"Au niveau de l'exécutif, nous n'avons aucune velléité à ne pas organiser les élections dans le pays mais nous sommes dans une situation de fait", a déclaré lundi Jovenel Moïse, dont le pays est plongé dans une grave crise depuis des mois.
Les élections législatives et municipales qui auraient dû se tenir en novembre n'ont pas eu lieu car la loi-cadre pour l'organisation des scrutins n'a pas été approuvée par le parlement, où la majorité était pourtant acquise à Jovenel Moïse. Si le nombre de sénateurs encore en poste aujourd'hui fait débat sur la scène politique haïtienne, le mandat de la totalité des députés est comme prévu arrivé à terme ce lundi.
"Dérive dictatoriale" dénoncée
Cette situation confère au président la possibilité de gouverner par décret, ce que l'opposition et une majorité de secteurs de la société civile dénoncent à l'avance en évoquant "une dérive dictatoriale".
Durant l'année 2019, ces opposants n'ont cessé de réclamer la démission de Jovenel Moïse en raison de son implication dans un scandale de corruption. Entre septembre et décembre, cette contestation a même entrainé la paralysie totale des activités à travers le pays, au point que les écoles sont restées fermées pendant plus de deux mois.
Lundi, le président a annoncé vouloir profiter de l'absence de pouvoir législatif pour opérer des réaffectations budgétaires. En précisant la somme à la gourde près (la monnaie nationale), le président haïtien a en effet estimé que le départ des parlementaires constituait une économie budgétaire de plus de 16,3 millions de dollars américains.
"J'ai pris la décision, en voyant ce montant ce matin, (...) que soient construits dix lycées dans le pays avec cet argent", a déclaré Jovenel Moïse aux journalistes, qui n'ont pas eu la possibilité de poser de questions.
Contexte catastrophique
Cette proposition présidentielle intervient dans un contexte économique catastrophique. Les parlementaires n'ayant pas approuvé de budget au cours des deux dernières années, l'Etat haïtien fonctionne actuellement sur reconduction du budget 2017-2018.
Or selon le FMI, le pays connaissait en 2017 un taux de croissance de 1,5% et une inflation à 14,7%. Aujourd'hui, l'inflation a dépassé les 20% et l'économie est entrée en récession avec une réduction du PIB national de 1,2% pour l'année 2019.
ats/jfe