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Le Royaume-Uni face à une équation à plusieurs inconnues

Vignette interview Martin Wolf Financial Times
Interview de Martin Wolf, journaliste au Financial Times / L'actu en vidéo / 3 min. / le 30 janvier 2020
Au soir du Brexit, le Royaume-Uni entrera dans une phase de transition de quelques mois, le temps de définir ses relations futures avec l'Union européenne. Des discussions qui s'annoncent pour le moins agitées.

L'histoire du Royaume-Uni et de l'Europe n'a jamais été simple. C'est celle d'une île rattachée à un continent par sa proximité géographique, mais toujours tentée de larguer les amarres. Vendredi soir, le pays prendra le large comme l'ont souhaité 52% des électeurs britanniques lors du référendum sur le Brexit en juin 2016.

Le divorce est donc prononcé, mais ce n'est qu'au 1er janvier 2021 qu'il sera effectif. Concrètement, cela signifiera la fin de la libre circulation des personnes et des marchandises ainsi que le retour des contrôles aux frontières. "Nous ne serons pas dans le marché unique et nous ne serons pas dans l'union douanière", a prévenu Sajid Javid, le ministre britannique des Finances.

Accès au marché européen

En principe, les entreprises devront donc, comme c'est le cas à la frontière suisse, remplir de lourdes formalités douanières pour entrer et -surtout- sortir du Royaume-Uni. Restent à savoir aussi quelles conditions les produits britanniques devront remplir pour accéder au marché européen.

C'est sur ces points que Londres et Bruxelles devront plancher ces prochains mois et la négociation s'annonce ardue. D'un côté, le gouvernement de Boris Johnson reste flou sur sa stratégie. De l'autre, l'Union européenne a déjà annoncé qu'elle ne se laisserait pas impressionner et ne céderait pas sur certains points. La question irlandaise et le respect des normes européennes, par exemple.

L'Union européenne dominera les négociations et dictera l'agenda

Martin Wolf, éditorialiste au Financial Times

De facto, le rapport de forces paraît inégal. Sans le Royaume-Uni, l'UE reste un marché de 450 millions de personnes, à l'origine de 18% de la production mondiale de richesses.

>> Voir le reportage de Delphine Gianora, chez Lush :

Le brexit inquiète les entreprises britanniques. Reportage chez Lush.
Le brexit inquiète les entreprises britanniques. Reportage chez Lush. / 19h30 / 2 min. / le 30 janvier 2020

Partenaire commercial numéro 1

L'UE demeure aussi à ce stade le principal partenaire commercial de Londres et renoncer à cette relation privilégiée aurait un coût massif pour l'économie britannique et ce même si des accords de libre-échange sont développés en parallèle avec d'autres pays.

"Il est plus important pour les Britanniques d'avoir accès au marché européen, que pour les Européens d'avoir accès au marché britannique, quoi qu'en dise notre gouvernement", confirme Martin Wolf, éditorialiste au Financial Times.

Dans l'agenda que pourrait imposer l'UE au Royaume-Uni, un dossier à l'apparence anecdotique pourrait cristalliser les tensions, celui de la pêche.

Un enjeu territorial

"Pendant la campagne pour le référendum, la pêche est devenue un enjeu de contrôle territorial pour les Britanniques, mais mon hypothèse est que la France et l'Espagne ne renonceront pas facilement", observe Martin Wolf, qui relève qu'en l'absence d'accord c'est bel et bien tout l'écosystème marin qui pourrait subir le préjudice.

"Tout cela est très symbolique, mais tout est très symbolique dans le comportement du gouvernement britannique. Il n'y a par exemple pas de véritables arguments pour justifier qu'on diverge des réglementations européennes pour les biens. Les services, c'est autre chose, mais quand bien même, si on ne s'aligne pas sur l'UE dans les services, nous en subirons les conséquences", analyse l'éditorialiste du Financial Times.

La City, place financière mondiale, fera ainsi probablement les frais d'une absence d'équivalence boursière, au risque de perdre de son rayonnement international. Mais tout cela ne se fera pas en un jour et, autant le dire clairement: non, le Brexit ne disparaîtra pas au 12e coup de minuit à Bruxelles. Et bien malin qui pourra prédire ses effets sur le long terme.

Juliette Galeazzi

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Quid des autres partenaires économiques des Britanniques ?

Le gouvernement de Boris Johnson a plusieurs fois déjà affiché sa volonté de multiplier les accords de libre-échange avec des pays extra-européens. Le Premier ministre a notamment affiché sa priorité d'aboutir à un accord avec les Etats-Unis, des négociations qu'il envisagerait de mener en parallèle de celles avec l'Union européenne.

Mais le Royaume-Uni devra aussi s'assurer de conserver ses liens privilégiés avec la quarantaine de pays auxquels il avait un accès privilégié en tant que membre de l'UE, dont le Japon, Singapour ou encore le Vietnam. En l'absence de traité, les exportations britanniques risqueraient d'être taxées ou limitées à l'entrée.