Jeudi matin, RTSinfo a réussi à entrer en contact avec un couple de Québécois qui se trouve à bord; ceux-ci critiquent les mesures de mise en quarantaine.
La situation les préoccupe, d'autant plus que Manon Trudel, professeure en santé et risque biologique, connaît très bien les règles d'hygiène et les mesures sanitaires à adopter dans ce genre de situation: "Les conditions d'hygiène et de salubrité changent de jour en jour. On nous a fourni des masques qui sont plutôt chirurgicaux: ils protègent non pas la personne qui le porte, mais les autres autour. Et là, on était obligés de les porter".
Le lendemain, la consigne avait été changée: "Il fallait aussi porter des gants. Le surlendemain, on n'avait plus besoin de gants... Une journée, il faut être à un mètre de tout individu; le lendemain, c'est deux mètres."
Des mesures inadéquates
Manon n'est pas rassurée: "Quand on se promène sur le pont et qu'on voit des gens qui n'ont pas leur masque, simplement parce qu'ils fument ou qu'ils parlent au téléphone... Il n'y a personne de la sécurité qui se promène sur le pont pour demander aux gens de mettre leur masque! Oui, ça m'inquiète".
La professeure pointe aussi du doigt le système de ventilation: elle craint qu'il ne fasse circuler de l'air contaminé et accélère ainsi la propagation du virus. Avec son conjoint Julien Bergeron, ils passent 23h sur 24h dans leur petite cabine de 14 mètres carrés sans balcon ni fenêtre.
Difficile de savoir ce qui se passe: "Il y a beaucoup d'ambulances, des camions de pompiers, mais on ne sait pas combien de personnes vont partir à l'hôpital. Et on ne sait pas comment se portent les personnes hospitalisées. Toute à l'heure, j'ai parlé au consul canadien: il dit qu'il n'y a pas de morts. Il y a quatre personnes en état critique... mais ils vont comment, ces gens-là?"
"Sortez-nous d'ici au plus vite!"
Et ce matin, les passager ont reçu une mauvaise nouvelle: "Un agent de la quarantaine a été déclaré avec le coronavirus. Donc cela veut dire que c'est quelqu'un qui a été dans beaucoup de chambres du bateau: et ça, pour moi, c'est la pire nouvelle qui pouvait arriver".
"On a proposé d'aller faire une quarantaine sur Mars, ou en Australie, aussi, parce qu'ils ont une île de quarantaine dans une base militaire américaine... n'importe où, mais sortez-nous d'ici! C'est vraiment le seul message: 'Sortez-nous d'ici au plus vite'!"
Manon Trudel garde son sens de l'humour, mais elle ne se sent pas en sécurité sur ce bâtiment, d'autant plus que le manque de communication est très problématique: "Quand ça cogne à la porte pour nous transmettre les repas, Julien met son masque pour répondre et, là, il reçoit un pot de vitamines... et il y a 300 comprimés. Et divisé par deux, cela fait 150: 150 jours".
Le 19 février?
Impossible de prédire quand cela se terminera: "Ils nous parlent du 19 février, mais je ne suis pas convaincue par cette date. Combien de temps cette quarantaine va-t-elle durer? Est-ce qu'on va finir cette boîte de vitamines?"
Si le Diamond Princess est toujours en quarantaine au large du Japon, un autre navire de croisière américain, lui, va enfin pouvoir débarquer au Cambodge après dix jours de confinement...
Sujet radio: Zoé Decker
Adaptation web: Stéphanie Jaquet