposteront rapidement et pleinement, et peut-être de manière disproportionnée", écrit le président sur Twitter.
Dimanche soir, comme la veille, des roquettes se sont abattues près de l'ambassade américaine dans la Zone verte de Bagdad, sans faire de victimes, selon des témoins.
"Non à l'Amérique!"
Les assassinats de Soleimani et de Mouhandis ont créé un consensus rare contre les Etats-Unis en Irak, pays secoué depuis des mois par une révolte notamment contre la mainmise de l'Iran. Au Parlement, en l'absence des députés kurdes et de la plupart des députés sunnites, de nombreux élus ont scandé "Non à l'Amérique!".
Le Premier ministre démissionnaire Adel Abdel Mahdi a dénoncé "un assassinat politique" de Soleimani et de Mouhandis, qui ne laisse plus que deux choix: "appeler les troupes étrangères à partir immédiatement ou revoir leur mandat par un processus parlementaire".
Le chef du Parlement Mohammed al-Halboussi a ensuite lu une décision qui "contraint le gouvernement à préserver la souveraineté du pays en retirant sa demande d'aide" adressée à la communauté internationale pour combattre le groupe Etat islamique (EI) et donc à retirer son invitation à la coalition internationale. Dans le brouhaha, alors que parmi les 168 députés présents - sur 329 - certains réclamaient un vote, Mohammed al-Halboussi a annoncé: "décision adoptée!" avant de se retirer.
La réponse, cinglante, de Donald Trump ne s'est pas faite attendre: "S'ils nous demandent effectivement de partir, si nous ne le faisons pas sur une base très amicale, nous leur imposerons des sanctions comme ils n'en ont jamais vu auparavant", a déclaré le président américain à bord d'Air Force One, de retour de Floride où il était en vacances. "Elles feront apparaître les sanctions contre l'Iran comme presque faibles", a-t-il ajouté.
"Nous avons une base aérienne extraordinairement chère là-bas. Elle a coûté des milliards de dollars à construire. Nous ne partirons pas s'ils ne nous remboursent pas", a-t-il encore dit.
"Nous nous préparons"
Les Brigades du Hezbollah, la faction la plus radicale du Hachd al-Chaabi, avaient appelé samedi les soldats irakiens à s'éloigner "d'au moins 1000 mètres" des sites où sont présents des soldats américains à partir de dimanche soir. Ces sites pourraient être la cible d'attaques.
"La réponse sera assurément militaire et contre des sites militaires", a assuré un conseiller du guide suprême iranien dans une interview accordée dimanche à la chaîne américaine CNN.
Le secrétaire d'Etat Mike Pompeo a admis dimanche que les forces américaines stationnées au Proche-Orient pourraient subir les représailles de l'Iran. "Nous estimons qu'il y a de grandes chances que l'Iran commette une erreur et prenne la décision de s'en prendre à certaines de nos forces, de nos militaires en Irak ou soldats dans le nord-est de la Syrie", a déclaré le chef de la diplomatie américaine sur Fox News. "L'Iran commettrait une grave erreur s'il s'en prenait à eux mais nous nous préparons", a-t-il ajouté.
ats/gma
L'Iran abandonne toute "limite sur le nombre" de centrifugeuses
L'Iran a annoncé dimanche ce qu'il a présenté comme la "cinquième et dernière phase" de son plan de réduction de ses engagements en matière nucléaire. Il a affirmé qu'il ne se sentait désormais plus tenu par aucune limite "sur le nombre de ses centrifugeuses".
Dans un communiqué, le gouvernement de la République islamique indique néanmoins que "la coopération de l'Iran avec l'AIEA (l'Agence internationale de l'énergie atomique, qui soumet son programme nucléaire à un strict contrôle) se poursuivra comme avant".
L'Irak porte plainte
Samedi soir, à l'issue de défilés monstres en Irak pour les obsèques de Soleimani, des roquettes ont visé la Zone verte de Bagdad, où se trouve l'ambassade américaine déjà attaquée cette semaine, et une base aérienne abritant des soldats américains.
La coalition internationale antidjihadistes emmenée par les Etats-Unis a annoncé "suspendre" l'entraînement des forces irakiennes et le combat contre l'EI. Elle est "désormais totalement dédiée à protéger les bases irakiennes qui accueillent (ses) troupes". Washington avait déjà annoncé récemment le déploiement de 3000 à 3500 soldats supplémentaires dans la région.
Bagdad a convoqué l'ambassadeur américain pour dénoncer des "violations de la souveraineté de l'Irak" par des "opérations militaires illégitimes qui peuvent mener à une escalade des tensions dans la région". Dans la foulée, l'Irak a annoncé avoir porté plainte auprès du Conseil de sécurité de l'ONU contre "des attaques américaines contre des bases irakiennes" et "l'assassinat de commandants militaires irakiens et amis".