Le producteur de cinéma aux plus de 80 Oscars se considérait "comme un maître de l'univers, et les femmes qui ont témoigné (contre lui) n'étaient que des fourmis qu'il pouvait piétiner sans conséquences", a déclaré la procureure Joan Illuzzi-Orbon dans son réquisitoire final, après trois semaines d'audiences au tribunal de Manhattan.
Possible prison à perpétuité
L'Américain de 67 ans risque la perpétuité en cas de condamnation par les jurés, qui délibéreront à partir de mardi. Il pensait avoir une "police d'assurance infaillible" car les femmes qui ont témoigné au procès "faisaient la queue pour entrer dans son univers", a ajouté la procureure.
Selon elle, les six femmes qui ont accusé Harvey Weinstein au procès de les avoir agressées n'avaient "aucune raison de mentir". "Pourquoi se soumettre à tout ce stress" en venant témoigner? a-t-elle lancé aux jurés pendant ses trois heures de plaidoirie, nettement plus courte que celle la veille de l'avocate de la défense Donna Rotunno.
"Ont-elles semblé heureuses d'être au prétoire? (...) Elles ont sacrifié leur dignité, leur intimité, leur quiétude dans l'espoir de faire entendre leur voix", a-t-elle affirmé. La procureure - la même qui avait mené les poursuites contre Dominique Strauss-Kahn dans l'affaire du Sofitel en 2011, finalement abandonnées - a aussi voulu dissiper les doutes distillés par l'avocate de la défense jeudi.
Cette dernière avait insinué que ses accusatrices s'étaient elles-mêmes mises en situation d'être agressées, en continuant à fréquenter le producteur alors qu'il les avait déjà selon elles violentées.
Les crimes sexuels sont "différents"
Au cours de sa plaidoirie, elle est revenue longuement sur le récit de l'actrice Annabella Sciorra, qui affirme avoir été violée par Harvey Weinstein à l'hiver 1993-1994, chez elle à Manhattan. Des six femmes qui ont témoigné contre le cofondateur de Miramax, le témoignage de la comédienne, au début du procès, a été sans doute le plus accablant pour l'accusé.
Annabella Sciorra a tout fait pour le maintenir à distance ensuite, alors que plusieurs autres femmes sont restées en bons termes avec lui. La procureure a souligné que cela lui avait valu de figurer sur une "liste rouge" du producteur, et d'être ciblée par des personnes qu'il avait recrutées pour essayer d'étouffer en 2017 les enquêtes de journalistes du New York Times ou du New Yorker sur ses abus sexuels présumés.
C'est la publication de ces enquêtes qui avait déclenché le mouvement #MeToo en octobre 2017, précipitant la dénonciation d'abus sexuels de nombreux hommes de pouvoir. Harvey Weinstein est le premier à être jugé au pénal.
afp/oang