Le bâtonnier du barreau de Lyon Serge Deygas est venu en personne réclamer le renvoi total de ce procès très attendu dès le début de l'audience, après la lecture de l'acte d'accusation, en raison du mouvement de grève des avocats contre la réforme des retraites.
"Nous avons conscience que ce procès est très important. Néanmoins, on a considéré qu'il n'y avait pas lieu de lui donner un traitement spécial", a-t-il justifié devant les juges, accompagné d'une dizaine d'avocats grévistes.
Une requête soutenue par les avocats des parties civiles. Mais la plupart de ces derniers, comme l'avocat de la défense, n'ont demandé qu'un report d'une journée pour ne pas faire attendre davantage les victimes présumées de Bernard Preynat, âgé de 74 ans.
Plusieurs dizaines de victimes
Le père Preynat est soupçonné d'avoir agressé plusieurs dizaines de scouts issus de sa paroisse entre 1986 et 1991. Dans cette affaire, une vingtaine de plaintes n'ont pas pu être retenues en raison du délai de prescription. Lors du procès, l'homme fera face à huit victimes présumées, dont François Devaux, président de l'association "La parole libérée".
"C'est une mise à nu, une de plus, pour une cause pour laquelle je me suis beaucoup investi", souligne cette victime. "C'est une mise à nu qui n'est pas évidente, loin de là. Ce procès a pour défi de définir le préjudice de chaque partie civile, et donc mon préjudice." Un préjudice personnel qu'il estime "abyssal", après l'avoir longtemps minimisé.
Le cardinal Philippe Barbarin aussi éclaboussé
Les agissements de Bernard Preynat ont aussi éclaboussé le cardinal Philippe Barbarin. Ce dernier a été condamné à 6 mois de prison avec sursis pour ne pas avoir dénoncé les faits. C'est ce cardinal qui prononcera cette phrase devant la presse. "Nous sommes confrontés à des faits anciens, et grâce à Dieu, tous ces faits sont prescrits."
Interpellé par un journaliste qui lui fait remarquer que son "grâce à Dieu" peut s'entendre comme un "heureusement", le cardinal répond "je voudrais vous dire que je ne fais pas ça contre l'Eglise, mais pour l'Eglise".
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Une phrase, une affaire devenue ce film "Grâce à Dieu" du réalisateur François Ozon, un long métrage que Bernard Preynat a tenté en vain d'interdire.
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Le père Preynat a jusqu'ici été condamné à la peine maximale prévue par le droit de l'Eglise. Il a été réduit à l'état laïc. C'est aujourd'hui en tant que civil qu'il sera jugé à Lyon.
Natacha Van Cutsem/ebz