Les chiffres donnent le tournis. Au cours des trente prochaines années, notre consommation mondiale annuelle de plastique devrait doubler, à plus de 700 millions de tonnes par année. Imaginez: plus de la moitié de tous les plastiques jamais produits ont été fabriqué depuis 2000.
D'ici la fin du siècle, le monde consommera quatre fois plus de plastique qu'aujourd'hui, selon les estimations du Centre pour le droit international de l'environnement, un cabinet à but non lucratif.
Ce marché fait rêver l'industrie pétrolière. Si aujourd'hui nous consommons 100 millions de barils par jour, grâce notamment aux transports, l'avenir s'annonce moins rose pour la branche.
Moins d'essence
"Le transport de personnes, les voitures individuelles, sont les plus gros consommateurs de pétrole", affirme Tae-Yoon Kim, analyste, spécialiste du secteur énergétique à l'Agence internationale de l'énergie.
"Mais la concurrence au pétrole arrive avec les énergies alternatives, les moteurs électriques, le gaz naturel, les biocarburants ou les exigences d'efficience énergétique. Donc nous nous attendons à une diminution de la consommation de pétrole par ce secteur, d'ici 2040."
L'industrie pétrolière se prépare à cette évolution en misant sur la pétrochimie, soit l'ensemble des technologies qui utilisent le pétrole ou le gaz naturel pour fabriquer des composés chimiques synthétiques, et essentiellement du plastique.
Ces grands acteurs pétroliers (Chevron, Total, Exxon Mobil ou BP) sont déjà actifs dans ce secteur depuis des dizaines d'années. Mais les investissements s'accélèrent.
Le groupe néerlandais Shell a, par exemple, mis en route sa nouvelle usine pétrochimique capable de produire plus d'un million et demi de tonnes de polyéthylène par année.
Le géant pétrolier saoudien Saudi Aramco rachète, lui, son compatriote Sabic, le leader saoudien de la pétrochimie, pour près de 70 milliards de dollars.
100 kg de plastique par personne
"Dans une optique stratégique, les compagnies pétrolières se disent que la pétrochimie est un bon débouché pour l'avenir", estime Francis Perrin, directeur de recherche à l'Institut français de Relations Internationales et Stratégiques (IRIS). "La plus grande compagnie pétrolière, Saudi Aramco, annonce qu'à long terme, 70% de sa production pétrolière sera convertie en produits pétrochimiques."
L'industrie anticipe et s'adapte à notre consommation toujours croissante de produits plastique. Une demande poussée par le développement économique des pays émergents, la généralisation de nos modes de vie occidentaux et la croissance démographique mondiale.
"Aujourd'hui, l'Inde consomme environ 10 kilos de plastique par personne et par année. Ce chiffre va augmenter. Il y a, au niveau mondial, un grand potentiel de croissance pour les matières plastiques et donc pour le pétrole et le gaz utilisés par la pétrochimie."
A titre de comparaison, nous consommons en Suisse près de 100 kilos de plastique par personne et par année, comme les Américains, les Canadiens ou encore les Coréens du Sud.
Katja Schaer
Une commission pour interdire une famille de plastiques
Les plastiques "oxo-dégradables" devraient être interdits en Suisse comme ils le seront prochainement dans l'Union européenne. La commission de l'environnement du Conseil des Etats a adopté une motion en ce sens et plusieurs autres demandant une gestion des déchets plus respectueuse des ressources naturelles.
La commission soutient à l'unanimité la motion d'Isabelle Chevalley (PVL/VD) pour une interdiction des plastiques "oxo-dégradables". Ces plastiques, du fait de leur composition, se dégradent plus rapidement que les autres sous l'effet de la lumière et de la chaleur. Ils se transforment alors en micro plastique, ont indiqué mardi les services du Parlement.
L'UE a décidé d'interdire tous les plastiques "oxo" d'ici 2021. Si le Conseil des Etats suit sa commission et le Conseil national, l'interdiction pourra aussi être édictée en Suisse. (ats)